Commençons par la campagne. En se penchant sur le cas (fantasmé, et c’est tant mieux) de 14-18, le jeu imagine six chapitres incarnés par six soldats différents, sur six décors emblématiques du conflit mondial. S’il faut se farcir un certain bullshit humaniste (les cinématiques qui nous matraquent de messages neuneus et quelque peu hypocrites du type “avant d’être des soldats, ils étaient d’abord des hommes”), la campagne brille par un rythme impeccable, qui sait ménager la pause et le spectaculaire tout en restant chevillée à son sujet : la vision d’une première guerre totale et ubuesque, où l’innovation technologique égale l’horreur crasse et boueuse des champs de bataille.
Malgré quelques passages à vide (des séquences assez molles ou mal amenées), l’ensemble tient non seulement la route, mais il donne la part belle à des personnages bien écrits (le passage sur Lawrence d’Arabie notamment, où l’on incarne son espionne) et des moments dramatiques souvent justes, qui forcent à peine sur les violons. Très courte, mais suffisante cette campagne fait surtout office, comme souvent, d’apéritif sexy aux affrontements collectifs. C’est là que les affaires sérieuses commencent.
Opéra de feu et de plomb
S’il cherche depuis toujours à proposer le MMOFPS le plus dantesque et réaliste sur Terre, DICE aurait pu s’asseoir sur ses lauriers, sans concurrence à l’horizon. Heureusement, il fait bien plus que cela. Après la micro-déception que fut Hardline, il faut reconnaître à ce Battlefield 1 qu’il porte définitivement bien son nom : un jeu qui se veut autant retour aux origines que nouvelle voie, et s’impose comme le nouveau patron à suivre. Si les concepts stratégiques évoluent peu (le jeu abandonne même certaines features, comme le Levolution), DICE a choisi de mettre le paquet sur les sensations et le réalisme de combat.
Par son caractère rétro-futuriste (certaines machines font très steampunk), l’armement impose à chaque fois un apprivoisement patient, qui le rend organique. Sensation d’autant plus renforcée par sa crédibilité visuelle et sonore, d’une rare intensité. Mais surtout, la maîtrise du Frostbite 3 permet à DICE d’étaler une nouvelle gamme d’effets météorologiques et d’atmosphères qui rendent chaque bataille unique en son genre. Il faut avoir rampé dans la boue d’une tranchée éventrée par un obus, alors que les balles d’une mitrailleuse lourde déchirent nos camarades imprudents au milieu des barbelés pour saisir le degré d’immersion que réussit à donner le jeu. Immersion d’autant plus riche qu’elle propose cette fois un mode de campagne au long cours (les Operations), qui oppose les deux équipes sur divers territoires à conquérir en plusieurs manches.
Longue d’une bonne heure, si ce n’est plus, chaque Opération transforme le jeu en long métrage guerrier, dont il est très difficile d’émerger, tant la qualité des combats, la variété des level designs, et l’exigence de jeu et de progression nous saisit de toute sa fureur tripale. Alors oui, le jeu pêche par une vision fantasque de 14-18, sa politique de DLC est toujours aussi scandaleuse et le résultat technique pêche par une instabilité (sur PC surtout) qui gâche un peu la fête. Peu importe : sa générosité et son intensité sont telles que le jeu saura s’imposer sans peine dans le Panthéon des Battlefield les plus populaires.
Battlefield 1, disponible sur PC (testé sur PC), Xbox One et PS4
PS : les visuels qui illustrent ce test sont des visuels éditeurs
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