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[Critique] Sicario, La Guerre des Cartels : Un digne héritier du premier ?

Trois ans après le choc du premier épisode, la saga Sicario revient sans son réalisateur, avec un casting amputé de son actrice principale. Assez pour l’enterrer ?

L’annonce d’un nouvel épisode de Sicario avait de quoi inquiéter les cinéphiles. Considéré comme un des meilleurs films de 2015, le premier opus avait pris de cours de nombreux spectateurs, en montrant une vision différente de la guerre contre le trafic de drogue à la frontière américano-mexicaine. Tout en évoquant l’échec cuisant de la realpolitik des États-Unis envers son voisin, Denis Villeneuve avait réussi à saisir l’opacité des relations entre forces gouvernementales et trafiquants. Un film qui se suffisait à lui-même, porté par une Emily Blunt très convaincante en jeune agent crédule et idéaliste.

Son absence du casting, tout comme celle de Denis Villeneuve laissait penser à une prolongation artificielle de l’histoire originale. Une protubérance cinématographique à visée pécuniaire, qui miserait tout sur l’action pour contenter un public peu regardant. C’était sans compter plusieurs détails importants. Le premier se nomme Taylor Sheridan, un scénariste qui démontre depuis plusieurs années maintenant un vrai talent d’écriture. De Sicario (premier du nom) à Wind River, en passant par Comancheria, l’américain a su analyser avec brio la bouillante question des frontières de son pays.

Le second se nomme Stephano Sollima. Après ACAB, portrait assez brutal de nos sociétés modernes, l’italien s’est penché avec brio sur la pègre italienne avec la série Romanzo Criminale et le très efficace Suburra. La combinaison de ces deux visions, sociétale et territoriale, permet de rapidement constater qu’une majeure partie de l’œuvre originale a été respectée.

Persuadé que des islamistes radicaux profitent du trafic d’êtres humains mis en place par les cartels mexicains pour infiltrer le pays, le gouvernement américain place ces derniers sur la liste des organisations terroristes. Tous les moyens sont alors laissés à l’agent fédéral Matt Graver (Josh Brolin) pour les contrer. Ce dernier va de nouveau faire appel à Alejandro Gillick (Benicio del Toro) pour organiser un kidnapping afin de créer une guerre fratricide entre les gangs.

Il faut moins d’une demi-heure pour comprendre que Sollima a évité le principal piège que comportait cette suite. Bien qu’il dispose d’une écriture ciselée et d’une narration efficace, la réussite du premier opus réside quasiment intégralement dans sa mise en scène. Loin du simple film d’action que pouvait laisser présager son synopsis, Villeneuve avait réussi à insuffler une gravité nouvelle au genre.

En réduisant au maximum les phases d’action pures, tout en nous préparant à une mort imminente, le québécois laissait le spectateur en apnée. Un résultat étouffant, contrasté par la photographie magistrale de Roger Deakins, qui n’a d’ailleurs pas rempilé sur cet épisode.

Qu’à cela ne tienne. Sollima se recentre sur son duo meurtrier et utilise la même technique. Si l’aspect esthétique n’atteint pas les mêmes sommets, il permet de recréer la même paranoïa, le même raidissement. Chaque trajet, interrogatoire, filature est traversée par une tension jouissive, qui constitue à elle seule l’intérêt de cette suite.

Le réalisateur se laisse malgré tout aller à des fusillades plus fournies. Mais ses plans resserrés, qui se focalisent sur le tireur et non sa victime, font toujours mouche. Le spectateur a ainsi l’impression de regarder une version moins atmosphérique, mais plus agressive de l’œuvre initiale. On regrette néanmoins le départ du compositeur islandais Johan Johansson, remplacé par sa compatriote Hildur Guðnadóttir, dont le travail sonore impressionne moins… Sauf quand elle reprend le thème de l’opus précédent.

En évoquant le terrorisme islamique, Sheridan semblait effectuer un grand écart peu en accord avec le réalisme de l’écriture. Pourtant, son scénario retors fonctionne plutôt bien, remplaçant une menace par une autre tout en soulignant l’aspect particulièrement volatile des décisions politique.

Conscients qu’ils s’occupent ici d’un épisode de transition, Sheridan et Sollima tissent des récits secondaires à travers les personnages d’Isabela et Miguel, la fille d’un chef de cartel et un jeune américain d’origine mexicaine en quête d’argent facile. L’histoire de ce dernier a malgré tout du mal à se rattacher au tronc scénaristique principal, et sert clairement à ouvrir une brèche pour un troisième opus.

Celle de la jeune fille met en lumière le principal défaut du film, lié au traitement du personnage d’Alejandro. Autrefois perçu comme une entité implacable et cruelle, le personnage change ici de statut. Si Benicio del Toro livre une nouvelle fois une belle prestation (bien épaulé par la nonchalance de Brolin), Sollima tente de l’humaniser en lui construisant un passé plus ou moins attendu.

Au fur et à mesure que le récit avance, sa volonté d’en faire l’icône principale de la franchise altère la part de mystère qui le rendait fascinant. Ce désir d’héroïsation mène d’ailleurs à une scène rocambolesque, que ne renieraient pas les increvables justiciers de Marvel et consorts. Elle n’intervient heureusement qu’à la fin du film, qui nous a déjà convaincu de ses bonnes intentions initiales.

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Notre avis

Sans atteindre la maestria esthétique de son aîné, Stephano Sollima insuffle une belle énergie à cet épisode de transition, en conservant une atmosphère particulièrement tendue. Amputé de son réalisateur et de son actrice principale, ce film plus orienté vers l’action fait la part belle au duo rugueux formé par Brolin et Del Toro. On regrette en revanche que Sollima ait voulu en faire des héros, ce qui finit par altérer la part de mystère qui les entourait auparavant.

L'avis du Journal du Geek :

Note : 7 / 10
1 commentaire
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    Merci,
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    Julien Canat, étudiant à l’UTT

    N.B. : Je suis actuellement en semestre Erasmus en Estonie et ce jusqu’au
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