Et la première d’entre elles est : qui pirate le jeu ? Les usual suspects habituels en réalité. Tiny Build a réuni les données des jeux piratés et s’est rendu compte que la plupart des versions piratées étaient installées au Brésil (42,8 %), en Russie (18 %) et en Chine (15,3 %).
Mais ce qui est vraiment intéressant dans ces chiffres, c’est la manière dont le nombre de piratages évolue avec le temps. Tiny Build a créé un graphique où l’on peut voir que le nombre de copies illégales installées explose à partir du moment où le jeu a été localisé en portugais. Comme vous pouvez le voir, le nombre de copies piratées explose au Brésil, alors que les Chinois et les Russes ne semblent pas affectés par les localisations et piratent le jeu en anglais.
En comparaison des Brésiliens qui ont piraté le jeu en masse, les Européens sont plutôt bons élèves et représentent les publics avec la plus grande part de jeux achetés par rapport aux copies piratées. L’Allemagne voit ainsi un taux de 46 % de copies légales sur son territoire et la France 18,8 %. Les US sont également de bons acheteurs avec 26,2 % d’installations légales. Malheureusement, l’éditeur rappelle que cela n’est pas très significatif en termes de volume, tant le jeu a été piraté.
Tiny Build se désole d’avoir à présenter de tels chiffres. Cependant, il ne finit pas sur une note trop amère et sous-entend qu’il reste contre le fait de mettre des DRM sur ses jeux. Il reconnaît toutefois l’énorme impact que cela peut avoir sur les ventes d’un titre, mais réfléchit à des moyens alternatifs de lutter contre. Par exemple, en proposant l’achat cross-plateform pour mieux convertir les pirates en acheteurs. Une vraie réflexion sur la localisation est également à avoir. Tiny Build recommande ainsi aux autres développeurs de localiser pour l’Europe occidentale (en allemand et en français, notamment), car le taux de piratage y est plus bas.
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« Même avec les prix régionalisés des jeux (souvent une réduction de 45 %), je trouve que rien qui est au-dessus de 15 dollars n’est attractif (comparé au coût de la vie local). Je me sens coupable de dépenser plus d’argent que ça pour un jeu. »
Un développeur brésilien explique de son côté que lui et ses confrères sont particulièrement conscients du problème, « au point de viser des marchés extérieurs pour leurs propres projets actuels ». En revanche, il pense aussi qu’il ne faut pas voir l’aspect du piratage purement du point de vue du manque à gagner.
« Ça vaut le coup de rappeler (et ça, les chiffres ne le suggèrent pas) que les gens qui ont piraté le jeu sont bien moins susceptibles d’acheter le jeu dans tous les cas, même s’ils ne pouvaient pas le pirater. »
Ce développeur rappelle d’ailleurs à juste titre que la capacité du jeu à tourner sur de petites configurations a également pu avoir un effet important sur ces chiffres de piratage.
Enfin, d’autres commentateurs signalent que malgré les chiffres impressionnants du piratage au Brésil, la localisation reste pertinente dans la mesure où le pays reste le second marché du jeu en termes de ventes. Par exemple, au moment du lancement de la localisation portugaise du jeu, le Brésil représentait le deuxième marché d’achat du jeu spécifiquement sur ce jour-là avec 373 ventes sur 1 500 mondiales.
La localisation des jeux qui se font énormément pirater est un vrai sacerdoce. Les traductions peuvent coûter cher et le fait de voir que cela fait exploser le piratage est un coup dur porté au moral des développeurs et éditeurs modestes qui investissent du temps et de l’argent dans leurs projets. Cependant, aussi énervant que le piratage puisse être, il faut apprendre à mettre en perspective ces chiffres. Évidemment, les créateurs de jeux verront avant tout les copies qu’ils auraient pu vendre au détriment de celles qui, si elles n’avaient pas été piratées, n’auraient pas été achetées pour autant. Il s’agit d’une vraie problématique qui pose la question des prix pratiqués dans les marchés émergents du jeu vidéo. Car si dépenser 15 dollars pour un Américain ou Français n’est pas « grand-chose » ce n’est pas la même chose pour un Brésilien ou un Indonésien. Faut-il baisser encore plus les prix dans ces régions ? Peut-être bien.
Tiny Build a ainsi raison de continuer à se refuser au DRM et de s’interroger sur les manières alternatives qu’il pourrait trouver pour inciter davantage les joueurs à passer du piratage à l’achat. En tout cas, plutôt que de regarder le taux de piratage certes impressionnant du Brésil, il serait intéressant de se pencher sur le volume de ventes au sein de ce marché. On saurait alors si la localisation en portugais était une bonne idée, ou un simple catalyseur du piratage.
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