Le plus amusant lorsque l’on s’appelle Transformers : le commencement, c’est de cacher que la franchise tire plutôt sur sa fin à ce moment-là de l’histoire. Depuis la première adaptation par l’explosif Michael Bay en 2007 — souvenez-vous, celui qui aimait bien filmer Megan Fox au ralenti — la saga a donné lieu à six autres films. Sauf que cela fait dix ans que le box-office est en chute libre au point où le Rise of the Beasts de 2023 reste le moins rentable de la série avec 427 millions de dollars cumulés dans le monde.
Pourtant, Hasbro et Paramount s’accrochent à leur licence comme une moule à son rocher et ils auront tout tenté pour nous convaincre que Transformers est encore cool. Des annonces en pagaille (dont une toute récente sur un possible croisement avec Godzilla !), un spin-off, deux simili-reboots dont un qui doit ouvrir sur un crossover avec les G.I. Joe… La saga s’est transformée en Jean-Claude Dusse, persuadé que sur un malentendu, ça finira par marcher.
On ne saura jamais si le projet a été pensé comme une honnête ambition créatrice ou comme la tentative de la dernière chance ; toujours est-il que Transformers : le commencement débarque sous forme d’ultime technique de drague. Allez, on peut bien lui accorder un rencard au cinéma, ça ne nous engage à rien. D’autant que les premiers retours lors de sa présentation au Festival international du film d’animation d’Annecy, ainsi que dans ses diverses avant-premières, laissaient entendre que le métrage de Josh Cooley (Toy Story 4) était une vraie réussite.
Avant les Autobots et les Decepticons, le film raconte l’histoire de deux meilleurs amis condamnés aux bases besognes sur leur planète Cybertron. Mais l’appel de l’aventure et la découverte d’un secret bien gardé va pousser vers leurs destins ceux qu’on appellera bientôt Optimus Prime et Megatron.
Mécanique trop bien huilée
Si l’on pouvait craindre un opus bien trop tourné vers l’humour pour ce qu’il entendait raconter – les prémices d’une future guerre fratricide – à la vue des différentes bandes-annonces, il n’en est finalement rien sur la globalité du métrage. L’aspect comique est présent, sans être envahissant et, surtout, il s’intègre naturellement dans la personnalité des protagonistes (BADASSTRON !!) et sait s’effacer quand la situation l’exige. Le Commencement montre une maîtrise de son tempo émotionnel et accorde du temps pour chaque chose, drolatique comme dramatique.
Un volet moins enfantin qu’on aurait pu le soupçonner, mais qui n’entend pas camoufler sa vision familiale, à l’image de ce qu’a toujours représenté la franchise à des degrés plus ou moins importants (l’épisode Bumblebee en particulier). Certes, ce n’est pas avec Transformers : le commencement que le cliché des films d’animation destinés avant tout aux enfants disparaîtra. Au contraire, sa forme semble avoir été choisie pour séduire le jeune public avec des propositions visuelles et narratives parfois trop simplistes.
Visuellement, si l’arrière-plan et l’esthétique des Transformers ne manquent pas de détails, la direction artistique se montre plus d’une fois extrêmement lisse avec une animation qui manque de texture d’une scène à l’autre, y compris au niveau des visages. Graphiquement, on peut sauter d’une séquence très riche avec une 3D poussée, à une séquence rappelant des séries animées basiques des programmes jeunesses de la matinée aux formes plus primitives. L’exemple le plus parlant reste la différence d’habillage entre les héros principaux, bien marqués, et les rôles secondaires construits sur un même moule.
Même son de cloche côté scénario qui a tendance à prendre quelques raccourcis sur la transformation morale de ses personnages et plusieurs facilités scénaristiques. L’intrigue ne cherche jamais à nous perdre sur des rebondissements trop inattendus, préférant parcourir les chemins balisés jusqu’à nous faire rire dès lors qu’il faut raccrocher les wagons avec le lore en choisissant souvent la manière la plus littérale d’expliquer le pourquoi du comment. Les dialogues n’ont aucune profondeur et font que sur-expliquer ce que l’on voit à l’écran.
Optimiste Prime
S’il nous semblait important de ne pas atténuer ces aspects les plus pauvres du film, il l’est tout autant d’avouer que rien de tout ce qui a été dit au-dessus ne nuit véritablement à ce Transformers : le commencement. Est-ce que le film aurait pu se montrer plus ambitieux dans le fond comme dans la forme en se servant de l’animation comme d’un tremplin vers les idées les plus folles, à la manière des derniers Spider-Man avec Miles Morales ? Évidemment. Est-ce qu’il aurait pu faire preuve de plus de profondeur dans son exploration de l’univers ? Également. Toutefois, l’expérience n’en reste pas moins grisante dans le ressenti général.
On se laisse facilement cueillir par cette histoire d’amitié qui tourne mal sur fond d’aventure avec des personnages drôles et attachants. Une affection bien aidée par le casting vocal (nous avons vu la version française) qui s’amuse beaucoup avec les répliques. La bonne humeur ambiante est vite contagieuse. Le rythme est tenu du début à la fin et le métrage se renouvelle suffisamment d’une scène à l’autre pour qu’on ne sente pas le temps passer. Si on lui reproche sa timidité par rapport à son potentiel, il n’en reste pas moins que Transformers : le commencement parvient à nous proposer une idée différente par séquence, de sorte qu’on n’a jamais la sensation de tourner en rond devant une histoire qui n’avance pas, au contraire.
On assiste à un vrai divertissement qui entend vouloir faire plaisir à son public, du plus petit au plus grand, loin des démarches trop cyniques ou peu inspirées de ses pendants en live action. Les vannes fonctionnent, l’action sait prendre de l’ampleur, et on redemanderait bien un peu de rab à la fin. Oui, on s’amuse enfin à nouveau devant un opus Transformers. Le film aurait pu être mieux, mais en attendant, il sait déjà être bon, et vu ce qu’est devenu la franchise, c’est déjà beaucoup. Le commencement d’une nouvelle saga en animation ? On l’espère.
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des robots avec un nez et une bouche humaine je ne m’y ferais jamais.