En 2016, à peine cinq ans après la fin de la saga Harry Potter, Warner Bros ouvrait un nouveau chapitre de l’histoire du monde des sorciers. Sous l’impulsion de J.K Rowling et du réalisateur David Yates, Les Animaux Fantastiques ambitionnait de raconter l’autre grand méchant de la franchise : Gellert Grindelwald. Cette fois-ci, aucun roman ne sert d’inspiration et l’histoire prend racine dans un manuel de magizoologie écrit par la romancière pour recenser les créatures qui peuplent son univers de fiction. C’est ce produit dérivé, acheté et feuilleté par les fans, qui donnera naissance à une nouvelle saga portée par Eddie Redmayne.
Rowling s’implique dans le processus créatif, participe à l’élaboration du scénario qui doit plonger les spectateurs dans le New York des années 20. Norbert Dragonneau — spécialiste des créatures magiques — se rend dans la ville américaine pour accomplir une mission cruciale, mais voit ses animaux fantastiques se faire la malle. Échappées de sa valise magique, les créatures sèment le chaos. Norbert s’associe donc à une Auror prénommée Tina et un Moldu qui répond au nom de Jacob pour tous les capturer.
Dès le départ, Warner Bros promet cinq films évoluant dans cet univers. La licence Harry Potter est sans conteste l’une des plus populaires à travers le monde, l’entreprise a a priori peu de chance d’échouer. Les Animaux Fantastisques est un joli succès en salles, il rapporte 800 millions de dollars au box-office mondial. Si les critiques sont moins dithyrambiques que pour les aventures du petit sorcier à lunettes, le studio ne tarde pas à annoncer la mise en chantier d’une suite.
Le début des problèmes…
Deux ans après ce lancement en fanfare, David Yates retrouve le monde des sorciers qu’il explore depuis L’Ordre du Phénix en 2007. Eddie Redmayne, Katherine Waterston, Dan Fogler et Alison Sudol reviennent pour se confronter à une menace cette fois bien tangible. Johnny Depp fait officiellement son entrée dans l’univers, après seulement quelques scènes dans le premier film. Jude Law est quant à lui recruté pour incarner l’emblématique Albus Dumbledore tandis que Zoë Kravitz fait ses débuts dans la peau de Leta Lestrange. J.K Rowling continue d’œuvrer à l’écriture… et acte la lente agonie de sa licence au cinéma.
Pour la première fois dans l’histoire de la franchise, l’univers des sorciers écope d’une certification “rotten” sur l’agrégateur de critiques Rotten Tomatoes. L’estampille semble avoir perdu de sa superbe et les recettes — que Warner Bros espérait supérieures à celles du premier film — accusent une baisse de plus de 150 millions. Il faut dire qu’entre ses héros, sa thématique principale et la naissance d’un conflit politique dans le monde des sorciers, Les Animaux Fantastiques ne sait plus sur quel pied danser. J.K Rowling invite les spectateurs dans les dédales d’une intrigue labyrinthique et nébuleuse sur fond de disparition d’enfants, de totalitarisme magique et de retrouvailles amoureuses ou familiales. En Angleterre et en France, la narration multiplie les impairs. Les créatures magiques deviennent plus que jamais un prétexte à poursuivre le voyage initié deux ans plus tôt. Et les choses ne vont pas aller en s’arrangeant, remettant en doute l’avenir de la saga en cinq opus.
Et le chaos
Il aura fallu attendre quatre ans pour que Les Secrets de Dumbledore voit finalement le jour. Officialisée rapidement après la sortie des Crimes de Grindelwald, cette suite a dû composer avec de nombreux problèmes en coulisses. D’abord, le tournage a été retardé en raison de la pandémie qui a paralysé l’industrie pendant plusieurs mois. Quelques temps après l’annonce de ce report, Warner Bros décide d’évincer Johnny Depp suite au procès qui l’opposait alors au tabloïd The Sun. Enfin, la participation de l’acteur·ice Ezra Miller est remise en question après la publication de plusieurs articles rapportant un comportement problématique avec des fans. Si l’interprète de Croyance Bellebosse ne laisse finalement pas sa place pour ce troisième volet, c’est désormais Mads Mikkelsen qui a la lourde responsabilité de jouer l’antagoniste principal autrefois campé par Depp.
Tous ces aléas ne seront évidemment pas en la faveur d’un succès au cinéma. En 2022, Les Secrets de Dumbledore ne récolte que 407 millions de dollars au box-office mondial, soit la moitié de ce qu’avait rapporté le premier film. Son budget est pourtant similaire aux deux précédents, n’offrant pas à Warner la rentabilité espérée. Une immense majorité des sommes engrangées est allouée aux exploitants de salles, Les Animaux Fantastiques 3 est un bide. Les quatrième et cinquième opus semblent tomber à l’eau…
Warner Bros passe à autre chose
Interrogé par Total Film en octobre dernier, David Yates s’est confié sur son avenir dans l’industrie hollywoodienne. Celui qui a consacré plus de quinze ans à l’univers Harry Potter semblait enfin prêt à tourner la page. Les tristes résultats des Secrets de Dumbledore a contraint Warner Bros à prendre une décision radicale, tous les projets de suite sont actuellement en pause. Une situation qui n’est pas pour déplaire au cinéaste, qui confiait vouloir profiter d’une pause méritée. “J’ai juste besoin de m’arrêter un peu et d’y aller doucement”.
L’idée de lui trouver un remplaçant n’a pas non plus été évoquée par Warner Bros, pour qui la priorité est désormais ailleurs. Si raconter l’histoire du monde magique sans son héros n’a pas suffi à retrouver le succès initié par Harry Potter à l’École de sorciers, un retour aux sources est sans doute la meilleure manière de tirer profit de l’estampille qui continue de vendre quantité de produits dérivés et expériences dédiées. Ainsi, il y a tout juste un an, Warner Bros et sa filiale Max annonçaient vouloir consacrer une série télévisée à Harry Potter et ses compagnons. Ce remake est un vaste projet qui devrait s’étaler sur dix années et adapter chaque tome jusqu’à la conclusion. Le format sériel est une opportunité pour les scénaristes de raconter les longs passages qui n’ont pas été explorés au cinéma.
Si la crainte d’un recyclage peu flatteur est grande, l’expertise d’HBO dans le format pourrait être une occasion de redonner des couleurs à la licence. L’on peut noter aussi que la série pourrait être une manière pour Warner Bros d’attirer une nouvelle génération de spectateurs, que les effets visuels désuets du premier film pourraient décourager. Comme la dernière trilogie Star Wars a été l’occasion de réunir de nouveaux adeptes (et de chagriner les anciens), cette nouvelle mouture ne devrait avoir aucun mal à rencontrer le succès. Réponse en 2026 avec les premiers épisodes. Quant aux Animaux Fantastiques, ils semblent être condamnés à ne rester qu’une tentative avortée de reproduire le miracle de la première saga.
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Les “Animaux Fantastiques, semblent être condamnés à ne rester qu’une tentative avortée de reproduire le miracle de la première saga.”
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