Il n’y a pas si longtemps, l’avenir semblait radieux pour Marvel Studios. L’entreprise avait atteint des sommets de rentabilité avec ses films Avengers : Infinity War et Endgame. L’événement censé conclure plus d’une décennie d’adaptations de comics n’a eu aucun mal à rencontrer son public et s’illustrer comme un raz de marée cinématographique difficile à éviter. Partout dans le monde, les films réalisés par Joe et Anthony Russo se sont illustrés en tête du box-office.
Enorgueilli par ces hits, et alors que l’on pensait Kevin Feige prêt à prendre ses distances, Marvel n’aura pas chômé trop longtemps. À dire vrai, c’est la pandémie et la fermeture des cinémas qui a contraint la Maison des Idées à se tenir à l’écart du grand écran pendant plus d’une année. Et encore, il n’aura pas fallu attendre très longtemps avant que Disney+ n’entre dans les priorités de Marvel et n’ajoute des pierres à un édifice déjà colossal. Depuis 2019, ce sont dix films qui ont été proposés aux spectateurs.
Dix films en quatre ans et presque une quinzaine de séries d’animation et en prise de vues réelles, Marvel veut être là partout, tout le temps… au risque de lasser un public qui n’y trouve plus vraiment son compte. Les succès financiers se font plus rares, les échecs mémorables et plus nombreux. Ant-Man et la Guêpe : Quantumania, The Marvels ou encore Secret Invasion et She-Hulk sur Disney+, la simple mention du “Marvel Cinematic Universe” ne suffit plus.
En coulisses, la situation n’est pas plus rose avec l’éviction de Jonathan Majors qui a entraîné des changements majeurs pour la saga du multivers ou encore les plaintes formulées par les équipes en charge des effets numériques — ils évoquent des conditions de travail compliquées et des délais intenables.
Preuve s’il en fallait une que l’écurie est dans une mauvaise passe, de nombreux projets patinent. C’est le cas de Daredevil : Born Again qui, en 2023, profite de la grève des scénaristes et des acteurs pour repartir de zéro avec un véritable showrunner et alors que la moitié de la première saison était tournée.
Dans le même temps, le projet Blade multiplie les revirements de situation et perd un nouveau réalisateur. Captain America : Brave New World, qui arrive en ce mois de février au cinéma, est aussi l’un de ces films qui ont connu un développement tumultueux. Pourtant, en 2025, on peut entrevoir la lumière au bout du tunnel sur Disney+ comme dans les salles obscures…
![Daredevil Born Again](https://www.journaldugeek.com/app/uploads/2025/02/daredevil-born-again.jpg)
Un monde nouveau ?
Les bandes-annonces de Daredevil : Born Again et Les Quatres Fantastiques : Premiers pas ont fait renaître l’intérêt des spectateurs pour la licence. Après une phase 4 plutôt oubliable et une phase 5 qui partait sur de mauvais rails, l’écurie semble avoir trouvé une manière de créer à nouveau l’émoi chez les spectateurs.
Si Captain America : Brave New World et Thunderbolts semblent s’inscrire dans la droite lignée de ce que Marvel a proposé auparavant, les aventures de Matt Murdock et Reed Richards ont l’avantage certain d’être porté par des réalisateurs et scénaristes qui n’hésitent pas à s’écarter des sentiers battus.
![Thunderbolts Florence Pugh](https://www.journaldugeek.com/app/uploads/2025/02/thunderbolts-florence-pugh.jpg)
Dans le premier cas, c’est la présence de Dario Scardapane qui rassure. Scénariste sur The Punisher, il a une longue carrière sur le petit écran et une connaissance de l’univers des Defenders chez Netflix. Mais la donnée la plus rassurante concernant cette série se trouve moins du côté des faits d’armes de son showrunner que de la présence d’un showrunner… tout court.
Depuis l’arrivée de Disney+, Marvel semblait vouloir abandonner ce rôle clé dans l’industrie télévisuelle au profit d’une gestion de ses projets par les exécutifs et des dirigeants du studio. La firme pensait pouvoir se passer de showrunners, ces têtes pensantes qui accompagnent les réalisateurs autant que les scénaristes et qui disposent des pleins pouvoirs sur les séries. Ce sont eux qui déterminent l’approche d’une série et qui s’assurent que tout le monde respecte bien le mort d’ordre.
Mais depuis WandaVision, Marvel doit composer sans ce rôle et avec des producteurs exécutifs qui ont la bougeotte. Une immense majorité des séries développées par Marvel Studios ont vu leurs créateurs quitter le navire. C’était le cas sur Moon Knight avec le départ de Jeremy Slater, tandis que Kyle Bradstreet a abandonné Secret Invasion en cours de route. Même son de cloche pour She-Hulk qui a vu Jessica Gao être mise sur le banc de touche après qu’elle ait terminé l’écriture de la première saison.
Daredevil : Born Again devrait a priori s’extirper de ce modèle pour entreprendre un voyage plus proche des standards de ceux de la télévision, avec même plusieurs saisons. S’il faut encore attendre quelques semaines pour évaluer la réussite de ce changement de stratégie, les premières images sont plutôt rassurantes.
Des gens avec une vision
Le cas Les Quatre Fantastiques est un peu différent, et l’enthousiasme pour la production tient plus à la prise de risque du réalisateur qu’à la manière dont le film est produit. Alors que l’on reproche souvent à Marvel une uniformisation de ses productions, sur le petit et le grand écran, la nouvelle aventure de Reed Richards et ses compères profite d’une direction artistique jamais vue au sein de l’écurie.
Profitant des possibilités offertes par le multivers, Matt Shakman peut se départir de l’esthétique très lisse et peu colorée du MCU pour miser sur le rétrofuturisme des comics des années 60. Des couleurs plus affirmées, des décors plus marqués et des costumes désuets, la proposition du réalisateur de WandaVision ne manque pas de panache.
Les Quatre Fantastiques veut se démarquer dans un océan de productions Marvel qui n’avaient pas surpris depuis longtemps. À bien des égards, le projet nous rappelle Les Gardiens de la galaxie de James Gunn. En 2014, le metteur en scène et désormais patron de DC Studio, avait surpris son monde avec des personnages encore inconnus du grand public, une prise de risque visuelle franche (inspirée des années 80) et une franche envie de space opera. Hasard ou non, la famille est aussi à l’épicentre du film porté par Peter Quill, Gamora et Rocket.
![Fantastic Four Trailer](https://www.journaldugeek.com/app/uploads/2025/02/fantastic-four-trailer.jpg)
Des personnages de premier plan
Depuis quelques années, Marvel pioche dans ses fonds de tiroirs pour alourdir ses rangs. Maintenant que ses personnages les plus emblématiques ont fait leurs adieux, la firme s’est penchée sur le sort de certaines vedettes de seconde zone, comme Shang-Chi, She-Hulk ou encore plus récemment Echo. Pourtant, la firme ne rencontre jamais le succès comme lorsqu’elle immortalise ses têtes d’affiche. Un regard au box-office délirant de Spider-Man : No Way Home suffit à évaluer la popularité du tisseur de toile pourtant à l’épicentre de nombreuses productions télévisées et cinématographiques.
Mais voilà, le rachat de la 20th Century Fox a redistribué les cartes. Il a offert à Marvel Studios une opportunité de ramener les personnages vendus à d’autres entités sous son giron. C’est de cette envie de réunir Avengers, X-Men et Quatre Fantastiques qu’est né Deadpool & Wolverine. Là encore, la simple mention de Logan a fait des émules et permis au film de s’illustrer aux plus hautes marches du box-office annuel. Car le Marvel Cinematic Universe est moins une histoire d’intrigues que de personnages.
Ils sont des idoles, des points d’ancrage que Marvel peut exploiter à loisir. Une brève apparition d’un héros dans un film où il n’était a priori pas invité peut suffire à créer la liesse dans les salles de cinéma. L’exemple le plus parlant est sans aucun doute le retour miracle de tous les Avengers pour Endgame, lorsque Steve Rogers livre la réplique que tout le monde attendait depuis des lustres et que tous les personnages s’unissent pour affronter Thanos. C’est sur cette même envie de célébrer les personnages et de les confronter qu’était fondé le premier Avengers. Les Quatre Fantastiques, mais aussi les X-Men et les Defenders, sont de ces protagonistes qui fédèrent.
Nombre de spectateurs les ont vus évoluer en animation, en prise de vues réelles ou même sur papier glacé, ils sont prêts à les voir entamer un nouveau chapitre sous l’égide de Kevin Feige. Ce dernier a même préparé son auditoire à une exploitation infinie de ses légendes, en donnant le titre de Captain America à Sam Wilson et de Black Widow à Yelena Belova. L’objectif est simple, assurer la survie d’un personnage pendant des années après le départ de celui ou celle qui l’a incarné en premier lieu. À ce jeu-là, la firme s’est sans doute inspirée du traitement réservé à James Bond, au détail près que les changements d’interprètes sont ici directement mentionnés par la narration.
Mais attention…
Si l’on peut se réjouir de retrouver l’enthousiasme des premiers jours, Marvel doit surveiller ses arrières à l’approche d’un duel estival de haute volée. Les Quatre Fantastiques n’aura pas les mains libres. En juillet, le film devra partager la lumière avec une autre licence superhéroïque promise à de grandes choses : le DCU. James Gunn a la ferme intention de faire revenir Superman sur le devant de la scène. Tous les adorateurs des comics DC sont sur le qui-vive, attendent de découvrir si le papa des Gardiens de la Galaxie parviendra enfin à mettre une licence consacrée aux héros sur pied. Si une cohabitation est possible entre les deux entités, force est de constater qu’un tel scénario n’a pas encore eu lieu. Les années 2010 ont été largement marquées par l’omniprésence de Marvel, DC pourrait vouloir occuper tout l’espace en 2025.
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