C’est à Saint-Ouen que j’ai pu prendre le volant du nouveau Model Y nommé Juniper, dans sa version Launch Edition. Je venais d’effectuer 1h30 au volant d’un Model Y Peformance de première génération. Véhicule qui sera repris à la fin de la journée. De quoi bien identifier les différences entre les deux générations. Et c’est justement ce que nous allons voir, tout au long de cette prise en main.








Préambule
En 2023, Tesla réalise un double record en devenant le premier constructeur à classer un VE en tête des ventes mondiales, toutes motorisations confondues. Il s’est ainsi écoulé 1,23 million de Tesla Model Y cette année-là.
Et c’est normal, car à ce moment-là, le marché est cruellement vide, avec des propositions onéreuses (20 à 30 k€ de plus à niveau équivalent), moins efficientes et bien souvent à la motricité discutable. Puis Tesla s’appuie sur son réseau de Superchargeurs alors imbattable.
Le Model Y, de son côté, offre un équipement de série riche et essentiel (pompe à chaleur, planificateur efficace, sièges chauffants), un frunk gigantesque à l’avant, un toit panoramique, une interface bien pensée et une certaine hype liée à un aspect geek et décalé.

Mais tout cela s’accompagne de choix parfois incongrus et même ridicules. L’absence de capteur de pluie, la conduite autonome de niveau 2 mauvaise et qui vous punit, le volant non capacitif, le rayon de braquage gigantesque, l’absence de caméra frontale, une finition discutable et une insonorisation qui pourrait être meilleure laissent une belle marge de progression et sont autant de points corrigeables sur une nouvelle version.
Entre-temps, les frasques d’Elon Musk font la une des médias et les autres constructeurs comprennent qu’il faut se calmer sur les prix aberrants. Résultat : en 2025, Tesla se paie une concurrence plus étoffée, plus affûtée, plus féroce et surfant sur le tapage médiatique subi par la marque américaine.
Mais polémique mise à part, ce Model Y Juniper est-il suffisamment armé face à ses adversaires ? Pas vraiment. S’il continue d’exploiter ce qui en faisait sa force, il se laisse encore dominer par certains démons qui, désormais, sont difficilement pardonnables.
L’équipement du Model Y Juniper Launch Edition de cet essai
Nous avons eu droit à un Model Y Juniper Launch Edition. Il s’agit d’un Model Y Grande Autonomie Dual Motor, doté de quelques artifices propres (une sorte d’Alcantara remplace le tissu, des inserts spécifiques sont disséminés un peu partout, la projection lumineuse d’un logo dédié sur le sol et l’option Boost de série qui réduit l’accélération de 5 secondes à 4 secondes).
Cette version n’est plus disponible à l’achat, mais ça ne change rien, car elle n’apportait pas de modification significative face à la version commercialisée désormais.
Le prix est actuellement de 46 990 euros pour une autonomie annoncée de 622 km WLTP, soit 500 km dans un usage courant. Un prix identique à l’ancienne version qui n’est désormais disponible qu’en modèles sur stock et avec une remise significative.
Un extérieur clivant
À l’extérieur, beaucoup de choses ont changé. À commencer par la face avant. Les phares type grenouille ont laissé place à un bandeau lumineux inspiré du Cybertruck. Un choix étrange dans la mesure où ceux du Model 3 amélioré s’inspire du Tesla Roadster, le véhicule annoncé il y a 10 ans.
Les rétroviseurs ont été redessinés pour gratter quelques micro points de CX. L’arrière est totalement inédit, avec, là encore, un bandeau lumineux, mais cette fois dissimulé et dont l’éclairage est projeté sur le hayon. Original et plutôt réussi.

Le bouclier arrière a été redessiné, le diffuseur remonté. D’une pour gratter un peu d’efficience en améliorant le Cx, et de deux pour protéger le seuil de chargement des coups maladroits lorsque vous mettez des choses lourdes dans votre coffre.
Un intérieur meilleur sur tous les plans
Le plus gros du travail a été porté sur l’amélioration de la vie à bord.
À commencer par les sièges. Ces derniers sont totalement nouveaux. Plus enveloppants, ils bénéficient d’une mousse plus dense, plus moelleuse. L’appui-tête est également mieux dessiné. Ceux de l’ancien Model Y étant plutôt mauvais, c’est un bon point. Ajoutez à cela une ventilation (bienvenue, avec cette matière de cuir synthétique) et vous avez enfin de bonnes assises. Ce n’est pas encore du niveau de BMW ou Mercedes non plus, mais ça reste très agréable. Le réglage des lombaires est toujours de la partie.


La sono, qui était déjà excellente sur le Model Y original, se voit dotée de 2 nouveaux HP (pour un total de 21 dont un sub). Le rendu est précis et le spectre très large. De quoi trouver votre bonheur auditif en jouant un peu avec l’égaliseur.
La console centrale a été redessinée. Elle est recouverte d’une sorte de texture qui la protège des rayures.
Notez que l’accoudoir est à la hauteur idéale pour garder le coude et l’avant-bras posés dessus lorsqu’on pianote sur l’écran tactile. Ça ne vaut pas les boutons, mais ça permet des gestes plus précis que lorsque le bras est en l’air.

Petit détail, certes, mais évolution tout de même : les logements de ceintures sont désormais dans le montant plutôt que le siège. Car sur les sièges blancs, cela faisait des traces. Puis c’était surtout moins pratique à attraper.
L’arrière a droit à un écran central tactile de 8 pouces, comme sur les autres versions. Le bluetooth multipoint permet d’isoler le son des passagers. Il est également possible d’écouter de la musique, de régler le chauffage des sièges et la climatisation. Pour les parents anti-écran, sachez que tout est contrôlable et verrouillable depuis l’avant.
Autre amélioration : les sièges sont désormais contrôlables électriquement, soit depuis l’écran arrière, soit depuis l’écran avant, ou encore directement via deux boutons dédiés dans le coffre. Il est possible d’ajuster l’inclinaison. L’habitacle reçoit un immense bandeau LED coloré. Il fait le tour de l’habitacle et termine sa course sur les portes arrière. La couleur est personnalisable. C’est visiblement une tendance désormais dans les véhicules. C’est désactivable si vous n’aimez pas ça.

L’évolution invisible mais réelle
Le communiqué de presse annonce des bruits de route réduits de 22%, des bruits d’impacts de 20% et des bruits d’air de 20%. Dans les faits, j’ai mesuré 67 dB à 135 km/h sur autoroute avec le Model Y Performance. Sur le Juniper, à cette vitesse, le niveau sonore était de 67 dB. Mais le communiqué ne ment pas pour autant. Le palier d’un décibel correspond à un bruit 10 fois supérieur et vice-versa. Donc Le gain n’est pas mesurable avec une Apple Watch. En revanche, la perception est bien réelle, surtout en environnement urbain, où là, l’écart est plus significatif, puisque dans ces conditions, la mesure de l’ancien Model Y était autour des 53 dB.

C’est bien, mais nous ne sommes pas au niveau de Peugeot non plus (plutôt excellent dans le domaine). Inutile de comparer à Mercedes ou BMW, ce n’est plus la même gamme de prix. Le toit panoramique a été obscurci d’après le communiqué. Malgré le soleil, les rayons n’étaient pas assez chauds pour s’en rendre compte. Mais un pavillon occultant aurait été une bien meilleure solution.
Une conduite Smooth et pas pousse au crime
Le passage d’une génération de Model Y à l’autre montre une belle évolution sur ce point.
Les suspensions sont enfin capables de filtrer les aspérités de la route. Dos d’âne, nids de poule, chaussée déformée, pavés, tout a été essoré durant cet essai et le gain est colossal. Certes, nous partions de très, très bas, mais tout de même. C’est enfin agréable.
Le volant est nouveau. Enfin nouveau, c’est un dérivé de celui de la Model 3.Plus compact, mieux fini, plus agréable au toucher avec des ergos plus prononcés. Notez que le commodo des clignotants est de retour (ouf !). Les boutons réagissent correctement. Il y a un bouton dédié à l’activation de la caméra.


Justement, la caméra, parlons-en. Le Model Y Juniper a droit (enfin) à une caméra frontale. Elle est nettoyante et chauffante. L’angle est large. Mais malheureusement, il n’y a pas de rendu 3D du véhicule comme chez la concurrence. Mais ça fait le job.
On entre dans le détail, mais le passage d’une génération à l’autre le rend flagrant : le One Pedal a été amélioré. La pédale d’accélérateur dispose d’une sorte de course d’amortissement. Léger, ça permet de pouvoir lever le pied pour bénéficier du frein magnétique sans générer ce petit à-coup qui pouvait être désagréable sur l’ancienne version. Le toucher est vraiment meilleur, plus progressif, un régal. Idem pour la pédale de frein, plus précise également. La conduite en est d’autant plus douce et plus fluide, tant pour le conducteur que les passagers. Sur ce point, tesla domine la concurrence.
Niveau motricité, rien à dire. Tesla trône au-dessus des autres constructeurs. Les 400 et quelques chevaux (Tesla ne transmet pas la puissance de ses voitures) sont parfaitement envoyés au sol. Le châssis ne bronche pas, la voiture tient la route et vire presque à plat, une prouesse pour un SUV. Le plus fou, c’est que certains modèles concurrents dotés de suspensions pilotées (ce qui n’est pas le cas ici) ne font pas aussi bien. Certains confrères ont repéré que le comportement lors de freinage était instable à cause des barres anti-roulis. Mais je n’ai rien constaté sur ce point.
Le rayon de braquage permet enfin de faire des demi-tours sans s’y reprendre à 4 fois. Soyons clairs : le Model Y reste dans le bas du panier des rayons de braquage. Mais la première génération était aussi agile pour un demi-tour que l’Evergreen dans le Canal de Suez.
Bref, côté conduite, il n’y a rien à jeter. Le nouveau Model Y est un régal de réactivité et de motricité. Doublé désormais de plus de précision et de confort. Bien joué aux ingénieurs.
Ah oui, j’oubliais : le commodo de sélection de rapport (avancer, reculer, neutre, parking) est, comme sur la Model 3, remplacé par une commande tactile sur l’écran. On s’y fait, je crois, après quelques jours. Mais j’ai tout de même cherché la commande physique à de multiples reprises. Pas la meilleure des idées.
Une consommation sur le podium et une charge toujours trop lente
Tesla annonce 13,8 kWh/100 km. C’est jouable en ville et sur les petites routes. Sur autoroute, à 135, la conso grimpe à 29-21 kWh/100 km environ. Nous roulions par des températures plutôt douces (entre 10 et 14 °C). Il faudrait réaliser un grand trajet de 1200 km pour juger.
Il n’y a pas de réel gain par rapport à l’ancienne génération. Mais la reluctance variable est tellement efficace, qu’il devient difficile de faire plus efficient. Pour faire simple, en contrôlant l’énergie magnétique (reluctance) grâce à la distance entre l’aimant et les bobines, Tesla diminue la résistance dans les phases de roulage et l’augmente dans les phases de freinage. Cela se traduit par une consommation modérée et une récupération d’énergie plus importante.

La recharge, en revanche, n’a pas bougé. Elle est lente, très lente, trop lente. Il y a bien eu un pic à 223 kW le temps de passer les 20 %, puis ça s’est vite calmé.
200 kW => 20 %
120 kW entre 20 et 40 %
100 kW => 70 %
Puis 75 kW => 80 %
Comptez de toutes façons 35 minutes pour une recharge de 1 % à 80 %. Il en sera de même pour une charge de 20 % à 80 %. La vitesse de recharge maximum étant atteinte entre 0 % et 20 %. À titre de comparaison, la plateforme 800V d’une Hyundai Ioniq 5 permet une charge de 1 à 80 % en 18 minutes. Presque moitié moins. Et des architectures 800 V, il commence à y en avoir de plus en plus. Mais cette architecture a un coût qui ne permettrait peut-être pas un tel tarif.

Attention : la recharge a été faite sur un Superchargeur V3, avec une batterie donc préchauffée et à 10 %. Il a fallu 35 minutes pour atteindre les 80 %.
Toujours les mêmes problèmes
Les démons sont parfois difficiles à chasser. Il n’y a toujours pas de capteur de pluie, donc les essuie-glaces partent toujours en SU7. Mais c’est surtout l’autopilote qui pose problème. C’est le pire du marché à ce jour, et de loin. Par autopilote, il est question de conduite autonome de niveau 2 à savoir, le fameux combo : centrage dans la voie et régulateur adaptatif.

Cet « autopilote » est utile dans les grandes phases d’autoroute. Il permet de soulager le conducteur, de chercher ses lunettes, de manipuler une tablette tactile, de lancer une playlist, bref, de relâcher un peu son attention. Que nenni ! Tesla n’est pas décidé à revoir sa copie. Nous avons donc toujours un autopilote qui se relâche d’un coup dès que ça tourne un peu trop. Il se désactive dès que vous cherchez à dépasser, mais ne se réactive pas ensuite.
Enfin, si vous avez le malheur de ne pas regarder droit devant vous tout en mettant des petits coups au volant pour indiquer que vous êtes bien présent, vous vous faites rappeler à l’ordre, prenez un strike et l’autopilote se désactive. Il faut alors s’arrêter et se mettre en point mort pour le réactiver. C’est nul !
Point d’Android Auto, de Carplay et donc de Waze. Pour certaines personnes, c’est un « dealbreaker ». Pour d’autres, le système Tesla est si bien fait, qu’il n’y en a pas besoin.
Un véhicule mature, toujours au top du rapport qualité-prix, mais qui se fait rattraper par la concurrence
Difficile de prendre en défaut ce nouveau Model Y Juniper. Plus abouti, mieux fini, plus confortable, plus progressif, toujours aussi efficace et spacieux, il balaie d’un revers de la main la concurrence sur énormément de plans. Mais il reste une Tesla, à savoir un engin différent. Pas de Carplay ou d’Android Auto, pas de conduite autonome de niveau 2 valable et un style très clivant, tant dehors que dedans.
Mais c’est tant mieux, car ceux qui veulent autre chose peuvent se tourner vers la concurrence.
Il y a bien l’histoire du boycott de la marque à la suite des frasques d’Elon Musk, mais cet argument n’est pas réellement recevable, dans la mesure où quasiment tous les constructeurs (sauf Renault et Hyundai aux dernières nouvelles) ont acheté des quotas carbones à Tesla (pour 1,3 milliard l’année dernière et environ 7 milliards de dollars au total depuis le début).
Pour en revenir au produit : il est excellent mais devra évoluer vers une véritable conduite autonome de niveau 2 (Ford propose un excellent 2+ par exemple) et une charge plus rapide.
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