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[Test] Fallout 4 : L’atomique émousse

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Avec les générations de consoles de plus en plus longues et un marché PC qui a bien changé depuis quelques années, le temps semble passer plus…

Avec les générations de consoles de plus en plus longues et un marché PC qui a bien changé depuis quelques années, le temps semble passer plus vite, tant les jeux s’accumulent. Sous ces couches sédimentaires de données, la vérité éclate aujourd’hui : Fallout 3 est sorti il y a 7 ans. Son spin-off New Vegas, 5 ans. Autant dire que Fallout 4 arrive dans un univers qui a bien changé. Sauf pour lui visiblement.

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Revenu sur le devant de la scène au début de la décennie après un gros passage à vide, notamment grâce à des studios indépendants, le RPG à l’occidentale continuait pourtant de surgir épisodiquement grâce notamment à l’alternance The Elder Scrolls/Fallout. Un fixe proposé à chaque fois par le même fournisseur, Bethesda, qui revient aujourd’hui dans un marché constellé de petits dealers très doués. La concurrence est sans pitié, les réseaux installés, et pourtant, leur nouveau produit Fallout 4 tente de s’imposer sur les étals. Attendu avec inquiétude après un Fallout 3 qui était une sorte de skin d’Oblivion sans grande ambition, ce nouveau RPG post-apo n’a visiblement pas comme ligne de conduite de révolutionner son genre et encore moins sa série. Ce qui est peut-être une métaphore méta de l’introduction de l’histoire, mêlant conflit et cryogénie.

Dans la peau d’un fier américain créé de toutes pièces via un éditeur de personnage puissant et facile d’accès, le joueur débute dans un monde fantasmé, simili-années 50 idéalisées. Même si des tensions restent importantes entre divers pays dans le monde, la paix semble installée et la petite famille du héros s’occupe de sa vie quotidienne. Jusqu’au moment où l’alerte éclate, les Etats-unis sont bombardés par des engins nucléaires. Conduit dans un abri anti-atomique, le personnage principal et les siens sont placés en sommeil sans vraiment savoir ce qui leur arrive. Réveillé lors d’un événement tragique, ce dernier sera le seul survivant de son quartier, 200 ans plus tard. Faisant partie des moments forts du jeu, la sortie de l’abri est une ouverture brillante, donnant au joueur un mélange d’excitation et de crainte de la découverte d’un futur dans lequel les radiations ont dénaturé à jamais l’humanité et la nature.

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L’apprentissage de nouveaux codes, l’envie profonde de trouver un autre être de chair, apercevoir des bribes de reconstruction, le début d’une confiance retrouvée, les premières heures sont distillées avec intelligence, faisant souffler un vent d’aventure. Le joueur est un pionnier qui doit simplement survivre dans cet univers où ce n’est pas sa montre qui lui indique qu’il doit aller se reposer, mais son compteur Geiger. L’action est mise en retrait, les personnages sont autant de figures qui incarnent des idéaux auxquels le joueur est libre d’adhérer ou non et les pistes se dévoilent, certaines passionnantes, d’autres plus classiques, mais toutes favorisant une immersion dans la quête du héros, retrouver son fils. Et puis tout s’envole comme une poussière irradiée. Au fur et à mesure de l’avancée dans les terres désolées, les histoires se délitent, les promesses disparaissent et le jeu commence à s’étouffer comme un vieux moteur abandonné. Avec l’ouverture, arrive la paresse.

[nextpage title=”Des bonnes idées pas assez développées”]

Fallout 4 est dense, terriblement dense. Des destins se croisent, des péripéties s’agglutinent, et des thématiques bourrées de potentiel surgissent de cette masse. Mais comme dans Fallout 3, à aucun moment elles ne parviennent à ne serait-ce que surprendre dans leur déroulé. Mal écrites, la plupart de quêtes monologuent sans vraiment impliquer le joueur et n’abordent que par la bande leurs idées. Intelligemment intégrée, par le biais d’une rencontre avec un détective androïde, la notion de synthétique – robot similaire en tout point à un humain – cherche souvent à lorgner du côté de K.Dick et des réplicants en questionnant la nature même de ces créations. Le fait de prendre le temps d’habituer le joueur à travailler en compagnie de l’un d’eux, dans un ensemble de missions à l’ambiance très Blade Runner justement, est une idée maligne qui fonctionne très bien, mais qui n’aboutit par exemple à rien. Pas une seule fois le jeu pousse le joueur à douter de son environnement, ne le met dans une position de paranoïa. Il se contente de dresser un canevas sur lequel évoluer, mais qui n’est qu’un décor.

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Mis à part quelques fulgurances et une poignée de prises de position moralement intéressantes, Fallout 4 se contente d’enchaîner ce genre de possibilités géniales inexploitées. Les différents objectifs gravitent souvent autour d’un postulat très simple et se tournent dans la majorité des cas vers du gunfight qui débouche sur du gunfight, entre deux gunfight. La progression n’es pas désagréable, mais il est souvent difficile de ressortir d’une quête un quelconque sentiment. Un schéma vieillot qui s’entoure parfois de quelques surprises prenant la forme d’événements insérés dans le flot du jeu, sans introduction, notamment concernant la Confrérie de l’Acier, mais qui reste extrêmement mécanique. Après un The Witcher 3 dont la toile narrative étonnante arrivait à impliquer le joueur dans une quête intimement liée au reste de l’histoire sans qu’il s’en rende compte sur le moment, Fallout 4 fait figure de relique. D’autant que les PNJ s’avèrent eux aussi transparents pour la plupart, facilement interchangeables. Encore une fois, mis à part quelques exceptions, ils souffrent d’une écriture trop sage et la truculence des premiers Fallout n’est toujours pas sortie de son abri et semble ne devoir jamais le faire, du moins dans les épisodes canoniques. La petite nouveauté étant que des incohérences se glissent régulièrement dans certaines situations avec des choix de dialogue étranges, pas forcément logiques avec le contexte, ou des actions en désaccord avec certaines décisions du joueur. Ce qui ne veut pas dire que Fallout 4 n’est pas immersif, tout du moins d’un point de vue exploration.

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Le monde dépeint est lui, a contrario, d’une grande cohérence et chaque endroit traversé raconte une histoire muette où les ruines, les campements, les détails sont bien plus explicatifs que des mots. Ce monde est blessé et le montre sans cesse, tout en sachant ménager des moments touchants, par un sursaut de nature, une architecture ou un vieux studio de cinéma dans lequel les engueulades par ordinateurs interposés semblent désormais un rêve. De fait, l’accumulation de promenades à vocation guerrière reste un petit plaisir, mais pour ce simple besoin humain d’aller au-delà de la prochaine colline et de parfois croiser un moment de grâce. Mais il ne faut pas se mentir, le besoin de se stuffer, d’acquérir ce super flingue ou la curiosité sont des motivations suffisantes. Suffisantes mais pauvres. Et pourtant il y a paquet de choses à faire dans Fallout 4.

[nextpage title=”Le post-apo de chambre”]

Survie dans un monde dévasté oblige, Fallout 4 offre une grande place au crafting, que ce soit d’armes, armures ou de villes entières. Dans les premiers cas, le système est très riche et permet de concevoir exactement son fusil rêvé avec des buffs de précision, de cadence de tir, d’ajouts d’embrasement, etc. ou sa cuirasse résistante aux radiations, aux dégâts physiques, disposant de poches pour améliorer la charge maximale de l’inventaire. De quoi passer de nombreuses minutes devant son établi en recyclant son bric à brac et obtenir des ustensiles adaptés à toute situation. Et ce, même si les équipements dénichés sur le cadavre d’ennemis légendaires seront toujours largement plus dignes d’intérêts. Et de ce point de vue, Fallout glorifie clairement le loot.

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Côté « home staging », l’outil de construction de bâtiments se révèle plutôt profond, malgré la difficulté de placer de gros objets précisément à cause de l’absence d’un point de vue suffisamment éloigné et de limitations de terrain parfois un peu floues. Poser une cloison sur ce caillou de droite ne posera pas trop de problème, mais il sera impossible de la mettre sur celui de gauche, identique. Entre ça et la manie des murs de s’imbriquer entre eux tout seul dès qu’ils se rapprochent, la construction d’angles complexes peut vite rendre fou et apprendre à relativiser sur le métier d’architecte post-apo. Malgré tout, l’idée est amusante et surtout loin d’être obligatoire, ce qui permet de se réserver des moments de paix entre deux missions, en améliorant le quotidien des colonies libérées du joug des ennemis. Des conflits qui ne se règlent pas à coup de chifoumi et qui donnent l’occasion de rencontrer à nouveau le système de combat VATS initié par Fallout 3, toujours dans l’optique de conserver le côté tactique des premiers épisodes. Permettant de cibler une partie précise de l’ennemi lors d’un affrontement, dans un espace de temps ralenti, il donne au joueur la latitude de viser sans trop se presser.

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Sachant qu’il est également possible de se la jouer PGM en choisissant une approche FPS plus classique. L’intérêt est d’handicaper l’ennemi en lui détruisant un bras ou une jambe afin d’évacuer sa menace rapidement, tant les adversaires en groupes sont dangereux. Un peu plus souple que précédemment, le VATS tend quand même à être abandonné lors des combats les plus ardus dans les zones avancées, consommant bien trop vite la jauge d’action. Malheureusement, le challenge vient ici davantage de la puissance brute des opposants que de leur stratégie, l’I.A, alliée comme ennemie, étant une catastrophe. D’autant qu’il arrive trop souvent que le partenaire du joueur n’ait pas réussi à le suivre correctement, impliquant une rixe surprise en solo à cause d’un pathfinding, qui n’a de finding que le nom. C’est la grande tare de Fallout et de Bethesda par extension, et personne ne devrait plus être surpris, mais la technique est clairement un problème plombant. Sous-titres qui stagnent malgré la discussion qui se poursuit, personnages qui disparaissent, chutes de framerate, mouvement de tête dignes de l’Exorciste, c’est un véritable festival pour les amoureux de gif animés débiles.

Fallout 4, disponible à partir de demain sur PC, Xbox One et PS4 (testé sur PS4).
Les visuels qui illustrent ce test sont des visuels éditeurs.

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Notre avis

Il est difficile de décrocher d'une partie de Fallout 4. Ce n'est pas l'espoir d'une vingtaine de correctif qui permet de s'accrocher, mais bien le travail exceptionnel sur l’ambiance, ces innombrables moments de roleplay plus ou moins volontaires qui plongent en apnée dans un univers où le joueur est sollicité de toute part. Et sur ce point, Fallout 4 fonctionne parfaitement. Mais ce n'est pas suffisant pour en faire autre chose qu'un clone amélioré de Fallout 3, à des années cryogéniques de la profondeur du propos de New Vegas, et encore plus loin de l'écriture brillante d'un The Witcher 3. Fallout 4 donne l'impression d'un jeu qui n'a pas su s'adapter, conservant des rouages efficaces mais datés qui auraient pu être charmants, mais qui apparaissent ici davantage comme un problème de communication avec un joueur qui attend autre chose qu'une resucée avant un nouvel Elder Scrolls. Et c'est justement pour éviter ces beaux espoirs brisés que Bethesda devrait se résoudre à un sacrifice, confier enfin le développement de la licence à Obsidian. Le jeu sera toujours autant à la ramasse techniquement, mais les belles histoires ne se concluront plus par un « si seulement » mais par un « une autre avant d’éteindre la lumière ».
Note : 7  /  10
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