Excellente manière de donner une « suite » sans trop s’embêter à projeter son univers, le reboot touche les licences à toutes les tranches d’âge. Mirror’s Edge Catalyst n’y échappe pas et reprend donc le propos du premier épisode en rajoutant de gros morceaux du passé de Faith. Afin que le joueur saisisse bien les tenants et les aboutissants d’un univers dont les codes sont jetés en l’air, sans explication, et via des concepts aussi pompeux que flous. Cette prise en main se déroulant sur une bêta, limitée à quelques missions, ce sentiment dispose d’une certaine marge de manœuvre pour s’effacer, mais la narration ne donne pour le moment pas de grands signes chaleureux.
Au sein d’une aventure d’enfant traumatisée par un système oppressif, le joueur reprend donc en main, et en vue interne, la bondissante coursière. Récemment sortie de prison, son premier réflexe est donc logiquement de se faire oublier des autorités… en acceptant les missions anti-gouvernementales de son pote Noah. Une belle incohérence d’entrée de jeu, qui s’explique après quelques runs mal négociés : les chutes du 6ème étage laissent des séquelles. Pour autant, l’agilité est toujours centrale, et le principe de FPS dérivant vers le parkour conserve sa place. Les toits de la ville bien trop brillante pour être honnête de Glass City, sont une nouvelle fois un terrain d’expérimentation. Mais à la différence de l’épisode original, l’aire de jeu n’est pas circonscrite dans des chapitres. Ouverte, elle est scindée en quartiers dans lesquels il est possible de s’adonner à de l’urbex, certains challenges poussant justement à la découverte de tous les recoins de ces tours claires.
Nouvelle entrée dans la dimension Mirror’s Edge, l’exploration modifie en profondeur l’approche du jeu et le fait glisser d’une construction centrée autour d’un concept fort et efficace à un fonctionnement plus diffus, dans lequel le choix oriente la manière d’apprécier l’expérience. À la manière d’une grosse frange des jeux en monde ouvert, ou semi-ouvert, aujourd’hui, Mirror’s Edge Catalyst s’articule autour d’un îlot central, à savoir la planque du mouvement contestataire. Si rien n’indique pour le moment, si ce hub sera le seul, la preview se limitant à un seul quartier, le principe reste tout de même de venir chercher les missions principales à cet endroit précis, habitat naturel du patron Noah et de l’intérimaire Icarus, remplaçant de Faith en passe d’obtenir son CDI.
Scénarisées dans la continuité de l’action, avec une mise en scène travaillée, ces dernières reposent sur des livraisons à effectuer, ou des informations à subtiliser. Bien évidemment, rien ne se passe en toute quiétude dans une quasi autocratie et pas question de laisser le pli devant la porte de la base alliée en prétextant que personne n’était là. Tout se règle de la main à la main, et du pied à la gueule. Durant ces courses dératées entre les buildings, des membres de la police locale tentent de s’interposer en utilisant, dans cette session, soit des matraques, soit des armes à feu. Dans les deux, cas, il est possible de leur échapper en quelques esquives ou d’engager le combat. Il est important de bien prendre en compte le système de protection avant de se jeter contre la maréchaussée, qui se déclenche en conservant de la fluidité dans ses mouvements.
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La prise en main hors combat se montre beaucoup plus assistée que dans Mirror’s Edge, même s’il est encore possible de se faire plaisir avec quelques tricks risqués, ce qui n’empêche pas de croiser durant ces quelques heures des soucis de précision. Les filins notamment, sont une plaie régulière, le jeu prenant plaisir à refuser que Faith s’y accroche, laissant presque entendre un petit rire pervers en fond. Même problème durant une mission où certaines vitres peuvent être brisées et d’autres non, sans aucune différence de textures ou d’indice visuel. Dans le feu de l’action, ce genre d’approximation coûte cher. Mais la plupart du temps, tout se passe pour le mieux grâce à un gameplay efficace, qui demande effectivement de débloquer les mouvements au fur et à mesure d’une montée en expérience. Si cela paraît idiot sur le papier, et c’est le cas, les actions de base déjà présentes dans le Mirror’s Edge d’origine s’obtiennent en moins de deux heures et en sont donc pas du tout un frein au plaisir de jeu. Ce qui l’est en revanche c’est le remplissage par l’absurde.
Avec son seul quartier et ses limites de contenu, la bêta de Mirror’s Edge : Catalyst affiche déjà le cahier des charges laborieux du monde ouvert actuel, une pluie d’objectifs secondaires qui s’inscrivent sur chaque m² de la carte. Course de vitesse, livraison express de documents, récupération de puces électroniques, libérer des tours radios (sic) des dizaines de petites quêtes viennent essayer de donner de la densité à un jeu qui n’en demandait pas tant. En soi, donner au joueur du contenu est une bonne chose, mais le level design de cette bêta n’allait pas du tout dans le sens de cette couverture d’activités sans intérêt. Malgré une sorte de guide, sous forme d’une ligne à suivre, permettant de se retrouver dans les dédales aériens, vouloir se déplacer tout seul casse la régularité de la course tant les chemins logiques conçus par DICE prennent l’ascendant sur l’exploration. Seuls les petites « énigmes » demandant de trouver comment atteindre tel ou tel sommet restent convaincantes, justement parce qu’elles demandent une autre manière d’appréhender l’espace sans notion de vitesse obligatoire.
Les plus compétiteurs trouveront également de quoi faire avec la fausse bonne idée des parcours créés par d’autres joueurs affichés çà et là. Ouverture à la communauté oblige, chacun peut, d’une seule touche, définir son point de départ et son arrivée afin de générer son propre circuit. Une chouette initiative, mais qui pollue la zone de jeu avec des marqueurs dans tous les sens. Et que les épreuves prennent la forme de course ou de cheminement précis à suivre, l’absence – actuelle – de notations ou de prévisualisation ne poussent pas à la démarrer. Possiblement intéressant dans une vision de partage de runs précis entre initiés, cette composante est pour le moment davantage un gadget qu’autre chose. Et c’est cette impression de fourre-tout étrange qui ressort de la bêta de Mirror’s Edge : Catalyst.
Des bonnes idées mais mal exploitées, un monde pseudo-ouvert qui propose un peu tout et n’importe quoi et une prise en main très agréable mais, pour le moment, moins ludique. Il reste encore quelques semaines à DICE pour peaufiner certains aspects de leur jeu et il peut très bien révéler de belles surprises lors de sa sortie. Mais en cet instant T, malgré un aspect grisant qui fonctionne toujours au poil et le trip de la fluidité faite arme, Mirror’s Edge : Catalyst doit encore vérifier ses baskets pour éviter que ce virage soit celui de la chute.
Mirror’s Edge Catalyst sortira sur PC, Xbox One et PS4 le 9 juin prochain
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