Pour survivre, Battleborn met (et il a raison) son caractère déviant en façade. Comme un moyen de se rappeler au bon souvenir du studio Gearbox Software, et sa réussite à imposer, avec Borderlands, un ton unique, entre hystérie criarde et stackanovisme de la vanne. Car Battleborn peut (et doit) se considérer, par la parenté de ses graphismes en cel-shading et l’humour de ses situations, comme un parent proche de Borderlands, dont il reprend pas mal d’éléments de gameplay aussi.
Dès son prologue, sous forme de cartoon vintage, Gearbox confirme son inclinaison éditoriale à exceller dans l’art de faire des jeux de grands films d’animation interactifs, qui se réclame autant de l’esprit de Tex Avery que des frères Coen pour cette ironie féroce à railler les tropes de la culture geek. Tropes qui sont ici ceux de la SF et du space opera, que le jeu singe derrière son portait collectif de mercenaires de l’espace, aussi héroïques que parfaitement sociopathes (un parallèle avec les Gardiens de la Galaxie est tout à fait plausible ici).
Et pourtant, Battleborn se veut autre chose que Borderlands. Là où son aîné gardait une certaine linéarité narrative comme horizon, lui préfère militer pour la polyvalence multijoueur et la complémentarité de concept. Pensé pour la coop comme pour le compétitif, le jeu propose aussi bien du PvE scénarisé à la Destiny que du multi classique avec capture de zone ou du MOBA, avec défense mobile de horde de creeps, et un roster de combattants typés (tanks, DPS…) mais individualisés par leur triplette de pouvoirs uniques.
[nextpage title=”Trop de lacunes pour convaincre”]
Bien que fouillis et mono-concept (un enchainement de phases de défense d’objectif contre des vagues d’assaut exponentielles), ces batailles sont sauvées par les nombreux scripts et décors picturaux (bluffants dans l’ensemble) qui font parfaitement écran de fumée. Si la variété est devenue norme dans un arena shooter, celle de Battleborn se situe moins dans son bestiaire ou ses modes de jeu, que dans la somme d’effets visuels et de dialogues que chaque personnage débite à la minute (mon préféré : Marquis, un robot qui camoufle des injures odieuses derrière un flegme tout teutonique).
Malheureusement, cet habillage arrive vite au bout de ses artifices. Peu nombreuses, les missions du jeu perdent fortement de leur charme au fil des runs, si ce n’est de proposer celui de proposer des challenges de plus en plus hardcores (et encore, le jeu reste assez facile). Bien qu’axée sur le loot (comme Borderlands une fois de plus), la rejouabilité est récompensée par un stuff trop générique et sans éclat, qui ne mérite pas une envie de collectionnite aiguë. Mais c’est surtout le PvP qui peine à convaincre. La faute à un gameplay compétitif mal fignolé, qui manque de peps (pour pusher une lane notamment), des cartes médiocres, qui exploitent peu la verticalité du gameplay FPS, et une ergonomie qui brouille souvent l’écran de signaux inutiles. A côté d’un Team Fortress ou d’un Overwatch qui ont fait de la lisibilité un cheval de bataille, le bébé de Gearbox s’épuise dans ses gesticulations, au lieu de bosser sa clarté de jeu tactique.
Quant au contenu, celui-ci apparaît bien maigre et se consume trop vite, la faute à une politique de DLC quelque peu abusive, dont la rétention risque de coûter cher au jeu sur ses premiers mois, surtout si le succès est mitigé. Après Evolve, c’est le deuxième FPS multi de 2K qui risque de connaître un éphémère moment de gloire, avant de retomber dans l’indifférence, et ce, pour les mêmes raisons. Mais Battleborn souffre de problèmes bien plus profonds dans ses mécaniques qu’une simple avarice de contenu.
Battleborn, disponible sur PC, Xbox One et PS4 (testé sur PC)
Les visuels qui illustrent ce test sont des visuels éditeur
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