On a souvent l’impression de vivre à une époque où les films originaux se font rares, et que les gros studios ne se contentent que d’inventer des suites à des franchises lucratives. Un constat bien souvent réel en ce qui concerne les films d’action ou de super-héros. De plus, chaque année est marquée par la sortie de remakes en tout genre, qui se hissent rarement au niveau de l’œuvre originale.
Les remakes se comptent par milliers dans le cinéma. Souvent considérés comme un moyen de minimiser la prise de risque, une bonne majorité d’entre eux ne prennent même pas la peine de comprendre et s’appuyer sur leurs modèles. Fog, Total Recall, Freddy, Robocop, Carrie, Oldboy… Autant de récentes tentatives qui n’ont jamais réussi à faire hommage à leurs films respectifs.
Cependant, il arrive également que l’exercice soit une franche réussite. Certains permettent notamment de redorer l’image d’un long-métrage très ancien, voire présentent une vision différente (ou alternative) de ce dernier. L’avancée des technologies liées à l’image, telles que l’apparition du son et de la couleur ou des effets spéciaux numériques, a également encouragé le processus.
Découvrez ici une liste (évidemment) non exhaustive de remakes ayant dépassé le niveau de leurs prédécesseurs.
[nextpage title=”Quand l’élève…”]
Scarface – (1932/1983)
Scarface fait partie des premiers succès d’une longue liste de chef-d’œuvre signé Howard Hawks. Sortie en 1932, il retrace l’épopée du crime de Tony Camonte, petit malfrat opérant à Chicago lors de la prohibition. Après avoir abattu son propre patron, il devient le garde du corps de son rival, Lovo, et tombe amoureux de sa femme Poppy. Trop protecteur avec sa sœur Cesca, il lui interdit tout rapprochement sentimental.
Pour lui et son compagnon Guido, une montée en puissance s’amorce au sien du gang. Véritable classique du film de gangsters, ce film vieux de 86 ans a conservé une vraie fraîcheur, notamment grâce à la prestation hallucinée de Paul Muni. Les scènes d’action détonnent encore aujourd’hui, ce qui souligne la maîtrise et la rigueur techniques de Hawks.
Cinquante ans plus tard, Brian de Palma se lance dans un remake et immortalise le titre du film auprès du très grand public. Camonte s’appelle désormais Montana, la cocaïne a remplacé l’alcool, le soleil de Floride a chassé la brume de Chicago, mais le canevas narratif est sensiblement le même.
Les mimiques et la nervosité du jeune Al Pacino s’apprêtent à marquer plusieurs générations de spectateur, tout en dessinant le nouveau visage du truand moderne. Le réalisateur y tisse aussi une réflexion sur la face sombre du rêve américain, où le crime ne paie pas toujours.
Infernal Affairs/Les Infiltrés – (2002/2006)
Meilleur Polar de l’année 2002, Infernal Affairs rappelle aux cinéphiles que les Hongkongais savent vraiment y faire. C’est d’ailleurs pour cela que certains le préfèrent encore à son fantastique remake. Placé là par le patron des triades, Ming travaille comme une taupe dans la police de Hong Kong. De son côté, Yan fait la même chose chez les truands. Fatigués par leur double vie, ils aimeraient tous deux décrocher. Mais quand ils sont tous les deux démasqués, un jeu dangereux se met en place.
Porté par un Andy Lau et Tony Leung au meilleur de leur forme, le polar ne laisse pas le spectateur respirer une minute. En tissant finement le portrait de deux hommes piégés par leurs missions, il met en place un scénario simpliste, mais ouvert à de nombreuses ramifications. En résulte un film noir qui envoie valser Volte/Face et consorts et donne une belle leçon de cinéma aux USA.
Mais le succès du film n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd, loin de là. Enthousiasmé par le long-métrage, Martin Scorsese y voit un moyen de déployer tout son amour pour les films de gangsters. Et il ne fait pas les choses à moitié. Doté d’un casting fabuleux, composé de Leonardo DiCaprio, Jack Nicholson (immense), Matt Damon et Mark Wahlberg, Les Infiltrés reprend la dualité presque géométrique de l’œuvre originale, et l’applique au milieu de la pègre de Boston.
Il y ajoute une mise en scène pleine de panache tout en conservant le rythme fou du scénario. Perfectionniste, il peaufine l’aspect tragique de son histoire pour lui donner encore plus de profondeur. Les acteurs, qui représente la crème d’hier et d’aujourd’hui, font le reste.
Le Salaire de la Peur/Sorcerer – (1953/1977)
Henri-Georges Clouzot est considéré comme un des plus grands réalisateurs français. Avec Le Salaire de la peur, sorti juste avant Les Diaboliques (son chef-d’œuvre ?), il démontre sa maitrise de la mise en scène et de la narration. Les critiques ne se sont pas trompés puisqu’il remportera la palme d’or et l’ours d’or de l’année 1953. Basé sur le roman éponyme de Georges Arnaud, le long-métrage raconte l’histoire d’un groupe d’Européens déracinés et fauchés qui va devoir travailler ensemble pour transporter 400 kilos de nitroglycérine (très volatile) dans un camion.
Plongé au cœur de la foret guatémaltèque, ce groupe ou règne la méfiance va devoir se serrer les coudes pour survivre à ce très dangereux voyage. Le quatuor d’acteurs, notamment composé de Charles Vanel et Yves Montand porte le film de bout en bout. Le suspense est intact, et la réflexion sur le comportement humain toujours d’actualité.
Il semblait donc très difficile de faire mieux. Pourtant, Wiliam Friedkin, fort des succès monumentaux de French Connection et L’Exorciste, va s’y attaquer plus de vingt ans après, en 1977. Le film sera un terrible échec commercial (Star Wars fait un triomphe), mais sera par la suite considéré comme une relecture visionnaire de l’œuvre de Clouzot, qui a tout de même 65 ans. Les nationalités sont encore plus diverses, mais l’objectif est le même : survivre.
Le réalisateur insuffle un mysticisme supplémentaire, largement porté par la superbe bande-son de Tangerine Dream. On peut aussi y percevoir une réflexion sur le bourbier américain au Vietnam, devenu le cauchemar de groupes d’hommes qui ne se connaissait pas auparavant. Mais on retient surtout la tension hallucinante qui habite l’ensemble du récit. Agrippez-vous à votre siège !
La Mouche Noire/La Mouche – (1958/1986)
Inspiré d’une nouvelle de George Langelaan (La Mouche), le film est réalisé par Kurt Neumann (Tarzan et les Amazones). L’histoire est celle d’un scientifique, André Delambre, qui après un terrible accident causé par des expérimentations faites sur le principe de la téléportation, se retrouve métamorphosé. À cause d’une mouche qui est entrée avec lui dans l’une de ses machines, l’homme se retrouve muni de la tête de cette dernière. Alors que son visage humain se retrouve quant à lui sur le corps de l’insecte.
Malgré son climax cauchemardesque où la mouche à tête humaine se retrouve prise dans une toile d’araignée en hurlant “Au secours”, difficile de dire que cette première version soit particulièrement célèbre. Hormis chez les cinéphiles, c’est son faux remake mis en scène par David Cronenberg qui est le film le plus connu de la saga.
Du film de 1958, le réalisateur David Cronenberg (Frissons, Le Festin Nu, A History of Violence) n’en reprend presque rien. Comme pour mieux se réapproprier l’oeuvre d’origine, il fait de son récit de science-fiction une grande histoire d’amour tragique aux effets spéciaux organiques (transformation immonde et magistrale de Jeff Goldblum). Inoubliable.
[nextpage title=”… Dépasse le maître ?”]
La chose d’un autre monde/The Thing (1951/1982)
Réalisée par Howard Hawks et Christian Nyby, La chose d’un autre monde suit l’histoire d’un petit groupe de scientifiques qui découvrent un vaisseau spatial prisonnier à l’intérieur de la banquise arctique. Après avoir réussi à en extraire un corps extraterrestre pris dans la glace, ils ramènent le spécimen à leur base.
Mais la situation va évidemment mal tourner lorsque la “chose” va se libérer et menacer ainsi la vie de tous les hommes présents. Une première version de haut niveau grâce à sa réalisation précise et son méchant insaisissable.
https://www.youtube.com/watch?v=4pvaAwyCxng
Chef d’oeuvre de John Carpenter avec New York 1997 et Halloween, The Thing passe inaperçu à sa sortie à cause d’un certain E.T de Steven Spielberg. Quelques années plus tard, le film devient culte. Il est aujourd’hui considéré comme l’une des œuvres majeures de la science-fiction.
La réussite du film réside d’abord dans le talent de conteur de Carpenter. Le cinéaste utilise ici une science du montage implacable alliée à des cadrages directement hérités du cinéma de… Howard Hawks ! La qualité des effets spéciaux saisissants de Rob Bottin permet également de magnifier les séquences gores du film. Peut-être la meilleure oeuvre d’horreur et de SF avec le Alien de Ridley Scott.
La Totale !/True Lies- (1991/1994)
Thierry Lhermite, Miou-Miou, Eddy Mitchell et Michel Boujenah figurent au casting de cette comédie d’espionnage à la française. Potache, le film suit le quotidien de François Voisin, un agent secret que son entourage pense être un cadre aux télécoms. Mais l’homme d’action ne se rend pas forcément compte que sa femme s’ennuie.
Il va alors découvrir que cette dernière fréquente un autre homme que lui. Le récit va alors se transformer en romance d’espionnage, où adultère et agents secrets font bon ménage. Éminemment sympathique, à défaut d’être brillant.
Insolite, mais vrai, James Cameron a réalisé un remake de film français. Après avoir mis en scène Abyss et Terminator 2 et avant Titanic et Avatar, le géant du cinéma américain a effectivement travaillé sur cette relecture de La Totale ! Forcément plus ambitieux que le métrage de Zidi, True Lies ressemble à une sorte de James Bond sous amphétamines.
Même s’il s’agit de l’oeuvre la plus mineure du cinéaste (Piranha 2 est hors concours), elle reste un sacré roller coaster dominée par la séquence culte de strip-tease de Jamie Lee Curtis. Chaud et iconique.
King Kong (1933/2005)
Film phare du cinéma de l’imaginaire, le King Kong de Merian Caldwell Cooper et Ernest Beaumont Schoedsack est l’un de ces films capables de dépasser le simple cadre du cinéma. Mythe à part entière, le film narre l’histoire d’une île mystérieuse où vit un gigantesque singe.
Capturée par les hommes, la créature se verra exposée puis exécutée à New York dans la séquence vertigineuse de l’Empire State Building. Une tragédie aussi poétique que spectaculaire.
Après avoir signé la trilogie du Seigneur des Anneaux, Peter Jackson enchaîne sur l’un de ses plus grands fantasmes. Celui de signer une nouvelle version de King Kong. Avec une compréhension totale du mythe d’origine (celui de la nature humaine symbolisée par Kong) et une virtuosité de mise en scène n’ayant que peu d’égale aujourd’hui, Jackson réalise une fresque épique. Un superbe hommage autant qu’une réinterprétation intime du classique de Cooper et Schoedsack.
https://www.youtube.com/watch?v=o0D1bIh7xgo
La Colline a des yeux (1977/2006)
Après avoir réalisé 5 ans plus tôt le sauvage et polémique La Dernière Maison sur la gauche, le défunt Wes Craven crée en 1977 avec La Colline a des yeux un survival dans la lignée du Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hooper.
Le film est principalement connu pour sa séquence d’attaque dans une caravane où des cannibales fous s’en prennent à une famille américaine tombée en panne dans le désert du Nevada. Bien que le film a aujourd’hui vieilli, son horreur réaliste et “sale” reste une référence dans le domaine du cinéma d’épouvante.
Produit par Wes Craven, le remake de La Colline a des yeux possède pour particularité d’avoir été réalisé par le français Alexandre Aja (Haute Tension). Le cinéaste reprend dans un premier temps les 40 premières minutes du film originel, avant de radicalement bifurquer vers une vision plus personnelle.
Très violente, cette nouvelle version se transforme peu à peu en revenge movie mâtiné de western. Quelques séquences, notamment ce règlement de compte final au fusil à pompe, se caractérisent ainsi par une rage graphique peu ordinaire au sein du cinéma US. L’un des meilleurs remakes de film d’horreur des années 2000/2010 avec Evil Dead.
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C’est un poisson d’avril les infiltrés meilleur qu’infernal affairs ? ? ?
et comparer King Kong de 1933 et 2005….😅
Mouarf le Scarface de Hawks n’a pas vieilli alors que les pattes d’eph de l’opus de De Palma : au secours !!!
Totalement d’accord avec les deux commentaires du dessus!
Pareil Sorcerer et Le salaire de la Peur sont tres different.
Sorcerer a un cote plus polar, quand le Salaire de la peur n’est axé que dans le camion, psychologiquement beaucoup plus investi. C’est un tres grand film.
Sorcerer est tres bon en soit, mais de la a parler de remake depassant l’original…