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The Handmaid’s Tale : la dernière saison est-elle à la hauteur ?

Après trois ans d’absence et alors que la fin approche, la série adaptée du roman de Margaret Atwood est-elle toujours la dystopie glaçante que l’on adorait ? Nous avons vu les quatre premiers épisodes.

“Nolite te bastardes carborundorum”. The Handmaid’s Tale tire sa révérence. La série de Bruce Miller entame aujourd’hui son ultime tour de piste, après six saisons riches en rebondissements et traumatismes. Si elle n’a pas fait montre d’une efficacité sans faille la série consacrée à June Osborn peut se targuer d’avoir gardé l’attention de ses spectateurs (pas tous) jusqu’à son dénouement. Nous avons vu les cinq premiers épisodes de la saison 6. The Handmaid’s Tale fait-elle un retour en grâce ?

“Ils n’auraient jamais dû nous donner d’uniformes s’ils ne voulaient pas que nous soyons une armée”. 

Loin de Gilead, mais dans un Canada fracturé entre les supporters du régime patriarcal et les défenseurs des réfugiés, June Osborn caresse toujours l’espoir de retrouver sa première fille. Le temps lui est compté, Hannah approche dangereusement de l’âge qui fera d’elle une Servante ou une Épouse. Le dernier épisode de la saison 5 montrait l’héroïne dans un train en partance pour l’ouest, alors que ce qu’il reste du gouvernement américain n’a plus le soutien des autorités canadiennes. Avec Nichole dans les bras, June croisait la route de Serena Joy, elle aussi en fuite avec Noah. Les deux ennemies se retrouvaient face à face, avant ce qui s’annonçait comme un ultime affrontement.

June Osborn The Handmaid's Tale
© Hulu

La saison 6 débute exactement là où on avait laissé les deux personnages. Gilead faisait sortir de terre New Bethlehem, terre d’asile pour les réfugiés qui ne souhaitent pas se soumettre aux règles strictes édictées par les fils de Jacob. Une révolution était en marche, celle d’une Serena Joy qui croit encore en la vision de son défunt mari et celle d’une June prête à tout pour soustraire sa fille et toutes les autres Servantes à leur “devoir divin”. C’est dans cette opposition des deux figures féminines que la série était attendue au tournant. Sera-t-elle capable d’offrir une conclusion à la hauteur du chemin parcouru ? 

“C’est June, tu connais mon p***** de nom” 

Les personnages incarnés par Elisabeth Moss et Yvonne Strahovski sont le point d’ancrage du récit, et cette saison l’a bien compris. Avec plus ou moins de subtilité, les premiers épisodes de cette nouvelle salve ajoutent de la nuance à leurs parcours. Elles sont toutes les deux des révolutionnaires : June l’affranchie et Serena l’emblème réformiste. La série s’attarde aussi à raconter comme les symboles qu’elles représentent sont utilisés par les hommes pour atteindre leur but, The Handmaid’s Tale continue d’être une chronique sans concession d’une masculinité écrasante. Si les dialogues ne s’embarrassent plus de subtilité, au point de clamer haut et fort les ambitions des scénaristes, force est de constater que le parallèle entre les deux personnages reste la grande réussite de cette adaptation. Leurs rencontres sont toujours passionnantes.

Nick Blaine The Handmaid's Tale
© Hulu

Au détour d’une scène du premier épisode, dont on taira les détails, la série retrouve même son sens de la dramaturgie. C’est précisément ce qui manquait aux épisodes précédents, quand la série avait le mauvais goût de trop se regarder en misant sur de nombreux effets de style (les ralentis) pour accompagner ces moments forts. Lorsque June massacrait le Commandant Waterford, les premières notes de “You Don’t Own Me” par Leslie Grove étaient de trop. À certains égards, la série mise plus sur l’horreur brute que l’effroi stylisé et esthétisé à outrance. L’horreur du quotidien… et un peu d’espoir. Si cela ne l’empêche pas de verser trop souvent dans le mélodramatique, de manquer de subtilité dans la forme comme dans le fond, il y a définitivement du mieux. June est plus nuancée, Serena aussi… mais on repassera pour les développements de Luke ou Moira, aux fraises depuis la saison 3. La série a d’autres chats à fouetter.

Moira Sacrifiée
© Hulu

Les oranges de la colère

Cette saison doit, outre le parcours de ses héroïnes, faire avancer Gilead vers sa chute ou sa suprématie. La fin de la saison 5 montrait le régime sur le fil du rasoir, entre le soutien inattendu de citoyens canadiens et l’importance grandissante de Mayday. La saison 6 se consacre ainsi à raconter comment les fils de Jacob marchent vers un avenir incertain, multipliant les voyages dans les coulisses du régime. À Jézabel où les Hauts Commandants jouent à celui qui a la plus grosse ou auprès des fondateurs de New Bethlehem, les cinq premiers épisodes ne manquent pas d’arguments pour nous convaincre qu’on a finalement eu raison de ne pas abandonner.

Et pourtant, ça n’a pas été une partie de plaisir. Si les premières saisons surprenaient par leur caractère introspectif, les suivantes se sont enlisées dans un magma de considérations politiques captivantes, mais dont la série a eu bien du mal à tirer profit. Nombreux allers-retours, longueurs et surtout dialogues utilitaristes, The Handmaid’s Tale semblait ne jamais s’être vraiment remis de son basculement vers l’invention. Lorsque la série n’a plus eu l’opportunité de s’appuyer sur les écrits de Margaret Atwood, elle n’est pas parvenue à naviguer entre ses considérations politiques, ses envies de plus franche rébellion et ses enjeux à taille humaine. Sur le papier, pourtant, tout n’était pas indigne d’intérêt. The Handmaid’s Tale semblait aussi vouloir retarder l’inévitable : la fin. 

Serena Joy Waterford
© Hulu

Les scénaristes ont freiné des quatre fers, et certains pans de l’intrigue ont multiplié les allers-retours et les facilités narratives. C’est le cas du rapprochement entre Tuello et Nick, qui constituait l’un des éléments centraux des dernières salves d’épisodes. Cette propension de la série à créer artificiellement du suspense se retrouve aussi dans la saison 6, alors qu’elle n’a que dix petits épisodes pour atteindre la ligne d’arrivée.

On lui pardonne bien volontiers, tant la promesse d’enfin découvrir la conclusion des aventures de June se suffit souvent à elle-même. À mi-parcours, on craint toujours de voir quelques personnages injustement relégués au second plan et quelques arcs narratifs conclus dans la hâte. On espère que June et Serena profiteront d’un final à la hauteur de leur importance pour la pop culture.

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