Passer au contenu

[Dossier] Sid Meier’s Civilization : retour sur 25 années de stratégie

0

Initiée par l’inévitable Sid Meier, la franchise Civilization fait partie de ces monstres sacrés – et ils ne sont pas si nombreux – que compte le…

Initiée par l’inévitable Sid Meier, la franchise Civilization fait partie de ces monstres sacrés – et ils ne sont pas si nombreux – que compte le jeu vidéo. Pensez-donc, voilà maintenant 25 ans qu’elle accompagne les rêves de grandeurs des joueurs du monde entier et si aujourd’hui le succès d’un nouvel opus est une évidence pour tout le monde, il n’en était pas de même en 1991. Retour sur les origines et un bon quart de siècle d’histoire du jeu vidéo de gestion / stratégie.

Civilization VI
Civilization VI

En 1982, Sid Meier fonde MicroProse avec son compère Bill Stealey. Ce dernier est un ancien de l’US Air Force et compte tenu de la passion de Sid pour les simulations, les premiers jeux de la jeune société sonnent comme une évidence : ce seront des simulateurs militaires. Ainsi, durant plusieurs années, se sont succédé des titres tels que NATO Commander, F-15 Strike Eagle, Silent Service, Gunship ou bien encore F-19 Stealth Fighter. Sid Meier souhaitait toutefois aller plus loin, découvrir d’autres styles et c’est dans cette optique qu’il mené des projets tels que Pirates! et Covert Action. Le tournant arriva en 1988 alors qu’un certain Bruce Shelley rejoint MicroProse. Durant plusieurs années, Shelley a oeuvré pour un célèbre éditeur de jeux de plateau, Avalon Hill, et il n’est pas surprenant que sa première collaboration avec Sid Meier porte sur un jeu inspiré des créations Avalon Hill, il s’agit de Railroad Tycoon.

Railroad Tycoon
Railroad Tycoon

À la tête d’une compagnie de chemin de fer, le joueur doit la faire prospérer en surveillant ses concurrents. Le succès du jeu donna des idées aux deux compères qui envisagèrent un jeu plus riche, plus complet, plus ambitieux. Difficile à ce niveau de savoir à quel point ils ont été influencés par le jeu de plateau Civilization de Francis Tresham pour Hartland Trefoil / Avalon Hill. Bruce Shelley connaissait bien le jeu et Sid Meier en possédait une boîte, mais ce dernier assure n’y avoir jamais joué avant la sortie de son Civilization. Toujours est-il que le concept est similaire entre le jeu vidéo que nous connaissons et cet éminent représentant du monde du jeu de plateau. Chez Avalon Hill comme chez Sid Meier, il s’agit donc de prendre en main la destinée d’un peuple pour lui faire traverser les épreuves du temps, le développer et repousser les menaces d’autres civilisations.

Le cadre en revanche change sensiblement et c’est à ce niveau que l’influence de Risk – revendiquée par Sid Meier – est plus palpable. En effet, alors que Francis Tresham se limite au bassin méditerranéen de -8000 à -250, Sid Meier voit plus grand et son Civilization se déploie sur l’ensemble de la planète. Par ailleurs, si le temps couvert est plus court – de -4000 à 2100 – il est aussi plus riche et plus dense en changements tant scientifiques que culturels et militaires.

[nextpage title=”Un jeu en constante évolution sur près de 20 ans”]

Largement saluée par la critique, la sortie de Sid Meier’s Civilization en septembre 1991 a été un franc succès. Difficile aujourd’hui d’avoir des chiffres de vente précis, mais le seul fait de voir ensuite Civilization porté sur Amiga 500 et Atari ST (en 1992) puis Amiga 1200 et Super Nintendo (en 1994) est un signe qui ne trompe pas. Civilization a également été adapté aux systèmes Mac OS et même sur PlayStation et N-Gage.

Civilization
Civilization

Esthétiquement parlant, le jeu n’avait rien de renversant et la limite des 16 civilisations découlaient d’ailleurs d’une limitation technique : le mode EGA des PC ne pouvait afficher que 16 couleurs simultanément. Au final, Sid Meier n’a pas utilisé ces seize couleurs, mais la contrainte est un bon exemple des difficultés que pouvaient rencontrer les développeurs de l’époque. En 1991, Civilization n’était d’ailleurs qu’un jeu simple joueur. La mode du multijoueur n’avait pas encore touché tous les genres et surtout pas celui de la gestion / stratégie. En 1995 cependant, MicroProse décida de lancer une version spéciale de Civilization. Baptisée CivNet, celle-ci se caractérisait bien sûr par la présence d’options de jeux en réseau. Il était ainsi possible de jouer en mode hotseat sur une seule machine, mais aussi de participer à des parties en LAN ou en connexion directe.

CivNet
CivNet

De manière assez surprenante, Civilization II qui arriva l’année suivante – le 29 février 1996 sur PC – n’intégrait pas cette remarquable nouveauté. Sid Meier et Brian Reynolds se focalisèrent sur l’aspect esthétique des choses avec une vue complètement nouvelle, plus attractive et plus en phase avec les standards de l’époque. Les rivières n’avaient ainsi plus besoin d’occuper l’ensemble d’un carré de terrain et la topographie des environnements devenaient bien plus lisible.

Au-delà de cela, Civilization II intégrait quantité de nouveaux concepts parmi lesquels la puissance de feu et les points de vie. Les combats ne se décidaient plus sur un simple “jet de dé” lié à la puissance de base des unités, mais devait prendre en compte plusieurs facteurs. L’idée était ici qu’un lancier n’ait plus qu’une infime chance de vaincre un char d’assaut et de parvenir à un meilleur équilibre. Civilization II a aussi capitalisé sur le succès du premier volet en se contentant d’enrichir certains aspects du jeu. Les technologies sont par exemple plus nombreuses, tout comme les unités disponibles et les merveilles. Les habitués se souviendront d’ailleurs de certains ratés dans ce domaine avec un Atelier de Léonard bien trop puissant !

Civilization II
Civilization II

Au milieu des années 90, la mode des extensions toucha Civilization II. Alors que le premier opus de la franchise est resté inchangé durant cinq années, Civilization II connut pas moins de quatre extensions officielles ! Conflicts in Civilization se contenta d’ajouter quelques scénarios. Fantastic Worlds s’est focalisé sur l’amélioration de l’éditeur de scénarios. La Multiplayer Gold Edition signait le retour des modes multijoueurs (courriel, hotseat, réseau local, Internet). Enfin, la version Test of Time devait être l’aboutissement de la franchise avec une refonte esthétique qui n’a pas forcément convaincu les fans.

Sorti en octobre 2001, Civilization III est lui aussi un titre controversé. Pour de nombreux habitués de la franchise, il s’agit du plus mauvais des épisodes. Ils ont été marqués par les nombreux bugs et autres imperfections du lancement ainsi que par l’absence de certaines des nouveautés mises en place par Sid Meier’s Alpha Centauri (1999), un jeu dans le style de Civilization, mais axé sur la colonisation d’une exoplanète. Pourtant, Civilization III est à l’origine de l’intégration de la “culture” dans les mécaniques de la franchise. La notion de frontière et la possibilité d’atteindre des victoires pacifiques comptent parmi les plus belles réussites d’un opus que les fans ont rapidement oublié.

Civilization III
Civilization III

Il faut dire que dès 2005, Firaxis et 2K Games – depuis peu partenaires – lancent Civilization IV, considéré par beaucoup comme l’épisode de la consécration. Sur le papier, les changements ne paraissent pourtant pas si nombreux, mais c’est la cohérence de l’ensemble du jeu qui est alors saluée. Les amateurs retrouvent ainsi rapidement leurs marques et peuvent profiter des progrès réalisés sur l’intégration de la religion, la mise en place du nouveau système de doctrines et une bien meilleure gestion des parties multijoueurs. Sur ce dernier point, il faudra tout de même attendre la sortie de la seconde extension – Beyond the Sword – qui apporte un surcroît de stabilité bienvenu. Cette extension est aussi l’occasion de revenir sur quelques bugs gênants et ainsi de parfaire le chef d’oeuvre de Firaxis.

Civilization IV
Civilization IV

[nextpage title=”Civilization V, une petite révolution”]

S’il a sans doute ravi le studio, le succès remporté par Civilization IV a toutefois posé un problème à Firaxis. Comment lui donner une suite sans risquer de décevoir les fans ? Comment améliorer encore le concept sans le dénaturer ? Pour trouver la réponse à cette double et épineuse question, l’équipe de Sid Meier a confié le game design à Jon Shafer dont l’objectif a été de refondre de nombreux éléments du jeu. Bien sûr, le concept à la base de Civilization V ne change pas radicalement de ce que les joueurs connaissent, mais la majorité des mécaniques de jeu ont été revues en profondeur.

Civilization V
Civilization V

En premier lieu et c’est évidemment ce qui frappe tous les habitués de la franchise, on passe d’un système de tuiles carrées à un découpage en hexagones de la carte principale. Emprunté aux wargames, ce système a de multiples avantages en premier lieu desquels, une représentation homogène du terrain. Il n’est plus question d’aller plus rapidement en empruntant les diagonales puisqu’il n’y a plus… de diagonales ! Mieux, cette nouvelle division de l’espace s’accompagne d’une gestion plus pointue des unités. Les stacks of doom ou piles de la mort dans la langue de Molière appartiennent au passé : chaque unité militaire occupe maintenant l’ensemble de sa tuile et il n’est donc plus possible d’en rassembler vingt-cinq sur une seule case.

Ces modifications imposent de revoir complètement ses stratégies militaires et Civilization IV prend immédiatement un violent coup de vieux. Les joueurs doivent prendre en compte le relief du terrain, mais aussi gérer les lignes de front et la portée des unités. Jamais un Civilization n’avait été aussi intéressant militairement parlant, et ce, même s’il faut attendre la seconde extension – Brave New World en mars 2013 – pour voir l’intelligence artificielle plus en phase avec ces nouvelles possibilités. Une I.A. qui reste d’ailleurs le maillon faible du cinquième opus : incapable de bien gérer les unités qui ne sont pas directement au front, elle pêche aussi côté diplomatie ou accords avec les cités-états.

Brave : New World
Brave : New World

Les cités-états justement viennent apporter un peu de sang neuf aux relations internationales de Civilization. Il s’agit en quelque sorte de factions mineures dont le développement est limité, mais qui peuvent fournir d’intéressants bonus à leurs alliés. Un nouveau système de doctrines a été mis en place, mais il faut bien le reconnaître, c’est peut-être l’un des aspects les moins convaincants de cet opus qui aura pris son temps, mais qui est finalement parvenu à se faire une place dans le cœur de fans qui lui ont longtemps préféré Civilization IV. Aujourd’hui, les deux épisodes font office de référence, chaque ayant ses avantages et ses inconvénients.

[nextpage title=”L’avenir, Civilization VI”]

Si Firaxis avait attendu cinq ans pour nous proposer une suite à Civilization IV, il aura cette fallu attendre encore une année supplémentaire pour voir le studio américain évoquer un sixième opus. Un épisode qui devrait débouler le 21 octobre prochain et, là encore, apporter un certain nombre de nouveautés pour relancer notre intérêt. Nous n’avons pas encore pu nous essayer très longuement au jeu, mais il ne semble pas question de revoir autant les mécaniques de jeu que ce fût le cas pour la sortie de Civilization V.

Civilization VI 1

Firaxis a bien sûr conservé le désormais indispensable découpage en hexagones et la gestion des unités militaires, des lignes de front et des combats est assez similaire. Civilization VI devrait toutefois se démarquer par une gestion inédite des villes… Enfin inédite, le terme est un peu fort, disons qu’elle s’apparente un peu à celle d’Endless Legend. Il n’est donc plus question “d’empiler” les bâtiments dans ses villes. Ces bâtiments se construisent via des districts qui se trouvent à l’extérieur de la cité et sont directement sous la menace de nos ennemis.

Dans le même ordre d’idée, les merveilles du monde se construisent elles aussi à l’extérieur des villes et nécessitent maintenant diverses conditions de construction. Il peut y avoir des conditions de placement géographique – le Grand Phare doit être sur le littoral – mais aussi des conditions logistiques – Stonehenge a besoin d’une source de pierres à proximité de son site de construction.

Civilization VI_1

Nous aurons l’occasion de revenir sur le cas Civilization VI dès lors que le jeu sera effectivement disponible, mais évoquons déjà le tout nouveau système de gouvernements. Celui-ci se base sur des “cartes” de différentes natures que l’on peut débloquer et activer en fonction de nos envies. Sauf que bien sûr, il y a des contraintes et certaines formes de gouvernement ne permettront par exemple pas d’activer trois ou quatre cartes militaires à la fois ! Du choix de la forme de gouvernement dépend donc le type et la quantité de cartes que l’on peut activer pour modifier son régime politique.

Par le passé, des voix se sont élevées pour critiquer certains des choix opérés par Firaxis. Reste qu’on ne peut pas reprocher au studio de ne pas tenter de nouvelles choses. Les Américains ne se reposent pas sur leurs lauriers et les promesses de Civilization VI confirment cet état d’esprit qui, nous l’espérons de tout coeur, se concrétisera à la sortie de ce nouvel opus le 21 octobre prochain. Longue vie au roi du jeu de stratégie au tour par tour !

🟣 Pour ne manquer aucune news sur le Journal du Geek, abonnez-vous sur Google Actualités. Et si vous nous adorez, on a une newsletter tous les matins.

Mode