Mel Gibson, ce n’est pas que la coupe mulet magnifiquement porté par Martin Riggs dans L’Arme Fatale, c’est aussi le réalisateur d’un monument du cinéma (Braveheart), de deux films aujourd’hui encore fortement débattus (La Passion du Christ et Apocalypto), et un métrage alliant morale chrétienne et grosse boucherie (Tu ne tueras point). Bref, dès que Mel Gibson passe derrière la caméra, on sent déjà pointer ce petit goût de polémique propre à un cinéaste. D’autant qu’après les dernières révélations, il serait honnête de penser que l’homme, lui, pourrait bien légitimement ne plus reprendre le chemin des plateaux. Ce préambule pour vous expliquer notre envie de découvrir Vol à haut risque, un thriller en apparence sans prétention, mais qui pourrait bien être son dernier.
Une U.S. Marshal (Michelle Dockery), de retour sur le terrain après plusieurs années au placard, est chargée d’escorter un témoin de première importance (Topher Grace) pour faire tomber un ponte de la criminalité. Et alors qu’ils montent à bord d’un avion privé, ils se rendent rapidement compte que le pilote (Mark Wahlberg) n’est pas celui qu’il prétend.
Pourquoi faire compliqué quand on peut faire très simple
Sur le papier, Vol à haut risque a tout de la petite série B sympathique qui sent bon les années 90, dans laquelle aurait pu jouer Mel Gibson en son temps. Un plaisir régressif promettant son lot de tension en haute altitude avec un Mark Walhberg cassant son image de beau gosse en arborant une magnifique calvitie. Parfois, on a des goûts simples. On ne pensait pas, alors, que notre vœu serait trop bien exaucé.
Le premier mérite de Vol à haut risque est de ne pas chercher à gagner du temps sur une intrigue qui n’en demande guère. Cinq minutes après le début du film, on se glisse déjà à bord de l’avion pour passer 1h20 à bord. Le principe du film tient sur un huis clos entre trois personnages, on n’aura pas plus, pas moins. Le manque d’ambition peut parfois être préjudiciable. Néanmoins, il peut devenir un gage de qualité dès lors qu’on ne ment pas à son spectateur sur ses promesses initiales.
Le second bon point est attribué à son casting. L’héroïne campée par Michelle Dockery est particulièrement proactive et a le mérite de ne pas subir la situation, tout en lui écrivant un traumatisme facilement exploitable par le scénario. Topher Grace fait du Topher Grace – un rôle de composition – et Wahlberg est complètement en roue libre, prenant un plaisir visible à jouer les psychopathes jusqu’au-boutiste. Les trois protagonistes se répondent dans leurs personnalités et leurs manières, ce qui donne à l’ensemble une énergie plaisante. Du moins la première demi-heure.
Vol à zéro risque
Parce que le scénario de Jared Rosenberg, dont c’est la première expérience, n’a strictement rien de plus à raconter et a épuisé tout son potentiel en quatre scènes. Un seul espace de jeu, un trio de personnages et quelques interventions vocales extérieures ; si cela peut suffire à un thriller efficace – et le récent Carry-On sur Netflix en est une preuve en un sens -, force de constater que Rosenberg n’a pas assez de bagages pour voir plus grand. Globalement, on peut dire que Vol à haut risque tourne autour d’une petite poignée d’événements narratifs et qu’entre ces derniers, on fait du remplissage.
On a beau saluer une idée qui ne fait pas de fausses promesses, faut-il encore que cette idée soit assez solide pour tenir tout un film. Ici, sa fébrilité n’est même pas cachée et on a l’impression d’assister lentement, mais sûrement, à un crash cinématographique avec une intrigue qui ne sait, littéralement, pas quoi faire. Voilà le film pris en flagrant délit de « débrouillardise » en s’ajoutant de quoi gagner quelques minutes ici et là.
Sinon comment expliquer le flirt téléphonique inapproprié, les « oublis » volontaires selon les besoins — on se souvient de la présence du couteau, puis on passe outre — ou un Wahlberg obligé de répéter encore et encore les mêmes crasses parce qu’il est physiquement incapable de faire davantage. C’est amusant au début, puis lassant, car répétitif, le comédien ayant zéro marge de manœuvre hormis le cabotinage. Pour chacun, la seule ligne directrice semble être d’être l’héroïne, le sidekick et le méchant, puis de jouer au ping-pong.
Le scénario et les acteurs semblent attendre l’atterrissage pour pouvoir avancer, sauf que tout le monde est bloqué en l’air. Le pire étant qu’on n’a pas la sensation que l’écriture est fainéante, mais plutôt qu’elle est dans l’incapacité de créer quelque chose. Ce qui, paradoxalement, amène un certain sentiment de pitié et de compassion.
Braquage à faible coût
Et Mel Gibson dans tout ça ? Rien. Certes, tout y est visible et la gestion de l’espace est maîtrisée par le cadre, toutefois, on n’a pas le sentiment que le réalisateur se soit particulièrement investi dans le projet. C’est lisse, en pilotage automatique, et le bonhomme aurait pu être remplacé que personne n’y aurait vu une différence. Aucun génie, aucune folie, comme si Mad Mel était tourné vers son futur diptyque La Résurrection du Christ (s’il reste en production…) et qu’il faisait juste acte de présence pour empocher un petit chèque, ou montrer qu’il pouvait encore tenir la barre aux investisseurs, huit ans après Tu ne tueras point.
Vol à haut risque est un film pâlot qui ne brillera pas par ses effets spéciaux fauchés, sa photographie terne, son casting qui attend le temps qui passe et son réalisateur qui fait ses heures d’intermittence. Un métrage qui n’a pas coûté très cher et qui finit en salles grâce à ses noms au générique alors qu’on était à un Steven Seagal de le voir arriver directement dans le bac promotion d’un Cash Express. Et on ne dit pas ça méchamment, car cette production a le mérite d’être assez honnête pour ne faire de mal à personne et peut occuper une soirée télé ou un trajet en avion sans mal, mais elle ne sera rien de plus. Vol à haut risque est un film simple et pas efficace.
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