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[Impressions] Battlefield V : les pleurs au fusil

En ce beau mois d’octobre, les feuilles commencent à se racornir avec une certaine lenteur, transition calme vers une chute inéluctable. Mais avant de tomber, elles se subliment dans une dernière danse, toutes de rouge et de jaune habillées. L’automne a cela d’à la fois poétique et mélancolique qui lui donne sa saveur acidulée. Et ce petit vent frais, qui apporte lui des insultes en lignes, des gens qui crèvent dans des explosions et des discours militaristes. Car c’est aussi la saison des gros FPS. Deuxième à faire son apparition après Call of Duty, Battlefield V essaye d’être un peu moins bas du front. Impressions.

 

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Cette année, Black Ops n’a pas de mode solo, remplacé par quelques missions d’apprentissage à l’écriture défiant toutes les conventions anti-clichés instaurées depuis des années. Un choix qui se défend, la volonté étant de se concentrer sur ce qui a toujours été le cœur des derniers épisodes, le multijoueur. Battlefield V de son côté, se dresse la main sur le cœur et affiche avec fierté tout une partie narrative travaillée. Et là, plus personne ne rigole : le but n’est pas d’encenser le conflit, mais de parler de la guerre à travers les hommes.

Construite comme une série à l’image de ce qui avait été pensé pour l’épisode précédent, cette partie scénarisée comporte plusieurs épisodes, chacun centré sur un personnage en particulier. Après un Battlefield 1 les pieds dans la boue des tranchées de la Première Guerre Mondiale, il est ici question de Seconde Guerre Mondiale avec un peu moins de terre mais plus de bombe nucléaire. Limitée à quelques missions, la session de jeu proposée par EA permettait au moins de se rendre compte d’une chose ; le temps de la répétition de contextes usés par le cinéma et le jeu vidéo lui-même est révolu, ou au moins évité avec soin.

Pas de débarquement ni de syndrome Band of Brothers du Kansas, Battlefield V va une nouvelle fois chercher ses histoires un peu plus loin dans les strates du conflit. Il était question à la fois des tirailleurs français, de la résistance norvégienne et des opérations des forces spéciales anglaises en Afrique. Si certains faits historiques sont un peu exagérés, le principe même de tenter de donner corps à l’échelle du conflit est une démarche louable. D’autant que sous ces récits, l’humain est fondamental, vu sous le prisme de destinées perdues dans une guerre bien trop grande. Le jeu essaye de montrer en quoi ce genre d’événements tombe sur la vie de chacun et en change les règles.

Ce qui aboutit à des prises de conscience, notamment dans le cas des tirailleurs qui sont soumis à une réalité bien différente de la solidarité française devant l’ennemi : celle de leur seule appartenance “technique” à la France. Alors oui ce n’est pas La Ligne Rouge, ni Spec Ops The Line, et le tout manque de finesse dans le propos, mais DICE tente tout de même le pari de l’originalité et du changement de ton. Reste à définir sur le jeu final si cette volonté vient d’un opportunisme habile ou d’une vraie prise de conscience. Dans tous les cas, il faut résister armes à la main.

Tank on a que l’amour

Chacun des chapitres jouables s’articule autour d’un élément de gameplay précis, ou d’un gimmick limité à quelques minutes d’utilisation, renforts à un système de jeu très classique dans ses fondations. En plein milieu d’une opération secrète des forces armées anglaises en Afrique par exemple, la mission prend la forme d’une infiltration où la moindre alerte transforme les lieux en enfer de feu et de métal dont il est un peu compliqué de sortir vivant. L’I.A ennemie approximative aide à s’en sortir tout de même en cas de mauvaise passe, avec un peu de doigté, mais l’approche furtive est bien plus agréable à expérimenter. Rien de fou dans l’exécution ni dans un level-design plutôt ouvert plein de coins et de recoins pour se planquer, mais la structure fonctionne. Le même genre de sentiment ressort de l’épisode Nordlys, grosse partie de cette session de jeu.

Découpé en 3 phases, il s’ouvre sur une séquence de survie en plein milieu des montagnes norvégiennes où une incartade trop longue loin de sources de chaleur se termine par des engelures massives, puis la mort. La discrétion est de mise, via la possibilité d’assassiner discrètement des soldats allemands à la résistance au froid surhumaine.

Séquence mieux pensée que celle en Afrique grâce au sentiment d’urgence constant, motivation importante pour éviter les gunfights qui s’éternisent et font perdre de vue les rares feux de camp. Le passage suivant se déroule lui dans une map ouverte avec divers objectifs à détruire, le tout sur des skis. Une idée amusante les 5 premières minutes mais qui ne trouve pas sa voie, l’intérêt desdits skis ne survivant pas après le premier échange de coups de feu. La construction de la mission se montre en revanche plus convaincante, avec une certaine liberté dans l’approche sans perdre le fil d’un rythme qui s’accélère jusqu’à sa conclusion. Encore une fois, de l’efficacité évidente, mais rien de bien nouveau dans les faits.

On se ressert un canon

L’évolution la moins timide se trouve du côté des tirailleurs, dont l’opération repose sur la dualité habituelle prise de fort/défense de fort. Là où le schéma change c’est dans sa forme. Voulant mettre en avant la précarité de ces soldats laissés à eux-mêmes sur le front, la mission est viscérale, intense, le joueur entouré de soldats, de cris et de tirs, dans un vrai bourbier. L’impression d’être dépassé est tangible, comme celle d’être le dernier rempart. C’est sur ce savoir-faire du grand spectacle que Battlefield V fait la différence.

Rien de neuf sous le capot, mais le jeu essaye au moins de se diversifier, de raconter les choses différemment. DICE tente de créer du lien avec les combattants par une caractérisation nette au sein d’un enrobage épique de blockbuster. Une débauche visuelle, sonore, au service d’une envie de communiquer. Ça ne marche pas toujours (c’est même plutôt rare) mais quand le jeu touche juste il tient quelque chose. C’est notamment le cas du prologue dont la construction maligne aurait dû être celle du jeu tout entier avec un enchaînement fluide de séquences de jeu sans temps mort.

L’un des gros souci du jeu, dans les quelques heures passées sur son contenu solo, reste sa timidité. Toutes les idées qu’il intègre, tous les moments de grâce qui surgissent venus de nulle part sont éphémères. Comme pressé par une alerte de bombardement, Battlefield V court partout et oublie la moitié de ses affaires. Il est aussi un tantinet irrésolu sur les bords et se prend à enchaîner éclairs novateurs et vieilles rengaines sans choisir. Parce que non, vraiment, aligner les bidons explosifs bien rouges près de postes de gardes – qui iront se cacher à côté – devrait être interdit dans le game-design. Ressort donc une impression étrange d’être face à un FPS spectaculaire en temps de guerre très habituel, avec les erreurs régulières du genre, et un objet à la sensibilité plus appuyée qui veut faire passer un message, évoluer vers un style où il pourrait faire naître davantage de complexité. Cheminement louable, qu’il sera possible de juger sur pièces dès le 20 novembre prochain.

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2 commentaires
  1. Il est plus que sympathique de voir cet épisode représentant les tirailleurs pour la France.

    Déception néanmoins car même si cet opus à l’air d’essayer de sortir des sentiers battus on se retrouve toujours à la fin avec panzer vs sherman ou son équivalent british en multijoueur.

    Imaginez une expérience dans la ligne Maginot des Alpes, avec Français Vs Italiens dans les monstres de béton construits sur les sommets. Ou encore une expérience sur le front Français, avec un char B1 vs 13 char allemands comme pendant la bataille de Stonne. Ou une représentation des derniers îlots de résistance sur la ligne Maginot après avoir été contournés par le Ardennes.

    Avec des graphismes aussi splendides (car ce sont des jeux bien faits, on va pas se mentir les graphismes de bf1 et de celui si sont magnifiques) ça serai le pied.

    Dommage qu’après le traitement de bf1 sur la Grande Guerre la France n’ai pas eu un peu plus de présence dans cet opus ci.

  2. Ton enthousiasme est communicatif. Ta déception aussi. En effet tout ce que tu dis aurais eu de la gueule mais pas sûr que cela soit aussi “vendeur”. Dommage pour nous

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