Engwe a pour habitude de vendre des vélos abordables. Il en ressort des rapports qualité-prix tirant surtout sur le prix. Mais le P275 Pro promet plus. Engwe a ainsi soigné tous les éléments pour monter significativement en gamme plutôt qu’en tarif. Si l’effort est louable, le résultat est décevant. Dommage, parce qu’il suffirait d’un rien pour changer la donne. Si les 1899 euros demandés sont justifiés sur le papier, ils ne le sont pas du tout dans la pratique.
Une gamme à part
Engwe a dévoilé récemment les P275 Pro et P275 ST. Le ST a un cadre ouvert, une transmission par chaine qui semble être du Alvio et un moteur de chez Ananda.
Le P275 pro a un cadre fermé, une transmission par courroie associée à une boite de vitesse automatique à 3 rapports et à un moteur Bafang M200 logé dans le pédalier. C’est lui que nous avons essayé.
Un équipement plus qualitatif que d’habitude
On ne va pas se le cacher, généralement, Engwe gratifie ses modèles de composants bas de gamme, ou no name. Des choses qui ne sont pas faites pour durer. Mais sur ce P275 pro, ce n’est pas le cas. Nous trouvons une flopée d’équipements plutôt haut de gamme pour un vélo vendu au prix officiel de 2199 euros (hors remise) :
- Capteur de couple et de rotation
- Moteur pédalier Bafang M200
- Grosse batterie de 625 WH
- Transmission par courroie en carbone (toutes les courroies de vélos le sont, mais ça fait toujours prestigieux)
- Selle Royal suspendue ajustable en hauteur
- Freins hydrauliques Tektro
- Garde-boues
- Porte-bagage de série
- Éclairage LED intégré à l’avant
- Des pneus CST à structures fines et de type ballon de 27,5 pouces pour 2,4 pouces de large
- Un poids de 25,3 kg
- Chargeur de 3A (charge en 8 heures)
Un design clivant, mais réussi
« Clivant » est le terme journalistique utilisé pour décrire « ce que le journaliste trouve élégant, mais que d’autres trouvent moche ». Nous n’allons pas faire la fine bouche : cette batterie qui ressort à la façon d’un pot de moto, cette peinture noir mat qui tranche avec l’orange de la batterie de notre version (elle existe en gris foncé), le feu est parfaitement intégré. Dommage que celui à l’arrière ne soit raccordé à l’énorme batterie.
L’équipement urbain, car ce P275 Pro mise sur cet usage est renforcé par la présence d’un garde-boue (de série), d’une béquille et d’un cintre (guidon) droit.
Les pneus sont bien larges et assez incohérents avec le concept de vélo agile. Mais nous y reviendrons. En revanche, ça ajoute un aspect solide. Oui, « aspect », car le vélo n’est pas plus solide que les autres du même genre.
Point de fourche suspendue qui aurait alourdi la facture et le vélo.
Les soudures sont lissées. C’est devenu une mode appréciable, mais ça n’apporte rien de plus qu’une douceur esthétique.
Les garde-boues sont très réussis. Les câbles sont intégrés au cadre à l’exception de ceux du frein avant qui descend le long de la fourche.
Un moteur correct, mais une gestion de boite frustrante
La boite de vitesses est logée dans le moyeu de la roue arrière, quand le moteur est situé au niveau du pédalier. Il s’agit d’un Bafang M200. Il est aussi discret au niveau des décibels qu’au niveau de la puissance. Mais ce n’est pas le réel problème ici.
Non, notre souci venait de la boite de vitesse automatique. Visiblement, il y a une demande pour des vélos dont les vitesses se passent seules. Soit. Malheureusement, le système qui gère le passage des 3 rapports a du mal à comprendre les informations du capteur de couple : nous nous retrouvions très rapidement sur le rapport le plus « dur », et ce, même au démarrage dans une côte.
Vous comprenez le souci ? Le capteur de couple annonce un effort, l’assistance envoie toute la sauce (mais elle n’en a pas beaucoup) et le vélo estime qu’il faut se placer sur le rapport offrant le plus de résistance. C’est incohérent, déroutant puisque ce que nous n’avons pas l’assistance attendue, et fatiguant dans la mesure où il faut lutter contre la transmission, et la gravité qui implique le poids du vélo.
Un effort constant : c’est que nous ne sommes pas venus ici pour souffrir OK ?
Même sur le plat, le vélo ne cesse de vous solliciter à pédaler fort et génère une résistance trop importante. Ce n’est pas un vélo de faignants crieront certains. Certes, pédaler fait du bien. Mais il y a des vélos pour ça. Le P275 Pro, par son nom et sa conception est pensé pour « les pros se rendant sur leur lieu de travail ». Donc des personnes qui ne souhaitent pas sentir la transpiration toute la journée.
Mais surtout, l’aide délivrée par le vélo peine à compenser son poids. Moralité : vous fournissez le même effort que sur un vélo musculaire. Pour les 1900 euros demandés, ce vélo musculaire ne dépasserait pas 10 kg. Ce qui signifie que, paradoxalement, vous fournissez moins d’efforts dessus pour vous mouvoir aux mêmes allures.
L’assistance offre plusieurs modes :
- À pied pour aider à pousser le vélo dans les côtes
- Zéro : le moteur est débrayé et il n’y a pas d’aide
- Eco : le moteur est censé vous aider, mais honnêtement, c’est un mode zéro Bis
- Le mode T : sorte de mode normal qui devient le vrai mode Éco
- Le Mode S : mode inutile (cf la suite)
- Le Mode S+ : le vrai mode Sport
- Le mode B : le capteur de couple est désactivé et l’assistance est à fond tout le temps
Un vélo agile pénalisé par des pneus larges
Les peux qui habillent les roues de cet Engwe P275 Pro font 2,4 pouces de large. Leurs structures ont beau être fines, ces gommes génèrent une sorte de résistance au sol qui n’est pas raccord avec l’idée d’un vélo urbain. Mais l’adhérence est au rendez-vous, surtout sur sol sec. Sur le mouillé, c’est moins performant.
En dépit de ce choix, le vélo est assez agile. La géométrie est taillée pour attaquer la jungle urbaine. Le très large guidon offre une excellente prise en main.
Les freins sont excellents. Nous sommes dans le l’entrée de gamme Tektro, mais les 4 pistons offrent progressivité et efficacité. Notez que pour une fois, les disques livrés n’étaient pas voilés et le réglage du freinage aisé.
Concernant la route de nuit, l’éclairage avant est puissant et correctement diffus. Petit regret pour la lumière arrière qui fonctionne à l’aide d’une pile bouton et non en étant câblé à la batterie.
Une interface simple, mais lisible
Pas de fioriture ici. L’écran couleur est petit, mais lisible, même en plein soleil. Il est possible d’afficher la vitesse, la distance du trajet ou total, la cadence de pédalage et la puissance. L’indicateur de batteries est affiché en pourcentages, mais impossible de connaitre le kilométrage estimé restant.
Sur la gauche, le module de commande est simple : haut pour augmenter l’aide. Bas pour la diminuer. Le bouton central allume ou éteint le vélo. Un appui long sur le haut allume le phare avant. Rappelez-vous, celui à l’arrière est indépendant et fonctionne sur pile.
Autonomie : un chameau, certes, mais un chameau très lent finalement
Le P275 pro embarque une batterie de grande capacité de 691,2 Wh. On retrouve ce genre de proposition sur les modèles qui dépassent allègrement les 4000 euros de nos jours (car oui, il existe des vélos dans ces tarifs). Sa conception est correcte, bien que le revêtement en alliage d’aluminium semble fragile. Il faudra rester concentré en la retirant d’ailleurs, puisqu’elle descend bas dans le cadre et qu’il n’y a aucune lanière pour aider à son retrait.
Comme pour l’ADO A28, une fois la batterie retirée, il faudra protéger le trou dans laquelle elle était placée, car rien n’empêchera la poussière ou l’eau de s’y loger. À garder en tête lorsqu’il pleut.
Concernant la charge, il faudra 7 h 47 pour une charge pleine ave le chargeur de 3A fourni. Mais vous n’aurez pas souvent à le faire.
Accrochez-vous : avec un mode B ou S+ permanent, par une température autour des 10 °C, avec un cycliste de 100 kg dessus, sur notre trajet d’essai comportant à l’aller une montée de plus en plus rude sur 3 kilomètres, il a été possible de parcourir 102 km.
- C’était le vélo le plus lent à gravir notre montée de test avec un final à 7 km/h.
- Le vélo demande des efforts constants.
Un vélo pour le monde urbain et encore
La frustration est présente : le vélo a vraiment tout pour être chouette. Mais le choix de cette transmission et la mauvaise gestion des informations transmises par le capteur de couple tuent totalement son intérêt. Nous avons vraiment tout essayé sur ces deux semaines d’essai, mais rien n’y fait. Le vélo ne s’en sort que sur le plat, subit son poids et se retrouve à être au niveau d’un musculaire (et encore).
Dommage, car il avait de quoi s’en sortir dans la jungle urbaine.
Prix et disponibilité
Le vélo électrique Engwe P275 Pro au prix de 2199 euros, mais il bénéficie souvent de remise permettant de l’avoir sous les 2000 euros.
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