La dernière fois que nous plongions notre regard dans le Top 10 de Prime Video, c’était pour le catastrophique, et le mot est faible, Le Jardinier. Néanmoins, il faut savoir pardonner – à la plateforme de streaming, pas au réalisateur David Charhon qui est mort à nos yeux – et on a à nouveau voulu savoir si le service de SVoD avait une petite pépite récente en réserve. Et soudain, Jude Law à moustache ! Parce que oui, parfois, la vie est faite de choses simples et il nous en faut pour être heureux.
Plus sérieusement, The Order a bien plus à faire valoir que la pilosité faciale de son acteur principal. Déjà, parce qu’on peut également y voir sa pilosité abdominale, mais surtout parce que son ambiance sentait bon le polar âcre dans la veine des scénarios de Taylor Sheridan (Sicario, Comancheria, Yellowstone…) tout en abordant un sujet hautement politique dans le climat délétère actuel : le néonazisme.
![The Order](https://www.journaldugeek.com/app/uploads/2025/02/the-order.jpg)
Inspiré d’une histoire vraie, le film se déroule dans les années 80 avec un Jude Law, agent du FBI muté dans une petite bourgade américaine. Une série de braquages et d’actes terroristes va bientôt le mettre sur la route d’une milice de suprémacistes blancs préparant le terrain pour une révolution. Cette dernière est menée par Bob Matthews (Nicholas Hoult) un jeune homme charismatique et intelligent dont l’inaction de ses pairs a fini par le pousser vers l’extrémisme.
Pourquoi il faut le voir ?
On s’en est amusés au début de cet article, toutefois, il faut prendre la chose au sérieux : oui, la présence de Jude Law est l’une des raisons de se laisser tenter par le projet. Simplement parce que l’acteur est capable de faire exister son personnage entre les lignes d’un scénario qui ne fait que l’esquisser. On dit souvent que le cinéma est l’art de l’image et il suffit de voir comment le comédien occupe l’espace pour en apprendre dix fois plus sur les démons qui le hantent que via les quelques éléments de dialogues qui l’entourent.
The Order peut être vu comme deux faces d’une même pièce où les deux protagonistes principaux sont autant complémentaires qu’ils ont chacun la charge d’une part importante de l’identité du film. Les silences évocateurs de Jude Law permettent au métrage d’être dans la lignée des thrillers âpres où la tension de l’intrigue est contenue dans des corps prêts à exploser à tout moment. De l’autre, on retrouve Nicholas Hoult en chef de milice néonazi dont le visage d’ange et la belle parole vont porter la réflexion au-delà des frontières du film.
C’est là l’intelligence d’un récit qui sait poser le regard sur chacun des camps pour émettre un jugement tout en dévoilant les mécanismes de pensée. De sorte que ce qui se passe ici dans les années 80 trouve un écho facile dans les événements qui ont bousculé récemment la société américaine et plus largement les politiques dans le monde.
Néanmoins, il ne faut pas non plus voir le verre plus plein qu’il ne l’est, car si The Order a cette belle intention, le propos n’est qu’en surface, la faute à un scénario qui doit constamment aller de l’avant. De sorte qu’on ait le sentiment que cela aurait mérité, peut-être, de changer de format pour une mini-série. Cela lui aurait permis de non seulement assumer frontalement le discours politique, mais aussi de faire exister davantage des personnages secondaires cantonnés aux rôles de suiveurs des deux « gourous ». On pense notamment à ce pauvre Tye Sheridan, que le scénario cantonne à un rôle fonctionnel afin d’appuyer les pertes de son mentor. Pareillement, il aurait été appréciable d’avoir plus de temps pour approfondir certaines relations, comme celle du leader (Hoult) avec son père.
![The Order (2)](https://www.journaldugeek.com/app/uploads/2025/02/the-order-2.jpg)
Le film fonctionne également, car Justin Kurzel (Macbeth, Assassin’s Creed), bien aidé par son frangin Jed Kurzel à la composition et Adam Arkapaw à la photographie, parvient, tout simplement, à signer ce qu’on attendait de lui au premier degré : un polar d’action. C’est beau, ça sent la poudre et on retient notre respiration sur quelques séquences malgré un final un peu trop facile. L’esprit du film convoque pas mal d’œuvres passées, de True Detective à Heat, sans jamais chercher à copier. On profite autant des moments de calmes qui font avancer l’enquête ou la funeste entreprise de la milice, que des pures séquences où les armes parlent.
The Order manque peut-être d’une profondeur globale pour marquer les esprits sur le long terme, mais dans la flopée d’œuvres de remplissage sans âme dont les plates-formes de streaming nous abreuvent, on est ravis de voir que non seulement ce genre de proposition plus cinématographique existe et, surtout, qu’elle rencontre le succès mérité, à la bonne place du Top 10 de Prime Video. Si ça peut nous éviter un Jardinier 2…
🟣 Pour ne manquer aucune news sur le Journal du Geek, abonnez-vous sur Google Actualités. Et si vous nous adorez, on a une newsletter tous les matins.