Cyberpunk 2384
L’intrigue propulse le spectateur plus de 300 ans dans le futur. L’humanité est parvenue à numériser la conscience humaine, à l’aide d’une puce placée dans la colonne vertébrale, permettant ainsi aux êtres humains de changer de corps comme l’on change de chemise.
La mort n’est désormais plus qu’une banale formalité. Ce progrès sans précédent dans l’histoire de l’humanité a surtout permis aux inégalités de s’accroitre et aux plus riches de devenir encore plus puissants, à tel point que l’immortalité pousse certains à jouer aux Demi-Dieux. Car si la mort peut être repoussée, elle n’en reste pas moins une réalité. Détruisez la puce et il n’y a pas de retour possible. Pour se prémunir de disparaître à tout jamais, les plus fortunés peuvent garder une copie de leur conscience.
Mais loin de l’Olympe artificiel qui surplombe l’oppressante Bay City (anciennement San Francisco), le spectateur va surtout assister aux bas-fonds de la dystopie dépeinte dans Altered Carbon. On suit Takeshi Kovacs, un ex-rebelle ayant défié le pouvoir en place, qui après une peine de prison de 250 ans est ramené à la vie par Laurens Bancroft, l’homme le plus riche du monde. En échange d’une amnistie et d’un salaire plus que convenable, Takeshi doit résoudre un meurtre inhabituel, celui de son nouvel employeur.
Et dans un monde où l’on peut changer entièrement de corps en deux temps trois mouvements, inutile de dire que les apparences sont rapidement trompeuses.
Un scénario simple mis en valeur par un rythme maîtrisé
Vous l’aurez compris, Altered Carbon ne nous invite pas tant à suivre son intrigue policière somme toute simple et déjà vue, qu’à nous interroger sur notre rapport à la mort. Mourir n’est plus une fatalité, mais un droit. Là où la grosse majorité de la population est prête à tout pour ne plus décéder, comme s’affronter dans des combats à mort (temporaire) dans l’espoir d’obtenir un corps de meilleure qualité, certains comme les Catholiques reprogramment leur puce pour que leur conscience ne soit pas transférée à leur mort.
Bien que le scénario ne soit pas forcément complexe ou original, il jouit d’une narration maîtrisée. Déjà aperçue à l’écriture de Shutter Island et à la production d’Avatar, Laeta Kalogridis parvient, en tant que showrunner de Altered Carbon, à livrer une histoire crédible sans précipitation ni lenteur. Hormis un épisode flashback qui arrive assez tard dans la saison, le déroulement de l’intrigue suit son cours de manière régulière. Altered Carbon réussit à éviter la traditionnelle baisse de rythme en milieu de saison qui touche une majorité des séries TV, telles que American Gods, The Walking Dead ou Mr. Robot.
D’autant qu’à l’inverse des séries Marvel où une scène d’action ressort à chaque saison (au hasard, la rixe filmée en plan-séquence dans l’escalier dans la saison 2 de Daredevil), chaque épisode de Altered Carbon comprend son lot de combats et autant de mises en scène différentes. On passe ainsi du huis clos sanglant dans un ascenseur à une scène de gun-fu (popularisée par John Wick et le cinéma de John Woo) dans un laboratoire.
Les lecteurs de l’oeuvre de Richard K. Morgan pourront cependant reprocher à la série d’avoir fait l’impasse sur plusieurs éléments de l’intrigue originelle, tels que le traitement des Envoys (la faction rebelle).
En revanche, Altered Carbon souffre d’une certaine inégalité dans l’écriture de ses personnages. Bien que Joel Kinnaman (Suicide Squad, House of Card) soit juste dans son interprétation de Takeshi Kovacs, le personnage principal est l’archétype du héros qui ne croit plus en rien, mais qui va petit à petit se lier à de nouvelles personnes. De même, plusieurs personnages secondaires tombent dans le cliché du sidekick plus comique qu’utile à l’intrigue. Ce souci d’écriture est heureusement rattrapé par le jeu des acteurs qui est globalement bon.
Blade Runner puissance 10
Le véritable point fort d’Altered Carbon est a dénicher du côté de l’ambiance et de la mise en scène. Les dix épisodes de la série sont du véritable sucre pour tous les amateurs d’univers cyberpunk. La série ne se prive pas de multiplier les plans tout aussi impressionnants que superbes.
L’ambiance poisseuse, violente et sombre est sublimée par un jeu de lumière efficace et une belle photographie, qui mélange souvent les filtres rouge et bleu, signée à quatre mains par Martin Ahlgen (House of Cards) et Neville Kidd (Sherlock).
Pour ce qui est de la musique, la bande-originale composée par Jeff Russo se fait discrète. Elle n’en est pas moins dotée de deux belles reprises de Ain’t No Grave et God’s Gonna Cut you Down de Johnny Cash.
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