Pour le coup, DICE fait ce qu’il préfère : offrir un champ de bataille à une quarantaine de joueurs pour en faire un tableau épique et imprévisible, plein de bruit et de fureur, où le ressenti guerrier, à grand renforts de stimulus visuels et sonores, est roi. Sauf que cette fois-ci, le studio suédois doit aussi adopter la philosophie Battlefront (du multi accessible à tous, avec un gameplay simplifié et un decorum codifié), quitte à tordre un peu la sienne en cours de route. Ici, pas de gestion de munitions ou recharge de ses armes, si ce n’est qu’une barre de surchauffe à surveiller. Là, des bonus (tourelle, bouclier) qui pop au petit bonheur la chance sur le terrain, et accessibles au premier passant venu, sans aucune obligation de mérite au combat. Ici encore, l’intervention providentielle des héros des films, qui viendront trucider des régiments entiers avec leur pouvoir et leur résistance surhumaine. Là enfin, un équipement et une montée en puissance modérée pour empêcher de trop grands écarts de niveaux, et proposer l’expérience guerrière la plus démocratique qui soit.
Et il faut dire que, aux premiers abords, la recette marche au poil. Techniquement, le jeu fait l’effet d’une toile de maître. Non seulement DICE respecte fidèlement le matériau originel, son futurisme un peu daté, mais il lui injecte un réalisme sensoriel inédit, digne d’un reportage de guerre embarqué. Il faut s’arrêter quelques secondes pour contempler, et ressentir, les vents neigeux de Hoth, la roche volcanique de Sullust ou encore la végétation luxuriante et majestueuse d’Endor pour constater à quel point DICE s’est obsédé à travailler son rendu atmosphérique de façon exceptionnelle. Cette atmosphère, si elle parvient sans peine à flatter la rétine et la mémoire du joueur nostalgique, se pare aussi d’un véritable enjeu stratégique.
L’exploit est d’avoir pu faire de scènes filmiques de véritables modes de jeu aux règles pensées et cohérentes. Ce constat se fait surtout (uniquement ?) devant le mode « Attaque des Marcheurs » (sic), qui oppose les deux camps sur l’avancée (ou la rétention) de gigantesques AT-AT vers un objectif à détruire (ou à défendre). Dérivé de la capture de zones, le mode lie ici admirablement le souvenir des films (l’inoubliable ouverture de L’Empire contre-attaque notamment) et la dimension stratégique et collective d’un jeu multi à grande échelle. Pensé pour des cartes au level design exceptionnel, ce mode nous fait croire alors au plus grand jeu de guerre massive jamais créé.
Malheureusement, le bal des compliments doit s’arrêter là, car la douche froide arrive vite. Au-delà de sa performance technique et de sa séduction immédiate, Battlefront souffre d’un syndrome inhérent à beaucoup d’expériences multijoueurs (coucou Titanfall) : celui de la longévité. Car le spectacle a beau servir efficacement d’écran de fumée aux limitations tactiques du jeu (pas de classes, pas de maps, customisation limitée et rigide de l’équipement), il se heurte vite à la lassitude de revivre en boucle le même schéma de gameplay, et son manque de rejouabilité. Par exemple, sur tous les modes de jeu proposés (9 en tout), seuls 3 (Attaques de Marcheurs, Suprématie et Escarmouches) réussissent à proposer des batailles intéressantes, les autres étant clairement optionnels, quand ils ne sont pas ratés comme Escadrons de Chasseurs, qui ressemble à une caricature de Rogue Squadron. Le constat est d’autant plus rageant que le jeu s’avère vite limité en nombre de cartes, même si celles-ci sont réussies, la faute à une politique DLC qui abuse un peu trop du fan-service comme une vache à lait acquise d’avance.
Star Wars : Battlefront, disponible sur PC, Xbox One et PS4 (testé sur PS4 et PC).
Les visuels qui illustrent ce test sont des visuels éditeurs
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