Un ciel mitigé, une température qui oscille entre 13 °C et 19 °C et toute une gamme de véhicules Alfa Romeo inaugurant une finition nommée Intensa, qui intègre tous les équipements disponibles. Une philosophie empruntée aux modèles coréens et japonais. Point d’option, tout de série.
J’ai fait l’impasse sur les Stelvio, Tonale et la fameuse Giulia (déjà essayée plusieurs fois et pour laquelle j’ai une profonde affection); pour ne m’occuper que de la version électrique du nouveau petit SUV urbain de segment B : le Junior. Ce petit SUV est censé relancer le constructeur italien connu pour jouer sur l’émotion. Mais peut-on procurer de l’émotion avec un SUV électrique reposant sur une base de 2008 ?
Le résultat est, avouons-le, assez décevant. Si la version Veloce 280 réussit à esquisser des sourires, ce n’est pas le cas de la version Intensa, aussi triste sur la route qu’à l’intérieur. Dommage, car cela faisait depuis la Mito que le paysage automobile n’avait pas vu de petite Alfa.

L’Alfa Romeo Junior n’est pas un Peugeot 2008 rebadgé ?
Alfa est sous la tutelle du groupe Stellantis depuis 2021. La philosophie des groupes est de jouer à fond la carte des économies d’échelle. Comprenez qu’une même plateforme doit être rentabilisée au maximum, en étant exploitée par différentes marques. Ici, il s’agit de l’e-CMP, une plate-forme multi-énergies qui permet de développer à la fois des voitures électriques et des voitures hybrides. Le berceau moteur et le plancher ont été adaptés pour accueillir la batterie et les pieds des passagers arrière (qui n’auront bien que ça pour eux).
Elle est utilisée sur les véhicules de segment B et B-SUV comme l’e-2008 de Peugeot et sur ce Junior d’Alfa Romeo. Les comparaisons s’arrêtent là : les intérieurs et styles extérieurs sont très différents.
Deux Alfa Romeo Junior, deux ambiances
Nos deux modèles à l’essai embarquent la même batterie de chimie NMC, d’une capacité nette de 51 kWh. Le Junior en finition Intensa est équipé d’un moteur électrique asynchrone à aimant permanent de 156 ch (ou 115 kW). Le Junior Veloce 280 est doté d’un moteur de 280 ch (ou 206 kW). Les deux sont des tractions. Le premier boucle le 0 à 100 km/h en 9 secondes, contre 6 secondes pour le second, mais vous verrez que les différences vont bien plus loin.
Côté équipement, la finition Intensa, présentée lors de l’évènement, embarque le catalogue des équipements, de série : de l’alcantarat, la clim auto, la conduite autonome de niveau 2, des sièges chauffants électriques, la climatisation automatique, Android Auto et Car Play, une caméra de recul avec simulation d’un décor à 360°.
Le Veloce 280 essayé arbore une calandre et des boucliers différents, des pneus Michelin Pilote Sport 4, des trains roulants totalement revues, des sièges baquets Sabelt (en option) et une puissance aux roues avant supérieure. Car point de propulsion ici.
Une gamme onéreuse
L’Alfa Romeo Junior existe en motorisation hybride et en motorisations électriques. Ce sont ces dernières qui nous intéressent ici. Nommé « Elettrica », cette gamme repose sur 4 finitions :
- Intensa (à partir 44 500 euros)
- Elettrica (à partir de 37 700 euros)
- Elettrica Speciale (à partir de 40 500 euros)
- Elettrica 280 Veloce (à partir de 46 900 euros)
Les tarifs sont 10 000 euros plus élevés que les équivalents du Junior hybrides. Le seuil de rentabilité est compliqué. De plus, le choix de véhicules électriques est vaste dès qu’on met 45 k€ sur la table.

Un extérieur en demi-teinte mais charismatique
Alfa Romeo est un constructeur qui a toujours suscité une passion auprès de ses fans en se démarquant tant au niveau du comportement routier que par les lignes de ses voitures.
Le Junior tente d’apporter une touche de charisme avec un extérieur agressif. Si l’avant s’en sort plutôt bien (bien que les feux me rappellent ceux de Renault), l’arrière est assez étrange. Visiblement inspiré de la 8C Competizione, le Junior traîne un bandeau noir qui n’est pas des plus réussi et le profil manque un peu de panache. Surtout que le reste de la gamme s’en sort plutôt bien, notamment le Tonale (de l’ère Stellantis) qui tient la comparaison face au Stelvio et à la sublime Giulia. Cet arrière a tout de même un avantage : il permet une découpe presque à angle droit au niveau du hayon, ce qui permet de glisser dans le coffre des valises à la verticale sans empêcher celui-ci de se fermer (le design, le style, la fonction, tout ça).
Le montant C qui dissimule la poignée de porte annonce de facto que la luminosité à l’arrière sera réduite, comme sur un Toyota CHR.

L’énorme calandre en V propre à Alfa diffère selon la finition. Vous aurez soit le nom Alfa Romeo, soit le logo. Le tout en noir ou couleur carrosserie.
Un intérieur décevant
L’intérieur n’est vraiment pas à la hauteur des attentes. L’assemblage n’est pas mauvais, mais les matériaux ne sont pas hyper agréables au toucher. Le résultat est triste, sombre et manque de cohérence entre les éléments. Notamment la planche de bord qui n’a pas de lien avec le style extérieur. Et ce ne sont pas les multiples logo Alfa Romeo disséminés partout qui vont changer la donne. C’est triste, ça manque de couleur et le seul artifice revient au logo lumineux Alfa Romeo des grilles de ventilation.
Tout est sombre et le manque de lumière est pesant, surtout à l’arrière. Les enfants et passagers devront faire avec des fenêtres réduites au minimum et une ceinture de caisse très haute.
Ce n’est pas tout. L’écran orienté vers le conducteur est positionné trop bas. L’espace à l’arrière est minuscule. Le plancher reste haut et oblige à garder les jambes relevées.

Le coffre n’est pas mauvais pour la catégorie (avec la possibilité de ranger les câbles en dessous). Notez qu’il n’y a pas de modularité possible, comme avancer la banquette pour gratter quelques cm3 de volume.
Des équipements complets
Notre version Intensa offre un équipement pléthorique : des feux Matrix LED, une caméra à 360° (malheureusement pas super lisible), des sièges chauffants électriques, un planificateur d’itinéraire, le hayon électrique, un affichage tête haute. Seul la couleur rouge est en option à 1200 euros. Mais certainement négociable en concession.

Un système multimédia perfectible
Le Junior dispose de série d’un planificateur d’itinéraire. Le GPS natif prend en charge l’état de la batterie, sa température et vous propose des bornes de recharges lors de votre trajet. Un bon point. Dommage qu’il repose sur Here Maps (comme presque tous les constructeurs) et que le résultat soit perfectible sur la navigation, l’ergonomie générale et la fluidité.

Autre point pratique, la présence d’Android Auto et Apple Car Play. Malheureusement, le Honor Magic Pro 6 de mon binôme a peiné à se connecter, jusqu’à avoir le bon fil. Car Play n’a, en revanche, pas posé de souci et la connexion s’est faite sans fil. Quant à moi, je me suis retrouvé limité par ma zone géographique, façon Netflix lorsqu’on souhaite accéder au catalogue d’un autre pays. J’étais à 2 doigts d’utiliser un VPN.


L’interface multimédia est proche de ce que propose Stellantis. Il nécessite un peu de temps pour être maitrisé, mais permet une personnalisation à base de widgets. Niveau design, c’est basique et mal pensé. Les icônes sont minuscules dans des carrés énormes. La navigation n’est pas totalement fluide et le Mirror Screen est une relique impensable sur un véhicule de 2025.

Un comportement pataud
Alfa Romeo a joué la carte du confort. Un choix surprenant pour une marque à vocation sportive. Si la transmission des 152 ch sur le train avant est bien gérée, malgré un temps capricieux et une route grasse, les suspensions sont, elles, beaucoup trop souples.

Le roulis est très présent et chaque giratoire ou virage fera valser vos occupants. La voiture plonge également à chaque freinage et se cambre à chaque accélération. C’est clairement mou, très mou, mais, de fait, confortable sur les routes dégradées.

Côté puissance, la relance est bonne, même sur un 80-120 km/h. Les aides à la conduite sont efficaces et faciles d’utilisation.
Bon point, le bruit ambiant à 130 km/h a été mesuré à 66 dB, ce qui est très bon. Les bruits de roulement sont évidemment présents, mais rien de dramatique.
Un freinage particulier
Ce point mérite un petit paragraphe pour être compris. Le choix des ingénieurs d’Alfa Romeo a visiblement été d’adopter un comportement proche de celui des voitures thermiques. Ainsi, il n’y a pas de mode « One Pedal » qui permet de tout gérer avec la pédale d’accélérateur.
La raison vient d’un mode « Brake » très faible. Ce mode active le frein magnétique produit par le moteur électrique (qui est un aimant) dès que vous retirez le pied de l’accélérateur. L’énergie récupérée permet d’ailleurs de recharger la batterie. Souvent, l’intensité du mode Brake permet de ralentir le véhicule jusqu’à l’arrêt complet, ou presque. Ce n’est pas le cas ici. Mais ce n’est pas un défaut ni une erreur.

Dans les faits, ce n’est pas qu’il est faible de mode B. C’est qu’il mime le ressenti du frein moteur d’une voiture thermique. Nous en arrivons donc au freinage.
La pédale de frein a une course divisée en deux parties. La première partie va intensifier le freinage magnétique (et donc régénérer plus fortement la batterie). Enfoncez la pédale plus fort et vous activez les freins mécaniques. Ce n’est pas nouveau, puisqu’on retrouve ça chez Mercedes ou Toyota par exemple.
Sur l’Alfa Romeo Junior, c’est très bien fait, et la transition n’est presque pas perceptible. On s’y fait même plutôt rapidement, même en étant habitué au One Pedal de Tesla ou de Hyundai.
Une consommation qui semble correcte… sauf si vous allez “vite”
Difficile de juger sur si peu de temps, mais un tour dans l’ordinateur de bord a permis de constater un 15-16 kWh au 100 km de moyenne. Sur autoroute, ça grimpera, c’est sûr.
Notez que ce constat est également valable pour la version Veloce, sous réserve que vous ne fassiez pas les fous. Ce qui, avouons-le, est assez difficile.

La charge n’a pas été testée, donc nous resterons sur les 100 kW de puissance annoncés. Nous serons curieux de voir la courbe de recharge, car finalement, c’est bien elle qui importe. Dans tous les cas, la capacité de la batterie empêchera tout périple extra urbain de plus de 200 km.
Une version Veloce 280 ch brutale et fun
Il était là, entouré de deux Giulia, le petit Alfa Romeo Junior Veloce. Veloce pour qualifier les 280 ch transmis aux roues avant et son look r endu plus agressif.

Au volant, le Veloce n’a rien à voir avec la version classique. Les suspensions, trains roulants, pneus et la direction ont été revus. « Finito » le confort, l’Alfa Junior Veloce est raide comme la justice. Les pneus Michelin Pilote Sport 4 sont collés au bitume. Mais cela se paie au prix d’un confort totalement absent.

Le Veloce semble rabaissé de quelques centimètres. La direction est plus précise, plus directe, plus lourde. Le freinage est bien dosé, toujours avec ce système de frein magnétique puis mécanique. Sur une voiture un peu sportive, ce n’est pas gênant et le double système est imperceptible lors d’un freinage dégressif (vous appuyez à fond puis relâchez).
À l’intérieur, c’est toujours aussi triste et sombre. Pas de surpiqûre rouge pour venir dynamiser l’ambiance. Il y a tout de même de superbes sièges baquets Sabelt, qui vous maintiendront dans les virages. Mais ce sera tout. Seuls quelques insert d’Alcantara relève le ton. Pour une voiture avec une batterie de cette capacité et à un tel tarif, c’est un peu chiche.
À l’accélération, les 280 ch vous propulsent de 0 à 100 km/h en 6 secondes. C’est beaucoup de temps et pourtant ça envoie. Pourquoi ? Car les ingénieurs ont bridé la puissance allouée au démarrage pour éviter que le Junior patine. C’est judicieux. Ainsi, le coup de pied aux fesses se fait en 2 temps : de 0 à 30-40 km/h, puis à partir de 50 km/h.

D’ailleurs, le Veloce est stable, tient le pavé et sait se montrer joueur. Toutefois, il faudra calmer vos ardeurs, car les 51 kWh de la batterie fondent comme neige au soleil dès que vous souhaitez profiter de la puissance. La bonne nouvelle, c’est qu’en conduite posée, il ne se veut pas plus gourmand que la version 152 ch. C’est aussi ça la force des voitures électriques : pouvoir profiter d’un modèle sportif au quotidien sans avoir à en payer le prix lorsqu’on n’en exploite pas le potentiel (ce qui n’est pas le cas d’un V8 Biturbo, gourmand même en étant le pied léger).
Reste une note salée : avec le rouge Alfa, les sièges baquets et le pack techno (soit +5000 euros), la note grimpe à 53 100 euros !
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