Test du vélo Moustache Samedi 27 Xroad FS 5 : la polyvalence a un coût

Moustache Bikes est LA marque de vélo à assistance électrique française. Elle a célébré ses 10 ans le 14 mai 2022, la plaçant ainsi dans la cour des grands noms du vélo ou du moins, la sortant de la petite start-up qui se cherche. Le Samedi 27 Xroad FS5 chapeaute la gamme des modèles dits “polyvalents”. Un mot qui veut tout et ne rien dire. Alors nous avons décidé de tester cette polyvalence. Que nous apporte ce vélo au quotidien ? Quelles en sont ses limites ? Ce vélo nous rend-il plus forts, plus fiers ? Mais surtout, ce XRoad fait-il sens auprès de la cible qu’il vise (d’ailleurs à qui s’adresse-t-il ?), surtout à un tarif aussi élitiste de 4799 euros ?

Un vélo équipé pour la polyvalence

Le Moustache Samedi 27 Xroad FS5 (ouf !) n’est pas classé par la marque dans la catégorie des vélos urbains, mais dans celle des vélos polyvalents. Autrement dit, ce Samedi 27 Xroad doit permettre de dépasser le cadre de la piste cyclable et de la survie du boulevard Sébastopol. Pour cela, il dispose d’un équipement habituellement réservé aux VTT.

Les pneus Hutchinston Python de 27,5 pouces pour 2,10 pouces (6,35 cm) de section, la fourche suspendue Suntour Mobie 25 et la suspension centrale maison offrant, toutes les deux, 100 mm de débattement (nous y reviendrons) sont taillés pour délaisser l’asphalte.

Le moteur Bosch Performance CX qui délivre 85 Nm de couple est aidé par une transmission Shimano Deore pour grimper des pentes raides. Nous sommes en monoplateau, avec une cassette en 11-42 (pour 11 dents jusqu’à 42 dents).

La batterie de 625 Wh permet de délivrer assez d’énergie pour alimenter le gourmand moteur allemand.

L’engin de 25,6 kg (tout de même) dispose de freins Shimano MT200 capables de stopper votre testeur de 107 kg en pleine descente, lancé à 64 km/h (preuve en image plus loin) en une poignée de mètres seulement.

Le cadre est en aluminium thermoformé. Il peut encaisser des contraintes élevées et récurrentes dans des conditions de température violentes.

Ajouter des garde-boues en métal de série et le cintre (guidon) en forme de moustache (oui comme la marque). Les premiers pour éviter de tâcher le slim Levi’s et la veste Primark. Le second promet une meilleure maniabilité dans la jungle urbaine comme la jungle tout court.

Tout ce beau monde semble avoir été choisi avec attention et promet sur le papier comme dans le portefeuille de n’avoir pour limite que les compétences du cycliste. Dans la réalité, c’est intéressant mais avec pas mal de défauts.

Une suspension centrale dispensable

Il existe deux versions de ce 27 Xroad chez Moustache, et le modèle que nous testons ici embarque une suspension centrale maison.

Moustache a son propre système pour amortir . Système qui devra être réglé à votre poids, soit en boutique lors de l’achat, soit pas vos soins. Un repère avec un élastique, un tableau de référence et une pompe permettront cela comme l’explique cette vidéo :

Cette suspension permet d’offrir un meilleur confort et de tenter du tout terrain. Techniquement ça fonctionne, sauf lorsqu’il a plu. Les pneus Python ne peuvent se marier avec les garde-boues sur un sol boueux justement. Dans l’idée, le Samedi 27 Xroad a des prétentions de VTT. Il a été bluffant lors de quelques séances en forêt. Mais on n’est pas au niveau d’un vrai VTT, celui avec une fourche suspendue à huile et une garde au sol élevée. Il permettra cependant de s’amuser lors de sortie entre amis sans chercher la performance. Hors de ce contexte tout terrain, cette suspension est loin d’être pratique.

Notre façon de consommer nous pousse à acheter le top d’une gamme plutôt que ce qui correspond au mieux à notre combo désire + besoin. Aidé par un prix élevé de 600 euros par rapport à la version dénuée de cette suspension, ce Samedi 27 Xroad FS donne l’impression d’être meilleur. Une impression qui va vite se traduire par une perte générale d’énergie et un gaspillage d’effort. C’est en cela que cette suspension est loin d’être pratique.

Si le vélotaf ou l’urbain est votre terrain de prédilection, cet amortisseur nommé Magic Grip Control  va certes amortir un peu plus les chocs et les aspérités de la route, mais moyennant une dissipation énergétique bien réelle. Rien ne vous empêche de la régler pour qu’elle soit dure, voire de la bloquer. Mais alors à quoi sert-elle et pourquoi la payer ?

Une dissipation énergétique qui se traduit par quelques kilomètres d’autonomie perdus. Difficile de réellement donner un chiffre sur ce point, mais le constat est réel. Autre point : dès que l’assistance se coupe, c’est à vous de fournir 100% de l’effort. Avec vos jambes et votre cardio. Cette suspension ne sera plus votre alliée du tout.

De notre avis, il vaut mieux se tourner vers la version sans cette suspension maison, appelée sobrement Moustache Samedi 27,5 XRoad. Vous y gagnerez en efficacité et limiterez un peu les efforts lorsque vous n’aurez plus d’assistance.

Le quotidien d’un cycliste urbain assisté

Ce vélo sera peut-être votre seconde monture, après un premier modèle entrée de gamme que vous aurez rincé. Habitué(e) du vélotaf ou du déplacement en biclou, vous souhaitez une machine plus performante et polyvalente. Cette polyvalence est assez artificielle.

Ce Moustache Samedi 27 Xroad FS 5 est en effet à l’aise en ville, capable de monter des trottoirs, descendre des marches, affronter la pluie. Les garde-boues sont efficaces et protègeront un peu votre corps. Mais un pantalon de pluie reste impératif pour ne pas arriver au boulot en donnant l’impression d’être passé par les égouts. Elle est artificielle car, vous le verrez après, le vélo est limité dans la phase tout terrain.

L’éclairage est confié à du Spanninga 80 lux à l’avant qui offre une diffusion ample (pratique pour voir large) mais pas suffisamment longue (revers de la médaille d’un angle de diffusion large) pour éclairer en pleine obscurité. Tout dépend de votre trajet, mais un second éclairage ne sera pas de trop. Notez que le phare intégré tire son énergie de la batterie. L’influence sur celle-ci est à peine perceptible.

Moustache sait faire des géométries efficaces. Le cadre est très bien dessiné, offrant une intégration de la (grosse) batterie quasi parfaite, tant sur le plan pratique (accessibilité) que technique (équilibre des masses, inertie en virage). Les sensations sont excellentes, le vélo se positionne avec aisance et réagit instantanément. On peut changer de direction rapidement, même à haute vitesse. Le vélo n’est jamais mis en défaut.

Les freins Shimano MT200  sont redoutables. Je n’y ai vu aucune différence avec les MT500 dans ce genre d’usage. On peut s’arrêter court, ce qui sauve la vie sur la route. Pour les habitants de zones montagneuses, les descentes n’en sont que meilleures, puisqu’on pousser la machine (60,9 km/h ont été atteints pendant notre essai) en étant sûr de pouvoir s’arrêter court.

En ville, il manquerait un feu de stop, des clignotants (mais il existe des solutions externes) et une garde au sol un poil plus haute. Celle-ci a tendance à faire frotter les pédales. Notez que le porte-bagage à la norme QL3 (c’est un standard) est d’origine. La caisse verte moche ne l’est pas. Mais nous l’avons gardé pour donner une idée du volume. Libre à vous d’y fixer ce que bon vous semble comme un siège enfant par exemple.

La suspension avant peut-être verrouillée, ce qui permet d’augmenter l’efficience du pédalage en ville, sur des enrobés bien lisses.

L’autonomie est forcément élevée, avec une telle batterie (625 Wh). En sollicitant outrageusement les 85 Nm du moteur, sur des montées violentes continues ou par flemme en laissant le mode sport activé tout le temps, avec un cycliste de 107 kg dessus, vous parcourrez aisément 50 km au minimum. Évidemment, dans les phases au-dessus de 25 km/h, le moteur se coupe.

Une assistance douce bien calibrée

D’ailleurs, parlons-en de cette assistance.

Son contrôle se fait grâce au boitier amovible Bosch Intuvia et sa petite télécommande de contrôle.

Il affiche les infos essentielles, permet de contrôler les 3 modes d’assistance et de la désactiver. On connaît sa vitesse max, sa vitesse instantanée, la puissance délivrée par le moteur en temps réel, les kilomètres parcourus, le temps de trajet. Il permet également d’allumer les feux et affiche l’autonomie restante, à la fois sous forme de barre segmentée et du kilométrage total restant en temps réel, selon votre manière de pédaler.

Le Bosch Performance CX vous propulse, moyennant pédalage, jusqu’à 25 km/h. Au-delà, il débraye afin de ne pas entrer en résistance contre vous. Heureusement d’ailleurs, puisque les 25,6 kg se font sentir. La transition est douce. Entre 24 km/h et 26 km/h, l’assistance vous laisse la main délicatement. Pas d’effet ON/OFF donc, pour notre plus grand bonheur.

Le mode écofavorise le sport et votre cardio : il vient compenser le surpoids du vélo. Vous avez l’impression de pédaler sur un vélo musculaire.

Le mode normal est le mode recommandé pour bosser tranquillement son cardio sans arriver en sueur à sa destination. C’est un excellent moyen de pratiquer une petite activité physique récurrente. Le côté santé est réel et votre organisme vous remerciera.

Le mode sport est idéal pour les jours “sans”. Si vous êtes crevé(e), que la journée a été éprouvante et interminable, ce mode vous permet de rentrer tranquillement. Mais il offre une autre avantage : les démarrages au feu. On n’est pas au niveau d’un mode MTB sur VTTAE, mais on accélère vite et fort. C’est plus sécurisant que d’avancer roue dans roue avec les voitures.

La session hors des sentiers battus

Ce Moustache XRoad FS 5  peut arpenter les chemins sauvages, tracés boueux et même les côtes de montagne. Le tout sans véritable effort, avouons-le. Pour la boue, comme nous l’avons mentionné plus haut, c’est compliqué. Les garde-boues posent problème et empêchent son évacuation.

Mais quand le sol est sec, les choses prennent une autre allure. Le Xroad FS5 est à l’aise en terrains sinueux. Le vélo ne vous piège jamais, les aspérités sont gommées, les risques de basculer sur un caillou sont nettement réduits. Il faut avouer que 100 mm de débattement sur chaque suspension permet d’amortir suffisamment avant que le choc ne fasse sauter le vélo.

Ce qui signifie qu’il vous sera possible de couper à travers champs pour rejoindre votre destination. Si on prend en compte l’autonomie, il est possible de se rendre à 25 km dans n’importe quelle condition et de revenir avec une seule charge. De quoi grimper haut, très haut et savourer la descente qui suit.

Pour avoir joué un peu avec ce vélo de prêt, les remontées d’informations du terrain dans le cintre sont parfaites, les pneus, sont, dans cet exercice, excellents. Seul bémol : les garde-boues.

La qualité a un prix, jusqu’à un certain prix

C’est là que le bat blesse. Le premier souci vient des composants. Si les freins MT200 sont suffisants, la fourche avant est un modèle bas de gamme peu résistant dans le temps. Pas de guide de chaine non plus, il faudra prendre des gants si vous déraillez.

Les pneus auraient gagné à être des Marathon Plus, plus résistants à la crevaison. Idem pour l’antivol intégré, absent de cette version à amortisseur central. L’exposition au vol est réelle et aucun système de géolocalisation n’existe malheureusement. Seule consolation, la fameuse clé de la batterie.

Mais pour mettre en perspective le budget, il faut chercher chez la concurrence. Pour ce tarif, on trouve les mêmes composants chez les grands noms du vélo. Les alternatives moins chères existent, mais offrent soit des composants moins performants, soit une batterie plus compacte.

Ce Moustache n’est donc ni un bon ni un mauvais rapport qualité-prix. Il est une proposition plutôt polyvalente et bien affûtée pour les utilisateurs cherchant un vélo endurant, utilitaire et plaisir tutoyant le haut de gamme et durable.

Notez que le vélo est vendu avec un chargeur 4A de série.

Un modèle essayé qui a 2 ans

Enfin, cet essai est un peu particulier. J’ai en effet déjà essayé le même modèle il y a deux ans. Ce qui m’a permis de prendre du recul. D’abord parce qu’entre temps, j’ai pu tester beaucoup de modèles différents de marques concurrentes. Puis cela m’a permis de voir ce que pouvait donner le vélo, 2 ans après. Le résultat est très positif. Il n’y avait rien à déplorer. Même la peinture a bien tenu. Je doute qu’il ait été entretenu avec amour, car passé d’essayeur en essayeur, chacun tentant d’atteindre les limites de l’engin.

Sur ce point, certains diraient que c’est un minimum à ce prix. Certes, mais c’est aussi la certitude d’un “truc qui dure”. À une heure où il est préférable de consommer correctement, intelligemment, ce n’est pas négligeable. En cela, ce Moustache Samedi 27 Xroad FS 5 remplit sa part du contrat. En revanche, sur la partie polyvalence, son design de vélo urbain le bride, même s’il est techniquement capable de rivaliser avec des VTT. Reste le tarif, proche d’un scooter 125 ou d’une petite voiture d’occasion, qui le place hors de portée de beaucoup de bourses.

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