Avant même de tester Hatred, force est de constater que le studio Destructive Creations a réussi son coup : faire connaitre au plus grand nombre un petit shooter en vue isométrique, destiné à quelques milliers d’amateur. Le titre est même arrivé en tête des ventes sur Steam, dépassant The Witcher 3 et Grand Theft Auto V pendant un court instant. Sous couvert de vouloir dénoncer le politiquement correct de l’industrie vidéoludique, la croisade « purificatrice » proposée dans Hatred laisse un gout amer dans la bouche.
Tout ne commençait pourtant pas si mal. Et si, malgré sa morale plus que douteuse, Hatred était un jeu amusant ? La première heure fait d’ailleurs écran aux défauts dont nous parlerons par la suite. Malgré un parti pris esthétique assez sombre, le jeu est beau et fait honneur à l’Unreal Engine 4, qui s’adapte décidément à tous les genres. La destruction des environnements est extrêmement poussée, et tire agréablement parti de la technologie PhysX de Nvidia. Les échanges de coups de feu avec les civils armés et la police proposent quelques bonnes phases d’action, et les deux premiers niveaux s’enchaînent sans déplaisir.
Mais les choses se compliquent sérieusement lorsque vos opposants arrivent en nombre, et sont mieux armés. On subit alors les tirs sans savoir précisément d’où ils viennent, ce qui est particulièrement rageant puisque le jeu demande de recommencer l’intégralité du niveau en cas de décès (à moins d’avoir des vies supplémentaires). Il est possible de viser avec plus de précision, ce qui laisse entrevoir l’intérieur des bâtiments, mais l’angle de la caméra écrase le protagoniste et n’arrange rien. Une gêne que l’on aurait pu oublier si le titre de Destructive Creations n’était pas si redondant.
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Cette répétitivité enlève peu à peu l’aspect choquant tant vanté par le titre. On peut être outré de devoir égorger quelqu’un pour récupérer de la vie la première fois, mais ces saynètes perdent toute leur efficacité après une cinquantaine de visionnages. C’est l’aveu de faiblesse d’Hatred : pour véritablement choquer, la violence doit avoir du sens.
Le jeu a beau avoir été comparé à GTA et consorts pour sa cruauté, il ne dérange jamais vraiment. Au travers de ses exécutions ultra brutales, un titre comme Manhunt donnait à voir, à jouer et même à réfléchir. Si l’on n’y tuait pas des innocents, le choix du degré de violence de chaque élimination nous poussait dans nos instincts les plus primaires. La tension et l’atmosphère poussaient au vice, et le gameplay tentait donc de nous dire quelque chose. Ce n’est pas le cas d’Hatred, dont le nihilisme ambiant cache surtout l’absence de scénario. Il y avait pourtant des choses à raconter ou, pourquoi pas, à dénoncer (accès aux armes, dérive psychologique du héros…).
Est-il pour autant un produit dangereux, censé pervertir les jeunes les plus fragiles ? C’est ce que le design général du héros (une vision fantasmée d’un Rambo metalleux) ou les insinuations faites sur les développeurs laissaient penser. Mais ce n’est pas vraiment le cas. En effet, les cut-scenes qui segmentent les niveaux sont ridiculement drôles quand on les prend au second degré. Le titre nous gratifie même de la fin la plus absurde qui soit (attention spoiler). Et que dire de la lourde référence du prix de vente (16,66€) ? Ces stupidités font de Hatred un jeu comparable aux nanars ultra-gore « qu’il faut avoir vu ». Hormis les personnes les plus sensibles, personne ne s’en souviendra vraiment.
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