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[Dossier] The Avengers : Qui est vraiment Thanos, le Titan fou ?

Longtemps considéré comme un des super vilains les plus puissants de l’univers Marvel –et à raison- Thanos est sans doute celui qui a le plus souvent tenu la victoire absolue entre ses mains, pour la voir lui filer entre les doigts. Comment un être aussi puissant et intelligent a-t-il pu échouer systématiquement ? Le Journal du Geek vous dit tout.

Créé par le scénariste et dessinateur Jim Starlin en 1973, Thanos fait sa première apparition dans un épisode d’Iron Man, où il fait face à Drax le Destructeur, une créature créée dans le seul but de le détruire. Très influencé par le travail de Jack Kirby sur sa série DC New Gods, Starlin n’hésite pas à y puiser des idées pour son Titan fou. Et avant de crier au scandale, il faut bien comprendre que c’était la façon de faire à l’époque (et que ça n’a d’ailleurs pas beaucoup évolué depuis…). Parfois même, les copies et plagiats se sont avérés être meilleurs que les originaux, comme c’est le cas de Deadpool, qui n’est au départ qu’une repompe éhontée de Deathstroke (DC), jusque dans l’identité du personnage (Slade Wilson pour Deathstroke, Wade Wilson pour DP).

Mais assez parlé de Deadpool, surtout qu’il existe un contentieux entre le mercenaire à grande gueule et le Titan fou, Deadpool ayant eu une aventure fougueuse avec l’amour absolu de Thanos, et nous ne voudrions pas fâcher notre invité de marque dès le premier chapitre de ce dossier.

Ho Ho Ho, Géééééant mauve

Les particularités de Thanos sont nombreuses, et les éléments qui en font un être à part, même dans un univers de colosses en slip qui cassent des petites planètes à coups de poing, ne manquent pas. À commencer par ses origines. Thanos appartient à l’espèce des Éternels, dont les humains ne sont qu’une déviation rachitique et faiblarde.

Il nait sur Titan, lune de Saturne, avec un défaut génétique appelé le Syndrome Deviant. Sa peau est colorée, son menton difforme et ses proportions grotesques. Sa mère tentera d’ailleurs de le tuer à la naissance. Rien de tel pour bien commencer dans la vie.

Pour autant, et comme on l’a appris récemment avec la série limitée Thanos Rising, publiée en 2013, Thanos passe son enfance de façon paisible, à jouer avec son frère Eros et ses animaux de compagnie, tel un gentil petit Titan. Ce n’est que lors de son adolescence qu’il devient emo à tendance gothique, se fascine pour la mort, le nihilisme, et se met à écouter de la cold wave. Il découvre alors que la mort n’est pas juste un état de fait, mais bien un être suprême, et de genre féminin, qui plus est. Le jeune Thanos en tombe alors éperdument amoureux, et c’est là que tout part en sucette.

Hook

Arrivé à l’âge adulte et déjà beaucoup plus puissant que n’importe qui sur sa planète à cause du Syndrome Deviant, Thanos utilise son intellect lui aussi supérieur pour améliorer encore ses capacités. Il apprend la magie et se fait implanter des prothèses internes afin de décupler sa puissance. Puis il décide de tremper son biscuit aux quatre coins de l’univers, fait une chiée d’enfants, et devient un pirate. Parce qu’après tout, pourquoi pas.

Mais rien de tout cela ne lui apporte une quelconque satisfaction, et Thanos tourne en rond, jusqu’au jour où il reçoit une nouvelle visite de Dame Mort (toujours dans Thanos Rising), pour qui il entreprend alors de tuer ses enfants, et le capitaine de son navire. Lui offrir des fleurs eut été tout aussi facile, mais c’est vrai que pour construire un super vilain, c’est pas idéal.

Et c’est à peu près à ce moment-là que Thanos vrille et que commence sa longue descente aux enfers, semée de génocides en pagaille, de destruction massive et de souffrance (celles des autres, mais aussi la sienne). Oui parce que si Thanos est un criminel indéniable, il n’en est pas moins une victime lui-même. C’est ce que nous allons voir dans ce dossier.

Heil Thanos

L’amour que porte Thanos à Dame Mort le rend complètement aveugle et il va réaliser ses pires méfaits dans le seul but de lui prouver qu’il l’aime sans limites. Rien que pour ça ? Oui et non.

Lorsque Thanos fait bombarder Titan (Avengers Annual n°7, 1977), sa planète natale, et engendre la mort de millions d’êtres de son espèce, sa mère comprise, il le fait pour tenter d’impressionner Dame Mort, certes. Mais il le fait avant tout, car il a besoin de se sentir aimé. Il a besoin qu’une figure féminine soit fière de lui, et l’aime sans concessions, comme sa mère en a été incapable. Ce vide qui a grandi en lui tout au long de son existence est réellement ce qui pousse Thanos à tous ces actes innommables. Rien d’autre.

Thanos n’est pas foncièrement mauvais et le manichéisme premier degré des comics n’est évidemment qu’une façade. Personne n’est tout blanc ou tout noir et Thanos est un parfait représentant des conflits internes qui peuvent exister en chacun de nous. Lorsqu’il fait tout pour atteindre le pouvoir suprême, il le fait parce qu’il meurt d’envie d’être reconnu pour ça. Il le fait pour exister, parce que la violence est alors sa seule façon de s’exprimer.

L’amour à mort

Son amour pour Dame Mort n’est qu’une fascination malsaine qu’il espère constamment –mais en vain- réciproque. Le Titan fou n’est rien de plus qu’un enfant perdu coincé dans le corps indestructible d’un des êtres les plus puissants de l’univers. Sans guide, sans la main d’une mère pour lui indiquer la bonne direction. Il est livré à lui-même avec plus de pouvoirs que de raison.
Et ça, Dame Mort le comprend bien. Voilà pourquoi elle ne se montre que très rarement impressionnée par les agissements du Titan, toujours plus fous et toujours plus exagérés, comme la fois où, armé du Gant de l’Infini (Minisérie Infinity Gauntlet, 1991), il claque des doigts et fait disparaître instantanément la moitié des êtres vivants de l’univers. Rien que ça.
Mais même là, Dame Mort ne lève pas un sourcil. Rien. D’autres auraient baissé les bras plus vite.

Mais le guide que cherche inconsciemment Thanos existe bien, et il va le rencontrer plus d’une fois durant ses aventures. Et s’il ne s’agit pas de la Mort, cela reste toutefois une figure biblique majeure.

La Paume d’Adam ?

Thanos est un être complexe, il va donc lui falloir une némésis toute aussi complexe que lui. Et il va la trouver en la personne d’Adam Warlock.

Si les comics Marvel ont une conception bien à eux de la religion, des déités et de leurs(s) implication(s) cosmiques, une chose est claire et indéniable, Adam Warlock a dès le départ été créé comme le Jésus intersidéral. Messie cosmique, Warlock a longtemps possédé la gemme de l’âme sur le front, lui permettant de transcender l’existence même. Son chemin va maintes fois croiser celui de Thanos et les deux êtres surpuissants vont être tour à tour alliés et ennemis. Parfois parce qu’ils lorgneront sur le même objectif, d’autres pour contrecarrer mutuellement leurs plans.

Quoi qu’il en soit, c’est bien Adam Warlock qui aura l’impact le plus fort sur Thanos. Au terme de la saga du Gant de l’Infini (celle-là même qui est en train d’être très librement adaptée au cinéma), au tout début des années 90, Adam Warlock va en effet parvenir à vaincre un Thanos devenu l’égal des dieux, voir supérieur puisque capable de fusionner avec l’univers et la réalité.

Et comment s’y prend Warlock ? Tout d’abord, et même s’il y a peu de chances que cet élément ne transpire au cinéma, nous vous conseillons de sauter le chapitre suivant et de passer à celui d’après, si vous voulez éviter tout spoil potentiel.

Si j’avais une ferme

C’est bon ? Les retardataires sont partis ? Ne restent que les curieux ? Très bien. Donc, Adam Warlock va s’approcher de Thanos et lui révéler une simple réalité : Thanos a toujours perdu parce qu’il possède en lui un désir profond et semi-conscient d’échec. Ne se sentant pas digne des pouvoirs qu’il possède ni à même de régner sur l’univers, Thanos cherche toujours à atteindre le pouvoir ultime, mais fait tout pour le perdre une fois qu’il l’a eu entre les mains.
Cette réalité va ébranler le Titan au plus profond de son être, lui ouvrant des portes mentales qu’il avait jusqu’alors laissées closes. Il abandonnera même son délire de conquête galactique et s’isolera sur une planète verte, où il deviendra simple fermier.

Cette conclusion à l’une des miniséries les plus fantastiques de l’histoire de Marvel est sans doute l’une des meilleures que les comics de super héros aient connues, tant elle est psychologiquement puissante de sens et parfaitement réalisée.

Malheureusement, les scénaristes se succédant sans avoir tous le même amour ou la même compréhension du personnage et de sa psyché profonde, Thanos ne va pas rester bien longtemps à cultiver ses champs…

Démystification

Après ce qui sonnait comme une conclusion parfaite pour un tel personnage, Thanos va donc reprendre du service et repartir explorer l’univers à la recherche de connaissance et de pouvoir (dès 1994, dans la série Secret Defenders). Il va même aller jusqu’à se cloner en mêlant son ADN à celui d’autres personnalités de l’univers Marvel, telles que le Professeur Xavier, Iron Man, Doctor Strange ou encore Galactus, avant de détruire ces clones avec l’aide d’un groupe de super héros (2001-2002).

Ayant beaucoup de mal à trouver sa place dans l’univers, Thanos continue à errer, tantôt sauveur, tantôt tyran, son esprit perdu dans les limbes d’un amour impossible. Car oui, après tout ce temps, toutes ces déconvenues et aucun signe de progression, Thanos est toujours aussi amoureux de la Mort et continue irrémédiablement d’être attiré dans sa direction. Et ce, même quand la Mort elle-même va le rendre immortel, lui interdisant l’accès à son royaume. C’est un peu comme une ordonnance restrictive, mais en version 2.0.

Parce queeeeeee !

Dans une telle configuration, rejeté par la seule créature qu’il n’ait jamais réellement aimée, alors qu’il a tout fait –et plus encore- pour gagner ses faveurs, on peut comprendre (à défaut de cautionner) qu’un être dénué de règles, d’encadrement et d’apprentissage des limites (on ne harcelle pas une personne qui vous dit non, qui qu’elle soit. Non, c’est non.) puisse avoir du mal à tempérer ses accès de colère.

Thanos est donc un personnage à la profondeur insoupçonnée, sans doute même pas son créateur et les premiers auteurs à avoir raconté ses histoires. Et c’est ça qui est fantastique avec les comics, le fait que ces personnages aient une existence propre, par delà ce qui est écrit par leurs auteurs.

Héros ou super vilains, ils ne sont tous que des reflets de nous-mêmes. Des parcelles de notre psyché. Des aspects que l’on embrasse ou au contraire que l’on réfute au possible, mais qui sont bien là, en chacun de nous.

Juste que nous, on a pas la peau mauve.

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