Les super-héros lui doivent beaucoup, la pop culture aussi. Depuis sa création en 1919 sous la plume de Johnston McCulley, Zorro s’invite très régulièrement sur le petit et le grand écran. Entre la série Disney de 1957 et le diptyque porté par Antonio Banderas, le masque et l’épée du cavalier qui surgit hors de la nuit a inspiré de nombreux artistes. Du propre aveu de Bob Kane, créateur de Batman, Bruce Wayne et son alter ego sont largement façonnés à partir des aventures de Don Diego et son “renard masqué”.
C’est désormais à France Télévisions et Paramount+ de s’emparer de l’imagerie de Zorro pour une série qui se veut ambitieuse, mais pas trop sérieuse… Sous l’impulsion de Benjamin Charbit et Noé Debré, Jean Dujardin enfile le costume pour incarner une version plus âgée du personnage.
Il y a vingt ans, Don Diego de la Vega a raccroché son costume et son épée en faisant le vœu de vivre tel un honnête homme. Dans l’ombre d’un père exigeant, il attend avec impatience que ce dernier lui confie les clés de la ville. Il a la ferme intention de faire prospérer Los Angeles, de mener des chantiers qui permettront à la cité de devenir un havre de paix pour tous ses habitants. Mais quand un riche homme d’affaires construit un casino et dépouille les citoyens de la ville, Diego n’a d’autre choix que de reprendre du service. Reste que conjuguer une vie maritale, de personnalité publique et une identité secrète n’est pas chose aisée…
“Ciel, l’amant de ma femme !”
Dès les premiers instants, la série plante le décor. L’aventure ne sera pas reine, il s’agira surtout de mettre en scène un héros vieillissant et hanté par les fantômes de son passé. Il ne veut plus se battre, rechigne à renfiler son costume, mais n’a pas perdu la main pour autant. Cette double personnalité, qui était autrefois une bénédiction, s’est peu à peu muée en malédiction. Don Diego veut exister loin de tout son attirail, mais se confronte à la morosité de son quotidien.
Son mariage bat de l’aile, son peuple n’a pas confiance en lui et ses adversaires politiques mènent la danse… Il n’y a que le bon vieux Sergent qui reste fidèle au poste, il traque le justicier masqué avec la même envie que vingt ans plus tôt. Au travers de toutes ses intrigues et sous intrigues, la série veut évoquer la difficulté de vieillir autant que de vivre dans l’ombre d’un double plus mystérieux et captivant. C’est d’ailleurs le couple que Don Diego forme avec Gabriella qui sera au cœur du procédé narratif.
Tandis que la monotonie a remplacé la passion des premiers jours, l’épouse de Don Diego trouve du réconfort auprès d’un Zorro qui ne recule pas devant l’obstacle et qui incarne l’aventure et le danger. Plus proche de la série portée par Guy Williams que des récentes propositions cinématographiques, Zorro s’illustre comme une comédie de tous les instants. La série multiplie les situations ubuesques, les quiproquos et les interactions absurdes pour questionner le héros dans toute son ambiguïté.
La série porte un regard acide sur le choix du secret, et c’est sans doute là qu’elle trouve sa force. Après avoir mené son épouse en bateau pendant des années, Don Diego doit composer avec la difficulté de mener une double vie lorsque son épouse préfère l’homme qui se cache derrière le masque à celui qui partage son lit. On aurait aimé que les scénaristes se montrent plus cruels à l’égard d’un De la Vega prêt à tout pour ne pas dire la vérité. Le personnage Gabriella est d’ailleurs le seul à profiter d’un véritablement développement, le reste de la distribution devant se contenter d’une narration qui fait du surplace.
Un Z qui veut dire…
Si certaines séquences s’avèrent particulièrement réussie, comme lorsque la mort d’un personnage permet à son ennemi de remettre leur relation en perspective, force est d’admettre que la création de Charbit et Debré tourne vite en rond. L’intention des deux créateurs est louable, mais pèche dans son exécution. Le volet politique est à peine brossé, la série préférant mettre son énergie au service de retournements de situation plus improbable les uns que les autres.
Entre drame, comédie et récit d’aventure, Zorro s’éparpille et l’épée du justicier paraît plus que jamais émoussée. Les huit épisodes que nous avons pu voir avancent à un rythme effréné et sacrifient toute la portée émotionnelle de leurs intrigues qui pourtant auraient pu ajouter à la mythologie. Le personnage n’a que très rarement été montré dans la fleur de l’âge, et bien qu’assez convenue, l’idée de montrer un justicier vieillissant pouvait séduire. Reste que face au Masque de Zorro de Martin Campbell, avec un Anthony Hopkins lui aussi confronté au poids des années, cette nouvelle proposition fait pâle figure.
“J’aime (plus) de me battre”
Ce n’est pas la première fois que Jean Dujardin incarne Zorro sur le petit écran. En 2011, sous la direction d’Eric Judor, l’acteur français se prêtait déjà l’exercice pour les besoins de la série Platane. À l’époque, c’est surtout l’envers du décor qui est évoqué. Cette apparition a néanmoins été l’occasion de prouver que l’acteur avait l’étoffe d’un héros, qu’il pouvait s’emparer de cette figure légendaire. Et il faut bien avouer qu’il ne démérite pas. Dujardin parvient à donner corps à Zorro et Don Diego, bien aidé par des dialogues ciselés et inspirés. Gregory Gadebois et Eric Elmosnino brillent aussi par le sens du tempo comique, leur maîtrise de la théâtralité du scénario. Dans l’ensemble, Zorro convoque une galerie de solides artisans du divertissement, mais ne leur fait honneur qu’à de très rares occasions.
Tous les ingrédients sont pourtant réunis, à commencer par un méticuleux travail des décors et costumes. Paramount+ et France Télévisions ont été inspirés en déplaçant les équipes de tournage vers l’Espagne, terre d’accueil des Western Spaghetti. Devant la caméra d’Emilie Noblet et Jean-Baptiste Saurel, Zorro se montre finalement particulièrement généreux. L’univers est fourmillant de détails, les scènes de combat sont bien chorégraphiées et la mise en scène rend hommage à l’immensité des paysages qu’elle immortalise. Tandis qu’il passe son temps à tenter de s’extraire de son rôle de justicier, Don Diego revient toujours avec son fidèle destrier pour offrir les tant attendues confrontations qu’il mène à la pointe de son épée. Toute l’imagerie du personnage, largement inspiré de la série de Disney, est convoquée et avec un certain savoir-faire.
Mais alors, qu’est-ce qui cloche ?
Après les huit épisodes qui constituent la première, et sans doute unique, saison, force est d’admettre que Zorro nous laisse un goût amer. On peut applaudir l’ambition des créateurs Benjamin Charbit et Noé Debré, qui se sont emparé de la mythologie pour la réinventer dans un bel écrin. D’un autre côté, on se demande si tout cela en valait vraiment la peine. La série aborde autant de belles idées qu’elle en piétine. C’est particulièrement vrai concernant la manière dont le récit veut écorcher le mythe héroïque, tout en plongeant tête baissée dans les nombreux clichés que les pastiches convoquent. Lors d’une conférence de presse, les équipes du film ont de nombreuses fois évoqué la schizophrénie de Don Diego. C’est aussi le mal dont souffre la série qui n’arrive jamais à naviguer entre ses envies de parodie et d’hommage.
L’on veut montrer Zorro dans toute sa réalité, désacraliser le justicier en brisant le mythe entourant ses disparitions, faisant crisser le cuir de son pantalon et accentuant son égocentrisme et son désir irrépressible d’être aimé. Dans le même temps, la série fait reposer l’évolution de ses personnages sur des idées saugrenues. Cette dualité d’approche créé une dissonance cognitive, nuit à la suspension d’incrédulité. La tension dramatique repose sur des événements vaudevillesques, les enjeux du récit manquent d’ampleur et la figure de Zorro est malmenée. La série se prend trop au sérieux pour nous faire rire franchement, pas assez pour nous divertir et nous surprendre.
Ce sentiment est renforcé par le choix d’une intrigue étalée sur plusieurs épisodes plutôt qu’un cloisonnement net, à la manière de la série portée par Guy Williams. Une narration plus longue, sur une dizaine d’épisodes, aurait sans doute permis de construire plus savamment la portée émotionnelle. C’est d’autant plus frustrant que le dernier épisode encapsule tout ce que l’on était en droit d’attendre de la série. Il aura fallu souffrir de beaucoup moins bons chapitres pour en profiter… On a aussi bien du mal à pardonner ce générique.
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J’ai regardé le 1er épisode mais cela ne m’a pas donné envie de voir les autres.
Du Dujardin pur jus, quelques scènes un peu lourdingues parfois, trop loin du Zorro original.
Tant pis.
La nouvelle série “Zorro” avec Jean Dujardin, bien que prometteuse sur le papier, semble avoir raté sa cible en termes de ton et de fidélité au personnage iconique du justicier masqué. Dès les premiers épisodes, on a l’impression de voir Jean Dujardin reprendre son rôle de OSS 117, mais affublé du costume de Diego de la Vega puis du masque de Zorro.
Au lieu de retrouver le noble Don Diego de la Vega, rusé et habile défenseur des opprimés, on est face à une caricature où le héros devient une version décalée et maladroite de lui-même. Les traits de caractère qui définissent OSS 117 – l’arrogance, l’humour absurde et l’autosatisfaction – s’invitent ici dans l’interprétation de Zorro, rendant le personnage difficile à prendre au sérieux. Ce choix de mise en scène crée une dissonance : le spectateur ne sait plus s’il regarde une parodie ou une tentative sincère de réinventer le mythe de Zorro.
Si Jean Dujardin excelle dans la comédie et maîtrise parfaitement l’art du décalage, ce style ne correspond pas à l’esprit originel du justicier masqué. “Zorro” devient alors un mélange étrange et déroutant, où l’on attend des répliques pleines d’ironie et des situations burlesques plutôt que des combats héroïques et des actes de bravoure. Cette série semble s’égarer entre la parodie et l’hommage, laissant le spectateur avec le sentiment de voir « OSS 117 Mission Zorro », mais sans la saveur authentique de l’un ou l’autre personnage.
Bonjour.
En lisant votre critique Mme Hay, pas une fois vous ne citez le nom de l actrice française qui joue Gabriella ? Audrey Dana est elle à ce point si transparente à vos yeux ?
Quel beau métier et si confortable de critiquer…
Cdlt
J’ai vraiment aimé la série, très bien réalisée et très plaisante à suivre. Les acteurs sont excellents. J’ai beaucoup ri et apprécié les dialogues anachroniques et décalés. J’ai trouvé très intéressant l’angle choisi, celui du portrait d’un homme humilié par son père et qui n’arrive à s’affirmer qu’en devenant un autre, de façon totalement cloisonnée. Le poids du mensonge dans la relation conjugale, ou encore la mise en abîme du métier d’acteur et des affres de la célébrité sont au coeur du récit. Le héros séduit autant qu’il agace, et Jean Dujardin excelle dans ce cabotinage, mais l’ensemble m’a paru tout à fait cohérent et je ne comprends pas les reproches des critiques : un hommage peut-être parodique et le mythe de Zorro est ici revisité avec autant de décalage et d’humour que d’intelligence.
ZORRO…C’EST ZÉRO !
Comment gagner beaucoup d’argent ? Financer des films “bankable” pour nigauds !Ça rapporte !
Zorro-Dujardin, c’est de la Haute Cuisine, version supermarché à mi-chemin entre le grotesque beauf OSS 117 ( 2 millions €) et du vaudeville low cost. Très loin de la prestance aristocratique d’un fils de famille aisée, héritier d’une riche hacienda, magnifiquement incarné par Guy Williams,
Zorro-Dujardin, c’est Zorro version Brice de Nice (4 millions€), ou Lucky Luke (3 millions + produits dérivés), un zorro rigolard illettré qui se ridiculise en bafouillant, bien loin de l’élégance d’un Georges Descrières ou le panache d’un Roger Moore.
Le vocabulaire est vulgaire. Des décors pas chers en carton pâte pour kermesse, très décevants. Des costumes des années 1 960. Dujardin monte à cheval, comme sur un bidet. Les combats à l’épée sont invraisemblables.
Les dialogues sont une suite de quiproquo, telle la longue scène grotesque entre panietpén, qui serait sensée faire rire…?. Les tirades sont faites de banalités prononcées comme des vérités profondes, rendant le visionnage particulièrement pénible, Même mauvais, ramené au nombre de nigauds l’avant vu, cet énième nanar Jardinable devrait rapporter au bas mot, près de 3 millions
Où est passé notre justicier masqué en 2024 ? Une version espagnole assez plate et plus violente avec un acteur qui n’a aucun charisme, mais intéressant et la version Paramount France TV avec Jean Dujardin , des idées intéressantes, une excellente actrice, de beaux décors et costumes faisant des clins d’œil à la série de Disney, mais partir dans un délire parodique à la sauce Monty Python et OSS117 est risqué et peut vite lasser. Malheureusement, c’est le cas. J’ai arrêté l’aventure au bout de trois épisodes. Pire, le générique est catastrophique ! Mais c’est quoi ce truc ? Je préfère la chanson VF de la série de Disney avec Guy Williams:
“Un cavalier, qui surgit hors de la nuit
Court vers l’aventure au galop
Son nom, il le signe à la pointe de l’épée
D’un Z qui veut dire Zorro
Zorro, Zorro
Renard rusé qui fait sa loi
Zorro,Zorro
Vainqueur, tu l’es à chaque fois”