Nous revoilà aux commandes de Qbby, petit carrée humanoïde et héros d’un monde monochrome et minimaliste. Confronté à une série d’obstacles en tout genre (précipices, pics mortels, murs électriques), l’avatar peut soit sauter soit compter sur un pouvoir unique : se démultiplier pour former diverses figures géométriques (ligne verticale ou horizontale, tetraminos).
Ces blocs peuvent autant servir de promontoire que de grappin (il suffit de les placer sur un rebord et de se rétracter soi-même), ou encore de bouclier à placer au-dessus de sa tête. Chaque monde (lui-même subdivisé en 6 ou 7 stages) apporte une nouvelle variante de gameplay au concept de base, et son lot de défis à relever en se creusant un peu plus les méninges. Autant prévenir ceux qui ne s’épanouissent qu’au contact d’un Baba is You ou de The Witness : vous n’y trouverez pas votre compte. Ici, le seul mot d’ordre qui prévaut reste « pédagogie » : si le premier stage de chaque monde sert de tuto guidé, les défis suivants dessinent une courbe de difficulté très magnanime, et il n’est pas rare de réussir un puzzle du premier coup.
Certes, on pourra toujours compter sur la présence de collectibles et objectifs secondaires (résoudre un puzzle en limitant les créations de bloc, par exemple) pour trouver un peu de piment et d’énigmes échevelées, mais tout cela demeure purement optionnel. La preuve manifeste de cette approche « casu » reste la façon dont le jeu nous récompense en fin de tableau : une monnaie ingame qui permettra de s’acheter de nouvelles options de customisation, pour le seul plaisir (relatif selon le profil de joueur) de personnaliser nos avatars, ou bien des items permettant de simplifier certains puzzles. On peut trouver cela dommage ou rédhibitoire en tant que fan hardcore du genre, mais ce serait se méprendre sur la cible du jeu : une initiation, grand public et dépouillée, au puzzle spatial et géométrique, qui saura tout de suite parler à un public débutant ou convivial. Car la principale nouveauté qu’apporte BOXBOY! + BOXGIRL!, c’est d’abord de rompre avec l’éternel de ce bon vieux Qbby.
Deux cerveaux à mettre en boite
Il faut bien l’avouer : si on est familier de la série, le jeu déçoit clairement sur sa partie solo. Les idées originales sont rares, et la plupart des énigmes manquent clairement de finition et de défis consistants. Mieux vaut donc se retrancher sur la partie coopérative, et son aventure entièrement jouable à deux, pour vérifier les richesses réelles de ce nouvel épisode. Qbby peut désormais s’accompagner de Qucy, son alter-ego féminin, aux capacités idoines. Plus complexes, les énigmes comptent désormais sur une complémentarité des deux avatars, de leurs corps et de leur pouvoir. Cette campagne possède non seulement un contenu qui lui est propre, mais elle évite l’écueil de la simple extrapolation (deux personnages = deux puzzles identiques).
Parfois, les deux personnages se retrouvent dans le même espace, parfois ils évoluent chacun de leur côté, de façon asymétrique. Ces casse-têtes ont surtout le mérite de favoriser une autre approche du concept : une expérience d’abord basée sur la communication et l’expérimentation, avant de passer à la pratique. Toute proportion gardée (Hal Laboratory n’a pas le génie de Valve) ce mode coopératif fait souvent penser à celui de Portal 2, tant il crée de vrais moments d’entraide, de tension (ne jouez pas si votre couple bat de l’aile) mais aussi de franche rigolade face à des situations absurdes ou des énigmes bien capillotractées.
A noter que cette campagne coopérative peut aussi se jouer seul (il suffit de switcher d’un personnage à l’autre). Si l’exercice est vite privé de sa saveur première (la pensée en duo), il a au moins le mérite d’exister. Les joueurs les plus accrochés pourront aussi se réjouir de la présence d’une troisième campagne cachée, campée par un avatar rectangulaire (Qudy), dont la nature offre des challenges un peu plus corsés que les deux premières aventures.
Think outside the box
Avec ses 270 puzzles, son format parfaitement adapté à une jouabilité salon comme nomade (c’est là le grand mérite de son esthétique minimaliste), BOXBOY! + BOXGIRL! apparaît donc l’aboutissement évident de sa licence. Ce qui peut passer pour une qualité cache également un défaut important : celui d’une certaine redite. On le sent très clairement sur certains tableaux, qui recyclent pas mal d’idées et de challenges déjà vus par le passé. S’il veut continuer cette série tout en restant dans la course, HAL Laboratory a tout intérêt à plancher sur une nouvelle approche de son gameplay, quitte à changer les choses de façon radicale. L’expérience peut se targuer d’avoir réussi sa transition vers le multijoueur, d’être généreuse et bien pensée, elle semble aussi avoir atteint les limites de son propre concept, jusqu’à parfois bégayer de manière un peu trop opportuniste.
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