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Game Pass : comment le « Netflix du jeu vidéo » a transformé notre façon de jouer

Le monde du jeu vidéo se dirige vers une grande transition qui va modifier considérablement la façon dont les jeux sont produits, commercialisés et consommés. Mais il est encore difficile d’y voir clair parmi toutes les conséquences potentielles de cette dynamique.

La sortie du Game Pass de Microsoft, en 2017, a transformé l’écosystème vidéoludique en profondeur. Ce service, parfois qualifié de « Netflix du jeu vidéo » (un terme qui aura son importance plus tard) a modifié de façon significative la façon dont une partie du public paye, mais aussi consomme. Aujourd’hui, il est possible de jouer à des tas de jeux sans débourser un centime pour s’offrir un seul titre individuel.

Et c’est une distinction très importante, car il ne s’agit pas seulement d’un changement de modèle économique. Ce sont bel et bien les contours d’un changement total de paradigme qui commencent à se dessiner, et cette dynamique va vraisemblablement avoir de lourdes implications sur la manière dont nous consommons nos jeux.

Un nouvel eldorado vidéoludique

Cette transition a d’ailleurs déjà commencé, du moins en partie. Globalement, les premiers retours du public sur le Game Pass ont été plus que positifs. La majorité des joueurs semble apprécier la forme, et on comprend aisément pourquoi ; avec un catalogue conséquent et constamment renouvelé qui coûte moins du quart d’un jeu AAA par mois, la formule semble quasiment imbattable sur le plan économique, surtout pour les joueurs occasionnels.

De plus, dans le contexte actuel où les jeux sortent trop souvent dans un état déplorable, ce modèle est une forme d’assurance pour le client. Avec ce genre de service, il n’est plus forcé de jouer au poker en déboursant une soixantaine d’euros pour jeu potentiellement décevant. Mais surtout, et c’est certainement l’aspect le plus séduisant du GamePass et de ses homologues, c’est une occasion en or d’essayer des dizaines de titres dont il aurait été inconcevable de profiter s’il avait fallu les acheter individuellement.

Crédits : Xbox

Aujourd’hui, on constate même que de nombreux joueurs ont décidé de s’offrir la console de Microsoft uniquement sur la base du Game Pass, parfois même en complément d’une PS5. Quoi de plus révélateur que des joueurs qui dépensent plusieurs centaines d’euros juste pour entrouvrir la porte d’un service payant ?

L’avenir du GamePass semble donc assuré. Mais il reste encore énormément d’inconnues à ce stade ; bien malin celui qui pourra deviner précisément les intentions de Microsoft. On peut donc se poser des tas de questions sur l’écosystème vidéoludique de demain.

Notamment en ce qui concerne le modèle économique. Car s’il y a bien un point qui semble indiscutable, c’est que le service est encore sur une dynamique de séduction.

Un modèle encore balbutiant basé sur la séduction

En effet, Microsoft a mis des moyens immenses pour monter une offre qui, pour l’instant, semble presque trop belle pour être vraie. Microsoft se refuse à communiquer la moindre donnée sur les retombées financières ; il est impossible de savoir précisément à quel point le GamePass est profitable. Mais entre les frais de marketing, l’enveloppe destinée aux développeurs et aux éditeurs, la maintenance… il n’est pas exclu que les marges de Microsoft marges ne soient pas énormes pour l’instant. Par conséquent, on peut légitimement se demander où l’entreprise y trouve son compte économiquement parlant.

Pour le géant du numérique, l’intérêt est ailleurs. Comme Netflix, dont l’ascension a commencé avec des tarifs extrêmement agressifs, Microsoft semble encore sur une dynamique de séduction. Il s’agit avant tout de fidéliser une communauté aussi large que possible, probablement dans le but de pousser à la transition vers ce nouveau modèle. Stratégiquement, Microsoft a tout à y gagner, puisqu’il domine déjà ce segment de la tête et des épaules. Il sera donc très intéressant, et nous disons cela avec une pointe d’appréhension, de voir ce qui arrivera une fois que le Game Pass aura fini d’étendre son emprise sur l’écosystème AAA.

Game Pass Séduction
Malgré son franc succès, le GamePass est encore sur une dynamique de séduction. © Journal du Geek – MidjourneyAI

Il est probable que le GamePass tel qu’on le connaît soit en fait une sorte de version d’essai proposée à un tarif préférentiel. Et une fois que le modèle se sera encore davantage démocratisé, il sera peut-être l’heure de passer de la séduction à la conversion en augmentant massivement les tarifs une fois que tout le monde aura mordu à l’hameçon.

De la guerre des consoles au « gaming as a service »

À terme, cette hégémonie sera sans doute partagée avec certains concurrents qui vont vraisemblablement lancer leur propre version du Game Pass. La guerre des consoles qui oppose traditionnellement les constructeurs pourrait donc prendre une toute nouvelle dimension ; il y a fort à parier qu’elle ressemblera de plus en plus à la guerre entre les plateformes de SVOD, avec tout ce que cela implique pour les joueurs, développeurs, éditeurs.

Pour ces derniers, la première question sera de savoir si Microsoft et ses concurrents comptent se poser en fournisseurs ou en agrégateurs. La réponse pourrait conditionner une part significative du futur de l’industrie. Par exemple, on peut imaginer que les jeux AAA devront se conformer à certaines guidelines pour avoir une chance d’exister dans cet espace très prisé, mais aussi intrinsèquement exclusif. Si le GamePass et consorts deviennent aussi monolithiques qu’on peut le penser, développer un jeu AAA qui n’aurait aucune chance d’être admis sur le GamePass n’aurait plus aucun sens économiquement parlant. Cela pourrait générer une sorte de formatage passif de l’industrie, pour le meilleur et pour le pire.

D’un côté, cette dynamique pourrait faire baisser le nombre de précommandes, puisque les joueurs auront tout intérêt à profiter du jeu sans surcoût sur le GamePass quelques semaines plus tard. Cela pourrait forcer les studios à proposer des produits aboutis, ce qui serait une excellente nouvelle.

Mais une autre lecture de la situation est aussi possible. On observe déjà aujourd’hui que dans une certaine mesure, l’audace et l’originalité sont de plus en plus l’apanage du monde indépendant ; en haut de la chaîne alimentaire, on préfère des valeurs sûres à fort potentiel commercial, quitte à enchaîner les titres redondants et insipides. Certains y voient une dévaluation d’une forme d’art à part entière, et cette dynamique pourrait s’accentuer encore davantage. Là encore, le parallèle avec Netflix et consorts ressort en filigrane.

Plus largement, on se dirige surtout vers un grand changement de modèle qui commence déjà à s’installer subrepticement. On entend déjà beaucoup parler de « game as a service » aujourd’hui, mais ce n’est probablement qu’un préambule à ce que l’on pourrait appeler plus largement le « gaming as a service », bien au-delà des jeux individuels. En extrapolant, on peut même imaginer qu’un jour, les consoles ne seront plus que des plateformes d’accès aux différents services proposés par les géants du jeu vidéo.

Cela repose aussi la sempiternelle question de la “propriété” des jeux. En pratique, c’est un concept en voie de disparition. Par exemple, si vous pensez naïvement que vous êtes le propriétaire légitime d’une copie des jeux que vous avez achetés sur Steam… c’est que vous n’avez jamais pris la peine de lire les petits caractères ; ils ne vous appartiennent absolument pas. Légalement parlant, aucun client ne “possède” ses jeux Steam, au grand dam des joueurs qui restent pour la plupart très attachés à cette notion. Et même ceux qui se sont offert un jeu au format physique ne sont pas à l’abri d’une amère désillusion si un fournisseur cesse de le prendre en charge.

Au-delà de la notion de propriété et de la dimension physique, on peut aussi imaginer que l’idée de collection personnelle, un des gros atouts de Steam, pourrait être mise à mal par le modèle de renouvellement constant.

Le changement, c’est maintenant

Accessoirement, on peut d’ailleurs s’interroger sur la façon dont la plateforme de Valve compte se positionner au milieu de cette polarisation massive de l’écosystème JV. Certes, pour le moment, Steam reste inébranlable, et cet exemple montre que le modèle du jeu à l’unité a encore de beaux jours devant lui. Mais dans le contexte actuel, on peut légitimement se demander si Valve ne va pas finir par se diriger vers un Steam Pass. À l’inverse, Gabe Newell pourrait aussi camper sur ses positions et défendre son modèle bec et ongles.

Pour l’heure, c’est encore impossible à dire — et ce constat vaut pour l’ensemble de ce nouvel écosystème qui commence à émerger. Bien malin celui qui saura anticiper toutes les retombées de ce changement de paradigme.

évolution jeux vidéo game pass
© Journal du Geek – MidjourneyAI

Cet article n’a pas la prétention de couvrir toutes les implications techniques, pratiques et commerciales inhérentes à cette thématique ; elles sont tout simplement bien trop nombreuses, et chacune se ramifie en un vaste arbre de questions subsidiaires dont il est encore difficile de mesurer la portée. Nous avons simplement cherché à dessiner les contours de ce nouveau paysage vidéoludique. Mais ce qui semble certain, c’est que notre manière de consommer ces produits risque de changer radicalement d’ici la fin de la décennie. Et même si cette grande transition s’annonce un tantinet anxiogène pour une grande partie du public, il sera très intéressant de voir comment l’industrie va évoluer à court, moyen et long terme. Reste à voir qui y trouvera son compte, et qui sera le dindon de la farce.

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1 commentaire
  1. Cela nous à surtout habitué à de la surconsommation de jeux tres moyen .
    Je prefere vraiment la qualité à la quantité , donc apres 2 ans d’abonnement game passe je lui dit bye bye et je retourne acheter des vrai AAA en physique en petite quantité et surtout à en profiter pleinement

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