Dans un monde où le développement d’un jeu vidéo serait un long fleuve tranquille, vous seriez déjà plongé dans Assassin’s Creed Shadows. Peut-être même auriez-vous terminé l’épopée de Naoe et Yasuke au Japon. En effet, la sortie d’Assassin’s Creed Shadows était prévue dans un premier temps en novembre 2024 avant son report au 14 février 2025. Finalement, le nouvel épisode de la licence culte a été décalé une ultime fois à ce 20 mars.
Ubisoft Québec souhaitait prendre quelques semaines de plus pour peaufiner les détails d’une aventure particulièrement attendue surtout en raison du cadre dans lequel elle se déroule. Assassin’s Creed Shadows nous embarque-t-il dans un voyage mémorable ? Loin de là.

Yasuke et Naoe, le duo d’Assassin’s Creed Shadows qui fonctionne
Il convient tout d’abord d’évoquer le contexte dans lequel nous plonger cet Assassin’s Creed Shadows. Le jeu nous propulse en 1579, au cœur du Japon féodal et plus particulièrement de la période Sengoku. Le pays vit un tournant majeur de son histoire en raison de son unification portée par le premier unificateur Oda Nobunaga.
Dans ce contexte, Assassin’s Creed Shadows propose deux personnages jouables. Naoe est une jeune shinobi dont le village d’Iga subie justement l’attaque des troupes du seigneur Oda Nobunaga. Le samouraï Yasuke, que l’on ne pourra jouer à notre guise que quelques heures plus tard, se trouve lui aux côtes du légendaire daimyo, qui l’a libéré de son statut d’esclave.
Le prologue de l’aventure se veut particulièrement engageant pour son ambiance prenante et sa mise en scène bien meilleure que dans Assassin’s Creed Valhalla. Les cinématiques se démarquent pas leur dynamisme. La beauté des environnements et le soin apporté aux modèles 3D des personnages sautent aux yeux. Une qualité de réalisation possible aussi parce qu’Ubisoft s’affranchit enfin du support de la PS4 et de la Xbox One.

Par ailleurs, le charisme de Yasuke et de Naoe parvient à nous accrocher d’emblée. Un constat encore plus prégnant en VO, même si la VF reste de bonne facture dans l’ensemble. Malheureusement, le rythme, la mise en scène de haute volée et les enjeux scénaristiques intéressants de ce prologue sont autant d’éléments que l’on ne retrouve quasiment plus dans la suite de l’aventure. Oui, le constat est particulièrement brutal, mais inéluctable.
Un scénario qui ne profite pas de ses bonnes bases
La trame narrative d’Assassin’s Creed Shadows s’articule autour de l’assassinat des membres d’une mystérieuse organisation nommée le Shinbakufu. Pour débloquer la mission qui va enfin vous permettre d’éliminer un adepte, il faut réaliser une série de quête particulièrement insipides.
Chaque arc d’un membre du Shinbafuku est lié au contexte politique locale de la zone dans laquelle il se trouve. On peine à se laisser émouvoir par les enjeux trop classiques posés par ceux-ci. La trame narrative principale liée au désir de vengeance de Yasuke et surtout de Naoe ne progresse quasiment pas entre le prologue et l’épilogue alors que le duo de héros est particulièrement attachant.
De plus, les objectifs se ressemblent tous, comme nous l’avions d’ailleurs pressenti lors de notre preview d’Assassin’s Creed Shadows : il faut généralement récupérer un objet ou éliminer une cible dans un camp ennemi pour parvenir à ses fins. Une fois les deux ou trois missions liées à un membre du Shinbakufu réalisés, vous pouvez lancer la dernière quête qui ne se démarque pas non plus par son originalité.

Naoe et Yasuke se lancent à l’assaut du lieu où se cache la cible en question sans que le donjon apporte quoi que ce soit d’innovant par rapport aux autres châteaux du monde ouvert. Le combat est toujours la seule issue, rendant le système de choix dans les dialogues totalement superflu. Vous risquez de tomber de haut si vous sortez de Kingdom Come Deliverance 2.
Des missions sans inspiration
Il ne faut pas vous attendre à ce que les moments les plus importants de ces missions soient aussi bien mis en scène que les séquences du prologue : Ubisoft se contente de cut-scenes plus classiques (celles où l’on peut passer les dialogues un par un) qui arborent le fameux champ/contrechamp qu’on ne voit que trop souvent. Il n’y a qu’une dizaine de cinématiques majeures tout au long de l’aventure et la majeure partie est condensée au début de l’aventure et à la fin des actes 1 et 3.
Finalement, les moments marquants se comptent sur les doigts d’une seule main. Le scénario nous capte uniquement quand il remet les enjeux personnels de Naoe et Yasuke au centre de l’intrigue, mais ces passages se font malheureusement bien trop rares. Même la conclusion de l’histoire principale intervenant après un peu moins de 30 heures est mal amenée à cause de sa construction pour le moins étrange.

Au-delà du Shinbakufu, il y a plusieurs organisations à décimer pour récupérer des récompenses. Pour ses missions principales comme secondaires, Assassin’s Creed Shadows tente bien de faire un pas de plus vers une meilleure immersion en ne nous indiquant pas exactement où nous rendre via un marqueur d’objectif.
Vous disposez de quelques indications assez vagues sur la province et la sous-région dans laquelle vous devez aller. Il faut ensuite utiliser un éclaireur pour déterminer l’emplacement exact. Le tout se fait directement sur la carte : il suffit de se placer dans la zone choisie et de lancer l’envoi de l’éclaireur pour faire apparaître le marqueur d’objectif.
Ce système faussement immersif fait partie des éléments nous laissant penser qu’Ubisoft a bien essayé de se diriger vers une formule moins dirigiste, sans complétement oser se détacher de ses codes éprouvés dans tous ses open world.
Un Japon féodal envoûtant
S’il y a bien un point sur lequel Assassin’s Creed Shadows tient ses promesses, c’est sur sa direction artistique. Le Japon féodal d’Ubisoft Québec est visuellement agréable. L’ambiance se révèle happante aussi bien dans les petites bourgades que dans les lieux plus majestueux comme les temples ou les immenses châteaux à l’architecture crédible et détaillée.

Ubisoft se sert aussi du mouvement de la végétation pour rendre son environnement plus vivant, comme un certain Ghost of Tsushima. Le monde ouvert d’Assassin’s Creed Shadows ne nous émerveille pas autant que celui du titre de Sucker Punch, mais il s’agit d’une réussite. La bande-son de qualité contribue aussi à cette ambiance assez prenante, bien qu’aucun morceau ne marque réellement les esprits et certainement pas le rock japonais intervenant étonnemment à des moments clés.
L’infiltration trop classique malgré quelques ajouts
Les deux personnages jouables d’Assassin’s Creed Shadows possèdent des qualités bien distinctes. En tant que shinobi, Naoe est maîtresse dans l’art de se faire discrète. Elle se montre bien plus mobile et rapide que Yasuke. La jeune femme peut utiliser son grappin pour se hisser facilement dans les hauteurs et se servir de ses outils (kunai, fumigène, shuriken et clochette) pour distraire les ennemis ou les attaquer silencieusement. Il est toujours possible d’assassiner les adversaires avec la lame secrète et même de les saisir pour les assommer un peu plus loin.

Il est presque impossible de se faire discret avec Yasuke en raison de son envergure et du bruit qu’il produit. Cependant, vous n’aurez aucun mal à éliminer plusieurs ennemis consécutivement grâce à sa puissance de frappe et sa résistance. Notez que les deux personnages partagent quelques nouvelles capacités introduites par Shadows, comme celle de s’allonger, d’éteindre les lumières pour se cacher dans l’ombre ou de passer dans des trappes situées sur les toits.
Même lorsque deux gardes se trouvent côte à côte et que vous sifflez, il n’y a bien qu’un seul d’entre eux qui approche de votre position, tandis que l’autre vaque à ses occupations comme si de rien n’était. La vision d’aigle, qui permet de voir tous les ennemis à travers les murs comme dans Assassin’s Creed Mirage, n’aide pas à renforcer la tension ou l’immersion durant les phases d’infiltration.
Un système de combat qui fait dans la continuité
En combat, on retrouve la parade, l’esquive ainsi que les attaques classiques et les attaques chargées (appelées attaques de posture). La jauge d’adrénaline au-dessus des PV de votre personnage vous permet de lancer des aptitudes aux effets divers et variés.
Dévier les attaques ennemies affichées en bleues ou esquiver les assauts imparables apparaissant en rouge vous permet de créer une ouverture dans la garde adverse. C’est alors à vous de voir si vous préférez asséner un combo ou une attaque de posture, sachant que la finalité est là même.

Là encore, ne vous attendez à rien de révolutionnaire : le gameplay est plus que basique, tout comme le pattern des ennemis, qui reste le même du début à la fin de l’aventure. Il y a bien quelques boss au pattern unique, mais pas de quoi vous obliger à déployer votre matière grise.
Notez que des soucis de collision viennent régulièrement perturber les affrontements. Il arrive qu’un petit élement de décor vous bloque et empêcher votre aptitude d’atteindre votre adversaire. Votre personnage peut même monter sur des objets à proximité contre volonté. Pire, si vous utilisez la touche d’esquive près d’un rebord, attendez-vous à ce que Naoe et Yasuke s’accrochent à celui-ci plutôt que d’effectuer un simple pas de côté. Ces problèmes viennent trop régulièrement nous faire pester et peuvent même causer notre perte en difficulté élevée.
Vous pouvez toujours récupérer des armes et des équipements en complétant des missions, chez les marchands ou dans les coffres placés çà et là, notamment dans les camps ennemis. D’ailleurs, tous ces objets disposent de leur design propre. Ils bénéficient d’un très grand soin, Ubisoft ayant fait preuve d’un réel souci du détail. Vous pouvez même personnaliser les armes élément par élément. Bonne nouvelle, le loot est moins abondant que dans les derniers jeux de la licence et on apprécie donc davantage nos trouvailles.

Oui, les mécaniques RPG sont encore là
Yasuke et Naoe possèdent un arbre de compétences pour chacune des armes qu’ils peuvent manier. Pour accéder aux aptitudes les plus avancées, vous allez devoir parcourir le contenu annexe du monde ouvert afin d’acquérir des points de connaissance.
Après une vingtaine d’heures, avec la bonne synergie entre vos aptitudes et les capacités de votre équipement, vous pouvez presque devenir invincible. Votre humble serviteur a notamment trouvé assez facilement le moyen d’enchaîner une aptitude puissante quasiment sans le moindre temps de rechargement. Autant dire que le challenge en prend un coup, même en mode difficile.
Au moins, on prend un peu de plaisir une fois les aptitudes les plus efficaces et les plus classes débloquées, mais pas de quoi nous faire réellement vibrer manette en main. Rise of the Ronin, malgré ses défauts son Japon fantasmé, avait le mérite d’offrir un système de combat plus profond et amusant.

La présence de deux personnages renouvelle un tant soit peu l’expérience, surtout que le jeu nous laisse passer de l’un à l’autre quasiment sans restriction. Notez tout de même que l’exploration du monde ouvert se prête beaucoup plus aux capacités de Naoe sachant que Yasuke est plus lent et presque incapable de grimper où que ce soit.
Un contenu secondaire terne
D’autre part, Assassin’s Creed Shadows introduit une composante de gestion avec le repaire. Vous devez tout simplement trouver des ressources dans le monde ouvert pour construire différents bâtiments dans votre base, comme une forge ou un dojo. Ce dernier vous sert à améliorer les capacités des alliés recrutés pour qu’ils vous aident au combat.
Un système assez dispensable sachant que les combats se gèrent très bien sans eux. D’ailleurs, le repaire est le seul endroit dans lequel le jeu souffre de problèmes de framerate. Sinon, les modes Qualité, Performance et Équilibré à 40 fps tiennent très bien leurs promesses.

Les contrats à réaliser pour obtenir des ressources pour le craft et l’amélioration du repaire ne sont pas plus originaux (voler un objet dans un camp ennemi, y détruire des ressources…). Le monde ouvert d’Assassin’s Creed Shadows manque clairement de folie et de surprises à même de nous donner envie de l’explorer de fond en comble. Plus l’aventure avance, plus on cherche à filer rapidement vers sa conclusion…
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