Un peu plus de trois ans se sont écoulés depuis que le jeu mortel instauré sur nos écrans par la série Squid Game a pris fin. Coïncidence ou pas, c’est exactement le laps de temps qui sépare les événements des deux saisons, dont le deuxième acte a été livré et rendu disponible dans son intégralité ce jeudi matin, à 9h01, sur Netflix. À croire que l’analogie est volontaire. Ce qui est sûr, c’est que la symbolique est belle, entre un Seong Gi-Hun qui a rongé son frein pendant tout ce temps pour retrouver la trace des organisateurs du Squid Game et plus précisément le maître du jeu et le public, qui après avoir massivement consommé la première partie de cette trilogie, brûlait d’impatience de voir la suite.
La suite ? Ou de tester la rejouabilité du concept ? Car quand on est le plus gros succès de Netflix, qu’une saison 2 n’était pas prévue à la base et que de l’aveu du showrunner, Hwang Dong-hyuk, l’écriture de la fameuse suite a été douloureuse, on peut légitimement se demander si la magie va encore opérer. Il faut dire que Squid Game, qui a un remake américain sur les rails avec David Fincher et le scénariste d’Utopia, Dennis Kelly, a de la matière à développer avec des enjeux forts soulevés à la fin de la première saison.
Souvenez-vous, on quitte le premier volet par une teinture de cheveux très colorée pour Seong Gi-Hun, heureux et funeste détenteur de la somme record de 45,6 milliards de wons, qui décide de tourner le dos à une vie d’oisiveté, celle qui lui aurait permis de retrouver sa fille, pour partir à la poursuite du maître du jeu et des organisateurs du Squid Game, bien décidé à les arrêter, écœuré par les massacres, les sacrifices et les pertes humaines engendrées sur l’île.
L’enfer, c’est (toujours) les autres
Quand on est riche, le temps, ça s’achète et pendant trois ans donc, Seong Gi-Hun va mettre Séoul sous surveillance, en mettant à profit la pègre et les petites frappes locales, pour retrouver la trace de l’homme à la mallette, celui qui drague les futurs participants au jeu avec une partie de ddajki. Pendant ce temps-là, Hwang Jun-ho, le frère du maitre du jeu, a survécu à la balle prise dans l’épaule et se met, lui aussi, en quête sans relâche de l’île où se dérouleront les prochains jeux. Comme le synopsis officiel de la saison 2 l’avait déjà dévoilé, Seong Gi-Hun va devoir replonger dans cet enfer s’il entend bien mener sa mission à bien et empêcher de nombreuses victimes.
La force de cette deuxième saison de Squid Game, c’est le ton et l’ambiance dans laquelle elle nous plonge dès le premier épisode. Les gens ne meurent pas que dans les jeux et courir après un ennemi aussi insaisissable que puissant a un prix, que quelqu’un finira bien tôt ou tard par payer. Persuadé de pouvoir changer les mentalités, Seong Gi-Hun va aussi devoir composer avec la même problématique qui était la sienne à l’époque de sa participation : face à une montagne d’argent potentielle et malgré le risque de mort imminente, l’appât du gain est trop grand pour une bande de gens désespérés. Et sa position n’a finalement rien d’avantageuse : avoir gagné fait de lui une cible autant qu’un leader, crée de la jalousie autant qu’elle lui confère un certain leadership et son message de prévention et de maturité peine à passer auprès d’une génération pour la majorité plus jeune.
Le Squid Game, il a (un peu) changé
Pour ne rien arranger, le Front Man (ou maître du jeu donc), Hinh-ho, décide de modifier les règles cette fois, en laissant au public le choix à l’issue de chaque épreuve d’abandonner ou non les jeux, à condition d’avoir un vote majoritaire, dans un sens ou un autre. Avec ce changement de règles, c’est une autre façon de mettre en avant les intérêts des uns et des autres en lumière. Au gré des épreuves, les équipes de fortune constituées par la force des choses vont se déchirer, par le biais des choix surprenants de certains participants.
Surprenant est un bien grand mot en soi, puisqu’on reconnaît bien là la recette de Squid Game et on devine assez facilement, grâce aux mêmes techniques de réalisation et certains plans, qui va décider quoi… mais on ne peut s’empêcher d’avoir un rictus grimaçant en voyant untel ou untel choisir de continuer à vivre ces jeux sanglants au lieu d’embrasser une planche de salut. Et si cela marche, c’est aussi au regard du pedigree des nouveaux venus dont voici un petit échantillon : un rappeur complètement cinglé, limite psychotique, Thanos et ses adeptes, une participante transgenre désireuse de conclure sa transformation, un ancien influenceur crypto déterminé à se refaire et soucieux du bien-être de son ex, enceinte de lui.
Le maitre du jeu en première ligne, les coulisses des jeux exposées
Une idée machiavélique pensée par un être complexe. Cantonné à un rôle de personnage secondaire dans la saison précédente, le maître du jeu gagne en épaisseur ici et la relation qu’il va nouer avec Seong Gi-Hun aux dépens de celui-ci est un des axes forts de cette nouvelle cuvée, peu avare en violence. Bien décidé à anéantir les idéaux du héros, ce dernier ne va pas hésiter à intégrer le jeu de l’intérieur, pour mieux saboter ces plans. Si on voit — malheureusement — certains rebondissements venir, cela ne nuit en rien à la montée émotionnelle tout au long des épisodes et on sent bien que cette saison s’appuie moins sur les jeux que sur les hommes et les femmes qui les jouent. Le duo interprété à l’écran par Lee Jung-Sae (Gi-Un) et Lee Byung-hun (In-ho) fonctionne à merveille.
Attention, on ne dit pas que les épreuves ne sont pas à la hauteur. Loin de là. On sent bien l’enjeu majeur derrière cette saison 2 — faire aussi bien que la saison 1, si ce n’est mieux en termes d’audience et de succès — et le budget colossal alloué cette fois (on est passé de 21 à 100 millions de dollars), et ce, de l’intro de chaque épisode à leur réalisation, plus punchy encore, plus violente, plus sanglante. Les jeux d’ailleurs, s’ils restent toujours aussi enfantins, respectant ainsi la base et l’ADN de la série, sont différents, autant pour perturber Seong Gi-Hun, que renouveler un intérêt certain pour l’ensemble, qui aurait vraiment été en péril sans quelques ajustements bienvenus. Dans ce sens, l’intrigue oscille aussi savamment entre la recherche de l’île par le reste des équipes engagées par le héros et l’ancien policier Jun-ho et les coulisses des jeux, où on découvre, à travers le personnage de Neo-ul, une soldate décidée à retrouver sa fille à tout prix, les enjeux sombres et sordides qui motivent également le recrutement des participants.
Alors, on y retourne ?
Soucieux de proposer aux spectateurs une histoire qui tienne la route et une expérience aussi puissante que celle vécue il y a trois ans, Hwang Dong-Hyuk a réussi son pari, en partie puisqu’il faudra cependant juger l’ensemble à l’aune de sa dernière partie, cette fameuse saison 3 datée pour l’année prochaine. Comme convenu, l’épisode 7 est un vrai mid-season final et il n’aurait pas fallu attendre trop longtemps pour envoyer la suite au risque de perdre la force du propos encore une fois engagé. En revisitant certains de ses ingrédients, Squid Game arrive à conserver ce qui a fait sa force, sans pour autant se renier et (trop) se reposer sur ses lauriers. Les trahisons fleurissent, les origin-stories des persos aussi, les cadavres et les bains de sang (plus nombreux que la saison 1) également, le tout s’entremêlant en même temps que nos sentiments pour les uns et les autres. Rendez-vous donc en 2025 pour la conclusion de cette série phénomène.
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