Le 15 septembre 2014, une plateforme de streaming par abonnement investit les contrées françaises. Forte de son succès de l’autre côté de l’Atlantique, Netflix ambitionne de conquérir le marché européen avec la promesse d’une montagne de divertissement moyennant quelques euros par mois. Les adorateurs de séries la connaissent de réputation, sont prêts à explorer son catalogue composé de productions emblématiques du petit et du grand écran. Ce lancement est événement, il bouleversera le panorama audiovisuel français.
La firme de Los Gatos relaie les chaînes de télévision au rang d’antiquités, s’émancipe de leur linéarité pour proposer à ses abonnés un large de choix de séries et de films accessibles à chaque instant et sans surcoût. La SVoD, née quelques années plus tôt aux États-Unis, est en passe de devenir le réseau de divertissement privilégié de nombreux français.
Mais Netflix ce n’est pas seulement une destination de streaming, l’entreprise s’est lancée en 2012 dans la production de séries originales. Le service, qui était à l’origine une société de location de DVD livrés à domicile, a la ferme intention de marcher sur les platebandes des chaînes américaines emblématiques, HBO ou AMC en tête de liste. Plus question pour elle se contenter d’acheter des œuvres à ses concurrents, le N rouge veut développer son offre Netflix Originals. Retour sur les productions emblématiques du service.
Lilyhammer, la première création (2012)
Si House of Cards est souvent identifiée comme la première création du N rouge, c’est bien avec Lilyhammer que la firme de Reed Hastings signe sa première production originale. Nous sommes en 2012 et l’entreprise collabore avec la chaîne norvégienne NRK1 pour faire éclore un thriller déjanté sur fond de crime organisé. L’histoire suit Frank, un ancien parrain de la mafia italienne de New York qui entre dans le programme de protection des témoins après avoir participé à un procès. Il est envoyé à Lillehammer, une petite ville qu’il a découverte en regardant les Jeux olympiques d’hiver de 1994. Trois saisons lui seront consacrées, elle sera même diffusée en France. Netflix n’étant pas encore disponible dans nos vertes contrées, c’est Canal+ qui s’en empare dès le mois d’octobre 2012.
House of Cards, le début du succès (2013)
C’est à elle que la plateforme doit son logo sonore, les trois coups qui résonnent depuis une dizaine d’années dans les salons français. En 2013, après la discrète Lilyhammer, Netflix décide de voler en solo avec un drame politique qui ne tardera pas à trouver un écho auprès des spectateurs du monde entier. Portée par Kevin Spacey et Robin Wright, House of Cards raconte le parcours de Frank Underwood et de son épouse Claire, prêts à tout pour obtenir le poste de secrétaire d’État. Manigance et trahisons seront à l’épicentre des six saisons consacrées à ce projet.
Pour Netflix, c’est déjà l’heure de récolter quelques statuettes aux différentes cérémonies récompensant le meilleur du petit écran. David Fincher décroche le Primetime Emmy Awards de la meilleure réalisation pour une série dramatique en 2013. La série continuera d’être une production qui compte pour l’industrie et multipliera les nominations et récompenses. En France, elle est d’abord diffusée sur Canal+ avant que Netflix ne se réserve l’exclusivité de sa production dès l’année 2016.
Marco Polo, la première superproduction (2014)
En 2014, Netflix est installé dans les salons français depuis quelques mois lorsque sort la série la plus chère de son histoire (à l’époque). Si le N rouge a multiplié les investissements d’envergure depuis, Marco Polo est présentée comme un véritable mastodonte de la télévision par abonnement. 90 millions de dollars rien que pour la première saison, même Game of Thrones n’ose pas encore atteindre de telles sommes. Netflix mise énormément sur ce projet, mais se confronte à la dure réalité d’une critique moins enthousiaste que prévu et un retour sur investissement assez faible. Marco Polo sera abandonnée au terme de sa deuxième saison.
Marseille, cocorico (2016)
Seulement deux ans après son arrivée en France, le N rouge noue des partenariats avec les acteurs de la production française pour faire éclore une production originale à l’échelle locale. En partenariat avec TF1, la plateforme fait éclore un drame politique porté par une distribution de renom. Gérard Depardieu, Benoît Magimel ou encore Géraldine Paihas, Netflix remporte le bingo des personnalités françaises les plus emblématiques. L’histoire suit Robert Taro, maire de Marseille depuis 20 ans et qui envisage de prendre sa retraite. Après une trahison politique, l’homme politique va finalement décider de présenter pour un nouveau mandat. À sa sortie, la série se confronte à des critiques assassines, et particulièrement en France où elle est comparée à une “bouse” par Le Monde. Télérama à l’époque évoque un “ratage tellement énorme qu’il en deviendrait presque fascinant”. Marseille sera annulée en 2018 après la diffusion de la seconde saison.
Stranger Things, celle qui met tout le monde d’accord (2016)
Si l’engouement pour le catalogue Netflix devait se résumer à une seule production, ce serait sans conteste Stranger Things. En 2016, les frères Duffer dévoilent une série aux allures de Les Goonies rencontre Donjons et Dragons, sans se douter un seul instant que les aventures de Mike, Eleven et leurs amis rencontreraient un tel succès. La bande-annonce attire 1,4 million de regards sur YouTube et 1,8 sur Facebook, la ferveur débute avant même la diffusion du premier épisode. La série réalisera un des meilleurs lancements de l’histoire de Netflix, cette lettre “d’amour aux classiques des années 80” fait recette. Depuis ces débuts, la création des frères Duffer est devenue une figure de proue de la plateforme. Quantité de produits dérivés, une pièce de théâtre, Stranger Things est la série Netflix qui séduit la critique dès ces premiers épisodes.
Bird Box, ou le film qui fait parler (2018)
Six ans après sa sortie, le film de Susanne Bier continue d’être au classement des métrages originaux les plus vus sur Netflix. 157 millions de foyers ont regardé la production horrifique portée par Sandra Bullock. Si la critique ne semble pas particulièrement enthousiaste, le public répond présent et le film est largement discuté sur les réseaux sociaux. Rapidement, il apparaît en tête des productions les plus vues à travers le monde, il ne laissera sa place que tardivement, lorsque Red Notice, Don’t Look Up et Adam à travers le temps investiront les rayons de Netflix.
Roma, consécration pour Netflix (2019)
En s’investissant dans la création cinématographique, Netflix n’a pas lésiné sur les noms prestigieux. La firme veut prouver qu’elle peut rivaliser avec les studios hollywoodiens. En avril 2018, la plateforme s’offre les droits de distribution du nouveau film d’Alfonso Cuarón. Sur la base de douze minutes du film en noir et blanc, l’entreprise décide qu’elle veut miser sur ce drame pour forger sa réputation. D’ailleurs, ce sont les cérémonies de récompense du septième art qui l’intéresse. Le film sera présenté en avant-première à la Mostra de Venise, où il a remporté le Lion d’or. C’est le début d’une longue série de victoires pour Roma qui décrochera le prix du meilleur film en langue étrangère aux Oscars, ainsi que les statuettes de la meilleure photographie et du meilleur réalisateur.
Cette consécration fera néanmoins couler beaucoup d’encre, Steven Spielberg comptera parmi les détracteurs de Netflix. Il se fera l’avocat d’une exclusion des films Netflix de la cérémonie, qui ne participe pas au rayonnement des salles obscures sur l’échelle mondiale. La plateforme répondra sur les réseaux sociaux qu’elle permet à des “personnes qui n’ont pas toujours les moyens d’aller au cinéma ou qui vivent dans des villes sans cinéma” de profiter de ce que le septième art a à offrir. En 2024, une nouvelle réglementation des Oscars exigera que les films de la catégorie Meilleur Film soient diffusés pendant sept jours, dans 10 des 50 principaux marchés américains.
Lupin, le premier hit français (2021)
Si Marseille n’a pas vraiment fait rayonner la création française à l’international, un gentleman cambrioleur va séduire les abonnés Netflix à travers le monde. En 2021, après une pandémie qui a durement impacté les salles obscures dans le monde, tout en favorisant les offres de streaming par abonnement, Lupin débarque sur Netflix avec la ferme intention de devenir le hit du moment. Avec Omar Sy en tête d’affiche, l’adaptation des ouvrages de Maurice Leblanc ne tarde pas à se forger une réputation. 99 millions d’utilisateurs se lancent dans la lecture de la première saison et la série de George Kay devient la série non anglophone de l’histoire de Netflix. Si Squid Game la détrône quelques mois plus tard, la série continue d’être à la quatrième place du classement. Le succès est tel que le N rouge décide de la renouveler, alors même qu’elle ne devait livrer que trois saisons.
Dix ans après ses premiers pas en France, Netflix est devenu un acteur important du paysage audiovisuel français. Netflix a su séduire l’Hexagone, la plateforme a franchi le cap des 10 millions de clients en France en 2022. Sa présence en France a été renforcée, et certains de ses plus gros succès sont désormais bleu, blanc, rouge. Cet été, c’est le film Sous la Seine qui s’est illustré avec plus de 102,3 millions de vues à travers le monde. AKA, porté par Alban Lenoir, est aussi au classement des films non-anglophones les plus vus de l’histoire Netflix. La France est devenue en quelques années l’un des marchés les plus importants pour le N rouge, qui le lui rend visiblement plutôt bien…
🟣 Pour ne manquer aucune news sur le Journal du Geek, abonnez-vous sur Google Actualités. Et si vous nous adorez, on a une newsletter tous les matins.