À l’heure où la transition écologique s’impose comme une priorité, nos habitudes de lecture n’échappent pas aux considérations environnementales. Entre le bon vieux livre papier, la liseuse électronique et l’audiobook, quelle alternative permet d’étancher sa soif de lecture sans (trop) abîmer la planète ? On fait le point.
À la fabrication : la liseuse largement perdante
La fabrication d’une liseuse électronique accuse une empreinte carbone bien plus élevée que celle d’un livre papier. Malgré les coupes d’arbres liées au marché de l’édition, un roman standard de 300 pages émet entre 1 et 3 kg d’équivalent CO2, tandis qu’une liseuse génère entre 170 et 230 kg d’équivalent CO2 rien que pendant sa phase de production, rapporte une étude du Stockholm Royal Institute of Technology.
Cet écart s’explique par plusieurs facteurs : la fabrication d’un appareil électronique nécessite l’extraction des métaux rares (comme le lithium pour les batteries ou le tantale pour les condensateurs), un processus énergivore et polluant. La fabrication des composants électroniques requiert, elle aussi, l’exploitation des ressources fossiles. Enfin, il faut ajouter à cela l’assemblage et le transport, qui alourdissent encore un peu plus l’empreinte carbone des liseuses.
Le seuil de rentabilité écologique
À première vue, cet écart semble donner un avantage clair au format papier. Toutefois, la réalité est un peu plus complexe. Si la liseuse est plus énergivore au moment de sa fabrication, son empreinte carbone peut être compensée en fonction de son seuil de rentabilité écologique. Plus elle est utilisée pour lire, plus son impact environnemental diminue. Selon l’Ademe (Agence de la transition écologique), il suffirait de lire au moins 10 livres par an pour que la liseuse devienne plus avantageuse écologiquement que le papier.
En se basant sur une durée de vie moyenne de 5 ans, il faudrait lire une cinquantaine de livres pour que chaque ouvrage supplémentaire ait une empreinte carbone inférieure à celle de son équivalent papier neuf.
La seconde main
Le calcul, en revanche, ne tient pas compte des livres papier réutilisés (prêtés, achetés d’occasion ou empruntés). Cette pratique réduit considérablement l’impact environnemental du format papier, en divisant sa facture écologique. Ainsi, un livre d’occasion génère en moyenne 317 g de CO2, soit environ 3,5 fois moins qu’un livre neuf. Dans le cas où un livre est lu par deux personnes (achat neuf puis prêt), le point de bascule écologique entre une liseuse et le format papier est doublé, en passant à 20 lectures par an. Opter pour des formats poche réduit encore davantage l’empreinte carbone, puisque ces éditions nécessitent environ 37 % de papier en moins qu’un livre classique.
Et les livres audio dans tout ça ?
Face aux livres classiques et aux ebooks, les livres audio constituent une alternative intéressante aux formats traditionnels. Leur impact écologique dépend toutefois de la manière dont ils sont exploités : le streaming consomme des données via internet à chaque écoute par rapport au téléchargement qui n’en consomme qu’une seule fois. Selon une étude de The Shift Project, la consommation énergétique liée au streaming vidéo ou audio représente une part croissante des émissions numériques mondiales. Rien de très étonnant à cela, quand on sait que Spotify s’est lancé à corps perdu sur le marché, face au géant Audible. Si vous écoutez plusieurs fois un même livre audio en streaming, son impact peut devenir significatif.
Il faut aussi prendre en compte la taille du livre. Assez logiquement, plus un livre est long, plus son empreinte carbone est élevée. Reste que lorsque vous écoutez un livre audio sur votre smartphone, vous n’utilisez pas d’appareil dédié. De quoi limiter son impact environnemental comparé à une liseuse dédiée.
Une question d’habitudes
Selon le Centre National du Livre (CNL), les Français lisent en moyenne 22 livres par an. Ce chiffre révèle toutefois d’importantes disparités, puisque 31% lisent moins de 5 livres par an, tandis qu’une proportion équivalente lit plus de 20 livres sur la même période. Par ailleurs, certains types d’ouvrages comme les bandes dessinées ou mangas se prêtent moins bien à la lecture numérique ou audio, ce qui complique encore davantage l’équation. Pour faire un choix éclairé et responsable sur le plan environnemental, il faut donc commencer par évaluer vos habitudes de lecture.
- Si vous dévorez plus de 20 livres par an, principalement achetés neufs et non réutilisés ensuite, la liseuse devient une alternative pertinente sur le plan écologique. Même chose si vous privilégiez les romans courts ou les formats numériques légers.
- Si vous achetez vos livres en occasion ou si vous empruntez régulièrement en médiathèque, le format papier conserve un net avantage.
- Si votre consommation reste modérée, le livre audio peut être une bonne alternative, à condition de télécharger vos fichiers, pour éviter les partages de données trop importants.
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