Quelques explications pour commencer. Les téléphones émettent et réceptionnent des ondes radios dans le but d’établir une communication. Ces ondes électromagnétiques permettent ainsi la communication de toutes les informations entre le terminal mobile et l’antenne relais voisine. Le problème est qu’une partie de l’énergie qu’elles transportent est absorbée par le corps humain sous forme de chaleur. Plusieurs personnes considèrent que cette exposition aux ondes est dangereuse pour la santé de l’Homme. Au point que certaines entreprises proposent désormais des dispositifs anti-ondes.
Pourquoi se protéger des ondes de votre smartphone ? Pour éviter les risques accrus de tumeurs cérébrales, de fausse couche ou encore, des effets aigus sur le bien-être de vos enfants. C’est le genre d’argument que les fabricants de patchs anti-ondes donnent, en tout cas, lorsqu’il s’agit de nous convaincre qu’il est nécessaire de se protéger. Et pourtant, aucune étude scientifique n’a réussi à prouver, jusqu’à ce jour, que les ondes électromagnétiques étaient néfastes pour nous.
Le DAS
Tout d’abord, dans ces histoires d’ondes électromagnétiques, il faut savoir que ce n’est pas le far west, car il existe bien un cadre. Le DAS (débit d’absorption spécifique) est la mesure de référence pour quantifier cette absorption. Il mesure ainsi le niveau d’énergie véhiculée par les ondes radiofréquences reçues par l’usager d’un téléphone portable (ou un autre appareil radioélectrique) lorsqu’il fonctionne à pleine puissance et dans les pires conditions d’utilisation. Cet indice concerne toutes les ondes comprises entre 100 KHz et 10 GHz et il s’exprime en watt par kilogramme (W/kg).
Il existe trois types de DAS pour mesurer l’exposition due aux téléphones portables : le “DAS tête”, le “DAS tronc” et le “DAS membre”. Le premier concerne l’usage du téléphone à l’oreille, en conversation vocale. Le second se concentre sur les usages du téléphone lorsqu’il est porté près du tronc (poche de veste, sac). Enfin, le “DAS membre” se réfère à l’usage du téléphone plaqué contre un membre, donc lorsque qu’on le tient à la main ou qu’il est dans une poche de pantalon.
Au sein de l’Union européenne, c’est simple, il ne doit jamais dépasser les 2 W/kg pour la tête et le tronc et les 4 W/kg pour le membre.
L’Agence Nationale des Fréquences (ANFR)
En France, c’est l’Agence Nationale des Fréquences (ANFR) qui contrôle la valeur limite du DAS. Son objectif est de “veiller au respect des valeurs limites d’exposition du public aux ondes radioélectriques”. Elle s’assure ainsi que les équipements et terminaux mis sur le marché soient conformes à la réglementation européenne, donc qu’il n’y ait pas d’excès. L’ANFR a d’ailleurs déjà mis en demeure les sociétés comme Huawei, Modelabs Mobiles, TCL ou encore TP-Link parce que le DAS “tronc” de leurs téléphones dépassaient la limite réglementaire.
Prenons le Honor 8 par exemple, l’agence expliquait que “lorsque le téléphone est connecté sur certaines bandes de fréquences spécifiques, et utilisé sur la tranche inférieure du Produit, à 5 mm du corps, la version logicielle “B131” de l’Honor 8 pouvait, parfois, excéder de 0.110 W/kg, lors de son utilisation, la limite de Débit d’Absorption Spécifique de 2 W/kg”. Une mise à jour a donc été effectuée afin de rendre le DAS “tronc” conforme, qui est aujourd’hui de 1,45 W/kg. Les sociétés Modelabs Mobiles et TCL ont fait la même chose, respectivement pour l’Echo Star Plus et l’Alcatel PIXI 4-6. En revanche, TP-Link France qui se chargeait de l’importation du NEFFOS X1 TP902, a décidé de retirer le modèle de la commercialisation plutôt que de le mettre à jour. Les appareils déjà vendus ont, eux, été rappelés. Le DAS “tronc” du téléphone était de 2,52 W/kg.
Il faut cependant noter qu’ici, le dépassement de la limite réglementaire du DAS n’est pas synonyme de faute du côté des constructeurs car de nouvelles exigences ont été instaurées en 2016 afin d’évaluer l’indice au niveau du tronc. Avant ce changement, il était possible d’effectuer une mesure à une distance maximale de 25 mm de l’appareil, aujourd’hui, elle ne peut pas dépasser les 5 mm.
Les rapports de contrôle de l’ANFR
Par ailleurs, depuis le 1er juin 2017, l’ANFR publie semestriellement les mesures de “DAS” qu’elle réalise sur les appareils disponibles sur le marché français. Le but de l’agence est de “mieux informer le public de son activité de contrôle régulier de l’exposition aux ondes électromagnétiques”. La première publication comprenait ainsi les résultats des mesures effectuées entre 2012 et 2016 sur plus de 400 téléphones portables. Et leur DAS “tronc” ou “tête” se sont tous révélés conformes à la réglementation en vigueur. Il en a été de même avec les éditions d’octobre 2017 et de juin dernier qui contenaient respectivement, les mesures de 49 et 14 autres téléphones en plus. À noter que toutes les mesures de DAS sont disponibles sur le site data.anfr.fr.
Pour réaliser les mesures, l’ANFR fait souvent appel au laboratoire EMITECH, accrédité par le COFRAC (COmité FRançais d’ACcréditation) et spécialisé dans les tests en environnement applicables à des produits ou à leurs sous-ensembles. À noter que les laboratoires utilisent tous les mêmes procédures de tests, qui ont été définies par le Comité européen de normalisation électrotechnique (CENELEC). Le téléphone est ainsi collé à ce qu’on appelle un fantôme, mannequin imitant le plus fidèlement possible la structure et la densité du corps humain. Le téléphone émet ensuite des ondes à pleine puissance au niveau de la tête et du corps, afin de reproduire les usages les plus fréquents : téléphone porté à l’oreille en communication ou conservé dans la poche la plupart du temps. En plus du fantôme, le test comprend un système de positionnement du téléphone ainsi qu’un robot articulé qui permet de déplacer la sonde de mesure dans le mannequin. Sonde sans laquelle il n’est pas possible de déterminer le DAS.
Cependant, la valeur limite de DAS qui est indiquée après ces tests ne reflète pas vraiment la réalité étant donné que les téléphones fonctionnent très rarement à leur puissance maximale.
Les ondes électromagnétiques ont-elles un impact sur la santé ?
Si on s’intéresse tellement aux ondes, c’est parce que plusieurs effets sur la santé lui sont attribués : mal de tête, fatigue, épuisement du système nerveux, cancer, hypersensibilité, etc. En revanche, aucune étude scientifique ne prouve qu’elles agissent sur le comportement, l’audition, le développement du système reproducteur ou la survenue de cancer. L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) considère, elle, néanmoins, qu’il est possible qu’elles aient un effet sur le bien-être des enfants, ainsi que sur leurs fonctions cognitives (mémoire, fonctions exécutives, attention). Elle est arrivée à cette conclusion après avoir mené des travaux d’expertise. L’agence explique tout de même que ces effets sont susceptibles d’être liés à l’usage des téléphones portables et non aux radiofréquences qu’ils émettent.
Plusieurs études scientifiques ont été menées pour connaître les effets des ondes sur la santé (tumeur, hypersensibilité électromagnétique, activité électrique du cerveau, fonctions cognitives, sommeil, rythme cardiaque, pression artérielle), sans succès. Le Centre international de Recherche sur le Cancer (CIRC) de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a tout de même classé les ondes produites par les portables dans la catégorie des cancérogènes possibles, en 2011. Un an avant, L’étude INTERPHONE a été coordonnée par le CIRC pour déterminer l’existence de liens entre l’utilisation de portables et les cancers de tête et de cou chez l’adulte. L’analyse des données recueillies des 13 pays participants amène à conclure qu’on ne peut pas établir qu’il n’y a pas d’augmentation du risque de gliome ou de méningiome par rapport à l’utilisation du portable sur une période supérieure à 10 ans.
On parle également d’effets de l’exposition aux ondes à court terme. Le plus connu est l’échauffement des tissus, notamment celui de l’oreille. D’après l’OMS, la température du cerveau ou de tout autre organe du corps augmente avec la majeure partie de l’énergie absorbée par la peau et autres tissus superficiels.
Des questions demeurent concernant les ondes électromagnétiques car elles ne sont pas reconnues comme dangereuses, mais elles sont de plus en plus suspectées.
Les patchs anti-ondes sont-ils une précaution à prendre ?
Plusieurs entreprises (Fazup, Ginko Control, QuanThor etc.) ont conçu des patchs anti-ondes car elles sont persuadées qu’il y a un problème à régler. Ce sont des objets connectés qui ont pour but de nous protéger en limitant notre exposition aux ondes électromagnétiques. Ils se déclinent sous différentes formes et se collent au dos de votre smartphone. En général, ces patchs fonctionnent selon le principe de déphasage à 180°C. Autrement dit, 2 ondes opposées de même fréquence se neutralisent mutuellement. Le problème, c’est que l’efficacité de ces patchs n’est pas reconnue scientifiquement.
Alors ces patchs sont-ils la solution pour réduire l’exposition aux ondes ?
Le patch anti-ondes est-il recommandé ?
Les patchs anti-ondes ne sont pas tous les mêmes et ils n’ont évidemment pas la même efficacité. Olivier Merckel, chef de l’unité d’évaluation des risques liés aux nouvelles technologies à l’Anses, nous a expliqué qu’il existait deux sortes de patchs : “les bouts de papier” et ceux qui contiennent du métal. Les premiers étant des bouts de papier, “il ne peut y avoir d’effets sur les rayonnements émis par le téléphone“. Le problème avec les seconds, c’est que les antennes disséminées dans le téléphone, sont elles aussi composées de métal. Ainsi, le morceau de métal contenu dans le patch modifie les caractéristiques d’émission des téléphones (orientation des ondes, intensité du rayonnement etc.) “Si le rayonnement d’un téléphone est modifié par un patch métallique, les antennes relais peuvent percevoir, à tort, que le téléphone est plus éloigné, et donc forcer le téléphone à émettre plus fort“. Et, c’est pour cela que le niveau d’exposition aux ondes de l’utilisateur est susceptible d’augmenter lorsqu’un patch est posé sur le téléphone.
L’Anses l’a d’ailleurs démontré dans une étude portant sur l’efficacité des “dispositifs de protection contre les rayonnements électromagnétiques” en 2013. Cette étude révèle que les dispositifs ne disposent d’aucun effet probant sans une altération des performances du téléphone mobile. Altération qui, au final, est susceptible de provoquer l’inverse de la fonction du patch. De plus, suite à son analyse des 13 dispositifs et 3 téléphones mobiles GSM 900 et 1 800 MHz, l’agence a conclu que “les dispositifs anti-ondes placés sur la batterie ou sur le téléphone mobile ne montrent pas d’efficacité de protection significative; le niveau de DAS et les performances rayonnées varient peu (plus ou moins 12%), dans les limites des incertitudes des moyens de mesure utilisés (environ entre 20 et 30% pour la mesure de DAS)”.
Par ailleurs, les téléphones sont testés pour la mesure réglementaire de DAS, mais ils ne le sont pas avec des patchs. Au final, “il est possible que les patchs réduisent la quantité de rayonnements émis par le téléphone, mais ça reste encore une grosse interrogation en matière de réduction d’exposition” nous explique Olivier Merckel. Pour lui, la meilleure solution afin de limiter l’exposition de l’homme aux ondes, c’est le kit mains libres. Et, c’est d’ailleurs, une des recommandations de l’ANFR. Cette dernière recommande en plus :
- de limiter la durée des appels téléphoniques,
- privilégier l’usage des messages et les appels au sein des zones où la qualité de réception est bonne,
- limiter les conversations téléphoniques dans les transports en commun,
- Et, bien évidemment, choisir un téléphone avec un DAS faible
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