N.B : l’article qui suit contient quelques spoilers.
Créé par Noah Hawley (Fargo version télévision) en 2017, Légion narre l’histoire de David Heller. Un jeune homme qui n’est autre que le fils schizophrène du professeur Xavier et qui présente des problèmes mentaux depuis son enfance. Dès son pilote, la série réussissait à proposer quelque chose de fondamentalement différent et ô combien ambitieux. Le personnage, enfermé à l’intérieur d’un asile psychiatrique, y faisait une étrange rencontre qui allait remettre en question sa vision de la réalité. Et si les voix que David entendait ne découlaient pas seulement de son esprit ? Et si les hallucinations qu’ils voyaient ne provenaient pas de sa supposée démence et que ce dernier n’était pas complètement fou ? Tel était le postulat de départ du show.
A la fin du dernier épisode de la saison 1, David réussissait à expulser le Roi d’Ombre de son cerveau, un super-vilain qui manipulait son esprit. Avant de se voir capturé par une mystérieuse capsule volante en guise de cliffhanger final. Dans le premier épisode de la saison 2, on retrouve le jeune homme, visiblement libéré de son étrange geôlier. Mais le jeune mutant ne semble pas savoir pour autant combien de temps il a disparu ni ce qui lui est vraiment arrivé. Une reprise aussi énigmatique que la série elle-même.
Vol au-dessus d’un nid de coucou
Dès les premières minutes, une voix off déclare : “Tu es désormais dans le labyrinthe. Tu ne peux pas t’échapper.” Deux phrases qui semblent marquer toutes les intentions de Noah Hawley. Intentions qui vont contaminer l’intégralité de cette introduction de la deuxième année de Légion.
Apprécié en partie pour ses passages lunaires et atmosphériques, le show parait de ce fait prendre un malin plaisir à volontairement perdre son audience dans des effets de mise en scène et de procédés narratifs totalement déroutants malgré leurs inventivités de chaque instant. En témoigne ce passage où le concept même de la folie est matérialisé à l’écran à l’aide d’une somptueuse allégorie visuelle et narrative. En mélangeant une animation à l’esthétique d’estampes japonaises et des prises de vues réelles, la scène offre un moment à part où les troubles mentaux épousent alors une virtuose mise en abîme. La métaphore de l’œuf et l’opposition entre le poussin malade et celui encore sain en guise d’exemples de ce qu’est une idée délirante procurent à cet instant précis une tout autre dimension à la série. Comme une parenthèse tour à tour poétique, psychanalytique et inquiétante. Une véritable démonstration de savoir-faire.
Envoûtant, pour toutes celles et ceux qui seront réceptifs au ton si particulier de la séquence. Et pour les autres qui voudront bien en faire l’expérience et pratiquer l’effort de s’y abandonner.
Flashdance et confusions
Ces moments “autres”, Légion en recèle de nombreux. Mais cette force qui fait en grande partie l’identité du show constitue aussi ses limites. Comme si son créateur, conscient de sa liberté artistique et de sa propre supériorité créative, abusait du procédé jusqu’à l’excès. Le climax du premier épisode de la saison 2 illustre assez bien ce problème tout relatif lors d’une battle de danse entre David et son antagoniste. Durant près de quatre minutes, c’est à une scène qui frôle plus d’une fois le ridicule que l’on assiste. L’équilibre jusqu’à alors maintenu dans la tonalité en vient à se rompre pour virer à l’auto parodie satisfaite. Si, sur le papier, l’idée pourrait cependant parfaitement fonctionner, elle se montre dans son exécution trop sibylline et grotesque pour convaincre la majorité. En rejetant l’émotion au profit d’une réalisation épurée qui évoque une risible performance d’art contemporain, les images se voient ôter de leur vie pour basculer dans l’abstraction.
L’ouverture de la seconde saison de Légion ne devrait donc pas, une nouvelle fois, attirer le grand public. Bien au contraire. En revanche, elle devrait potentiellement renforcer l’audimat réceptif à ce genre de proposition singulière. Encore plus jusqu’au boutiste que sa première saison, cet épisode introductif assoit encore davantage le statut hermétique de l’oeuvre. Si on peut lui reprocher bien des choses, à commencer par cette tendance presque trop ostentatoire à vouloir être différente du reste de la concurrence au lieu de prôner sa différence par l’universalité, on ne peut enlever à Légion de posséder la qualité de ses défauts.
L’aspect parfois grotesque et prétentieux du show en fait également toute sa puissance et, chose rare, en décuple toute sa précieuse originalité. Une anomalie à saluer plus que de raison dans un paysage télévisuel et cinématographique trop souvent gangrené par un sens artistique devenu particulièrement consensuel (Iron Fist, The Defenders,…).
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J’ai adoré le coté déjanté à la première saison, mais là je trouve ça redondant… On a du mal à suivre… J’ai vu les 3 premiers, et je cherche l’intérêt… en espérant que la suite soit plus explicite.