Nous étions à Bordeaux, sur les petites routes départementales, le long de l’océan, en ville, bref, un peu partout pour essayer celle qui remplace la citadine électrique la plus vendue en France en 2023, mais également la seule du marché. Mais la fête est finie. Citroën a présenté récemment l’e-C3, Renault va bientôt livrer les R5 E-Tech et la MG4 ne cesse de voir son prix baisser.
Qu’à cela ne tienne, le constructeur roumain est bien décidé à défendre son territoire. Son arme est le prix : 19 900 euros, auxquels il faudra ajouter les 500 euros pour la charge rapide.
Une histoire qui a démarré sur les chapeaux de roue !
En 2019, Renault propose la City K-ZE en Chine à moins de 10 000 euros. Une voiture 100 % électrique, de faible puissance (45 ch), de couple décente (125 Nm), dont la batterie de 26,6 kWh offre 250 km selon le cycle NEDC (le WLTP chinois). Cette City K-ZE repose d’ailleurs sur la Kwid, sorte de petite Sandero très abordable, destinée aux pays émergents.
Pendant ce temps, en France, les voitures électriques coutent « un rein » et il se crée une forte demande pour un véhicule urbain électrique abordable. Dacia y voit une belle opportunité et décide de rebadger la City K-ZE et de l’adapter aux normes européennes. C’est ainsi qu’est née la Spring première du nom.
C’est un carton plein. La Spring est le 3e véhicule électrique le plus vendu en Europe. Il s’en est écoulé 150 000 exemplaires en 3 ans à peine (ndlr : la Spring a été lancée en 2021). Rien qu’en 2023, ce sont 61 000 exemplaires de la puce urbaine électrique qui ont trouvé preneurs, notamment grâce à un moteur 65 ch plus sérieux.
Mais ce succès est biaisé. La Spring est seule sur le marché. Excepté l’Ami, qui est un véhicule sans permis, rien n’était, jusque-là, capable de proposer une telle prestation à un tel tarif. C’est ce qui a donné envie à Citroën de se lancer avec, récemment, l’e-C3. Le marché va d’ailleurs s’étoffer avec l’arrivée du Hyundai Inster, un petit SUV urbain trop kawaï, ou encore la Panda, revisitée en SUV. Des véhicules qui ont pour eux d’être sexy et nous verrons prochainement ce qu’ils valent sur la route.
Dacia a décidé de prendre la voiture électrique par les câbles et de rafraichir la Spring. Au programme, un nouvel intérieur, un équipement pléthorique et un tarif de 20 000 euros. La question que nous nous sommes posée est donc : cette nouvelle Spring est-elle suffisamment armée pour nous convaincre désormais ?
À qui se destine la Dacia Spring 65 ch ?
Voici un moment que vous voulez passer sur une voiture électrique, mais les prix vous ont traumatisé. Puis vous n’êtes pas enclin à abandonner votre break diésel qui enquille 1300 km avec un seul plein, en échange d’un engin qui nécessite des recharges. Cela dit, vous aimeriez bien le soulager, votre break, surtout le matin, quand vous multipliez les relais en ville, pour déposer les enfants, vous rendre au travail, faire les courses, aller à la salle, etc. Mais vous souhaitez tout de même garder vos deux reins, c’est toujours utile. Il vous faut une voiture électrique capable de s’affranchir de ce quotidien, peu énergivore et pas cher.
C’est presque comme ça que Dacia a vendu cette nouvelle Spring. Presque, car ils ont occulté la voiture thermique. D’ailleurs, lors de la présentation, Dacia a mis en avant une donnée statistique : les utilisateurs de la Spring parcourent 37 km lors des 4 trajets qu’ils réalisent par jour. Trois utilisateurs sur quatre rechargent à domicile.
Notre modèle d’essai : la version Extreme à 21210 euros
Notre configuration était le haut de gamme. Il y a deux finitions de Spring : Expression (qui commence à 18900 euros) et Extreme (qui s’échange pour 19900 euros).
Nos modèles disposaient d’une peinture optionnelle à 650 euros, du câble de recharge type 2 (260 euros) et du chargeur “rapide” en courant continu 30 kW intégré (500 euros). Un total de 21 210 euros.
Une bonne autonomie mais une charge lente
Dans la réalité, la Spring est plutôt une voiture supplémentaire ou dédiée à un besoin limité, dans la mesure où sa recharge est longue, très longue. Comptez, avec l’option charge rapide en courant continu (30 kW) à 500 euros, 45 minutes pour réaliser le 20-80 %. Parcourir des longs trajets avec est impensable. Et il y a d’autres raisons s’ajoutent et que nous allons voir plus loin.
Cette Spring est annoncée pour 225 km d’autonomie selon le cycle WLTP. De quoi réaliser une semaine de déplacement par charge. De notre côté, nous avons trouvé cela bien optimiste. Pourtant, sur notre première boucle durant laquelle nous n’avons pas ménagé la voiture, nous avons parcouru 97 km et il nous restait 44 % de batterie. Sur notre base de conduite, attention, par temps idéal (la température était de 25 °C), l’autonomie de cette Spring est donc de 220 km.
Pour les 26,8 kWh de capacité (brute) de la batterie, c’est plutôt décent, avec 12 kWh en moyenne. Les fanboys Tesla crieront (à raison) que leur Model 3 fait moins. Mais nous ne jouons pas dans la même catégorie de poids, taille et prix. La consommation est très proche de celle de la Twingo E-Tech d’ailleurs, qui vient tout juste de sortir du catalogue de Renault.
Les droits de douane et la Commission Européenne
Ce fut forcément l’une des questions abordées durant la présentation. Pour faire simple : l’Union Européenne a mis en place un droit de douane plus élevé pour les véhicules importés de Chine. Sous couvert d’écologie, c’est surtout une mesure protectionniste qui vise à favoriser les entreprises européennes et protéger l’économie d’une concurrence déloyale (vente à perte). Concurrence déloyale qui a pour objectif de s’accaparer un marché pour ensuite gonfler les prix.
Ainsi, depuis le 4 juillet 2024, une surtaxe allant de 17 à 34 % visant les véhicules importés de Chine. Une mesure provisoire avant validation par les États membres. Problème : la Spring est produite en Chine. Pour le moment, Dacia réussit à absorber le malus sans conséquence sur le prix de vente. La Spring n’a évidemment pas droit au Bonus Écologique de 4000 euros à l’heure où nous écrivons ces lignes. Quant à l’avenir, nous verrons.
Un équipement plutôt bien fourni et une bonne habitabilité
La Spring est bien équipée :
- Android Auto sans fil
- Apple Car play sans fil
- La charge inversée (V2L) qui permet d’alimenter des appareils électroniques, comme une PS5 et un écran, par exemple
- La climatisation manuelle
- Les vitres électriques
- Coffre de 308 L
- 2 prises USB-C pour recharger les smartphones
- La banquette arrière rabattable
Sur la route : qui pneu le moins, ne pneu pas loin
C’est probablement là que pêche la Spring. Pire, elle a tout faux. Les nouveaux pneus 15 pouces n’offrent aucune adhérence. Au volant, nous n’avons aucune remontée d’information. Et ce ne sont pas les suspensions trop molles pour une voiture trop haute perchée qui améliorent quelque chose. Si sur le sec, ça peut aller, sur sol mouillé, c’est une catastrophe, avec l’impression permanente que la voiture va sortir de la route ou se mettre à glisser. Elle est dangereuse. Et c’est sans compter sur les pneus qui dérapent sur sol humide lorsque vous démarrez. C’est simple : RIEN NE VA.
Nous avons demandé à Dacia pourquoi avoir choisi ce manufacturier chinois. C’est simple : impossible de trouver un pneu européen en Chine. Il n’était pas rentable ni pensable de faire venir des pneus pour les monter en usine chinoise. Donc ce sera à vous de faire le changement et nous vous le conseillons très fortement, surtout si vous mettez des enfants à l’arrière. Comptez environ 400 euros pour changer les 4 pneus, pose comprise.
La Spring se rattrape un peu sur l’isolation sonore. Nous effectuons toutes les mesures avec une Apple Watch. Pas le sonomètre le plus précis, mais suffisant pour avoir un ordre d’idée et surtout comparer les véhicules. Nous étions à 68 dB à 120 km/h. Ce sont 6 dB de plus qu’un Tesla Model 3 de première génération ou que le dernier Hyundai Kona, des véhicules toutefois bien plus onéreux. À 80km/h, le niveau sonore tombe à 63 dB, ce qui est correct. Même en ville, le bruit urbain devrait être un peu filtré.
Les aides à la conduite sont réduites à un maintien dans la voie plutôt timide et un régulateur de vitesse. C’est suffisant pour un tel véhicule, vous n’allez pas enchainer les kilomètres sur autoroute avec. Notez que le régulateur n’est pas adaptatif.
Le mode break fait son apparition : il s’agit d’un freinage régénératif qui s’active dès que vous levez le pied de la pédale d’accélérateur. Il ne va pas jusqu’à l’arrêt complet, mais s’avère bien pratique en ville pour limiter l’usage des freins.
Le rayon de braquage est excellent, avec 4,8 mètres. De quoi opérer facilement un demi-tour. En ville, se garer dans une place serrée, bref, survivre en ville.
Une partie multimédia sérieuse
Il y a deux écrans dans la Spring. Le premier sert au compteur. Numérique, sobre, il affiche les informations nécessaires (consommation, vitesse, distance avec le véhicule précédent, autonomie restante). Une casquette permet de limiter les reflets.
Le second est une tablette 10 pouces, tactile, plutôt réactive (il s’agit de celle du nouveau Duster). Android Auto comme Apple Car Play sont présents, et sans fil. À vous Waze, Maps, Audible, Podcast et toutes les applications possibles via ces deux systèmes. L’affichage est fluide.
Dacia a eu la bonne idée de créer un raccourci physique vers les aides à la conduite. Notamment l’alerte de vitesse qui émet un bip lorsque vous dépassez la vitesse captée par la voiture. Oui, vous désactiverez cette option pour 3 raisons :
- La première est le stress généré par ce bip récurrent.
- La seconde, car la lecture des panneaux est, comme pour tous les véhicules, mauvaise, comme afficher 50 km/h sur une route à 110 km/h…
- Enfin, la troisième est liée au régulateur qui oscille entre 79 km/h et 81 km/h sur une route limitée à 80 km/h. Forcément, le véhicule sonne à 81 km/h. Bref, tout ceci est désactivable et ça, c’est cool.
Le problème de la concurrence
Il y a une règle dans le milieu : on ne compare pas une voiture d’occasion et une voiture neuve. Et bien, écoutez, cette règle n’a plus de valeur en 2024 avec les voitures électriques. Primo, car l’entretien des VE est réduit au minimum. Oubliez donc les bobines d’allumage, les turbos HS, les admissions encrassées, les courroies qui se décomposent dans l’huile… Par conséquent, il y a peu de différence entre un véhicule électrique d’occasion vieux de 4 ans et un modèle neuf.
Ensuite, parce que le marché de l’occasion s’est étoffé en plus de prix neufs qui ont baissé. Donc des modèles encore inaccessibles il y a quelques mois à peine le sont désormais aujourd’hui.
Enfin, les LOA et LLD proposées avec les véhicules neufs ont redistribué les cartes. Le jeu des loyers permet d’aligner des véhicules de gammes différentes. Avec des prestations aussi médiocres, sa grande soeur la Sandero se pose comme un meilleur choix. Comment voulez-vous rendre la voiture électrique populaire avec ce genre de proposition ?
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Achetée en 2023 (pas de concurrence directe) et 13000 km au compteur, elle correspond parfaitement a nos besoins. Ville et rocade tous les jours, recharge à domicile, nickel.
Alors oui, le tenue de route n’est pas top, c’est un gros scooter protégé des intempéries avec un bon coffre. Très vive au démarrage vous pouvez vous faire plaisir 😁.
En 2024, Internet est multimédia. Donc pourquoi des histoires de bruits ou de sonomètre et même pas un petit fichier audio pour entendre par nous même le son intérieur de la voiture ? Idem pour une vidéo pour nous montrer l’ écran de bord en fonctionnement… Bref, il est temps de faire des articles un peu autrement svp