âAlors, tâas fini ?â Depuis son lancement en 2019, Sex Education a su se forger une solide communautĂ© dâadeptes (dâobsĂ©dĂ©s). VĂ©ritable phĂ©nomĂšne, la sĂ©rie de Laurie Nunn semblait ĂȘtre une bouĂ©e de sauvetage au milieu dâun ocĂ©an de production âyoung adultâ ultra-codifiĂ©es et sans saveur. Il faut dire quâavec les thĂ©matiques quâelle ambitionne de traiter, la production originale Netflix ne pouvait pas faire dans la demi-mesure. Loin des frontiĂšres du pays de lâOncle Sam et de son puritanisme, il nây avait que les Britanniques pour donner vie Ă une telle fresque sur lâadolescence et les premiers Ă©mois. Quatre ans plus tard, la charme est-il rompu ?
AprĂšs sâĂȘtre avouĂ© leurs sentiments mutuels, Otis et Maeve doivent surmonter un nouveau dĂ©fi. La jeune fille a Ă©tĂ© acceptĂ©e dans une universitĂ© amĂ©ricaine pour y suivre un programme auprĂšs de lâun des meilleurs auteurs de sa gĂ©nĂ©ration. De son cĂŽtĂ©, Otis entame sa scolaritĂ© dans un nouvel Ă©tablissement aprĂšs la fermeture de Moordale. Il veut continuer Ă jouer les thĂ©rapeutes pour ses camarades, mais un problĂšme se pose : la place est prise.
“Smells Like Teen Spirit”
Il nâaura fallu que quelques Ă©pisodes Ă Sex Education pour devenir un phĂ©nomĂšne tĂ©lĂ©visuel. Il y a trois ans, sur les rĂ©seaux sociaux, de nombreux adolescents partageaient leur gĂȘne Ă dĂ©couvrir la sĂ©rie dans le salon familial. La production britannique Ă©tait aussi rapidement devenue un objet dâĂ©tude sur la maniĂšre dont nos Ă©crans dĂ©peignent la sexualitĂ© des adolescents et des adultes. Avec beaucoup dâaisance et de sincĂ©ritĂ©, celle que lâon surnomme “Sex Ed ” embrassait son didactisme pour couvrir de nombreuses thĂ©matiques. Dâaucun aurait pu croire quâen sâattardant trop longtemps sur ses sujets, la sĂ©rie ne trouve plus rien Ă dire. La quatriĂšme saison prouve que la source est intarissable. Maladie, deuil, expĂ©rience traumatisante, transidentitĂ©, Sex Education ne manque pas de chemins Ă emprunter avec ces nouveaux et anciens protagonistes.
Au fil des saisons, la bande sâest Ă©largie… sans doute un peu trop. Lâintroduction de cette nouvelle salve nâen est que plus dĂ©concertante, semblant enfermer ses hĂ©ros dans des vases clos, des sous-intrigues de plus en plus nombreuses et des enjeux toujours plus divers. Face Ă lâimmensitĂ© de sa galerie de protagonistes, cette quatriĂšme saison ne sait parfois pas oĂč donner de la tĂȘte. Le groupe marche vers un futur dans lequel chacun tracera sa route loin de ses compĂšres, une fin de lycĂ©e finalement. Tous et toutes ont droit Ă dernier tour de piste, mĂȘme si certains arcs narratifs paraissent avoir Ă©tĂ© bouclĂ©s dans la prĂ©cipitation. On regrette seulement que la sĂ©rie nâait pas profitĂ© de son changement de dĂ©cor pour resserrer sa narration autour de quelques parcours, et dâainsi leur offrir plus de temps pour se dĂ©ployer.
NĂ©anmoins, si les prĂ©mices de cette nouvelle salve accusent un sĂ©rieux problĂšme de rythme, cette prĂ©cipitation disparaĂźt lorsquâun Ă©vĂ©nement force tout ce beau monde Ă sâunir face Ă lâadversitĂ©. La portĂ©e Ă©motionnelle du rĂ©cit, jusque-lĂ amoindrie, nâen est que renforcĂ©e. Dans les trois premiers chapitres, les rĂ©cits sâarrachent tour Ă tour une part dâĂ©cran, la bascule qui intervient plus tard offre un nouveau souffle. Avec une palette dâĂ©motions aussi Ă©clatantes que les couleurs arborĂ©es par les hĂ©ros, Sex Ed prouve que lâon peut rire et sâĂ©mouvoir de tout.
MĂȘme lorsque la production de Laurie Nunn semblait avoir perdu de son mordant, en transposant ses hĂ©ros dans une utopie scolaire, elle renoue avec son ton irrĂ©vĂ©rencieux dans ces derniers instants. Sans le regard moralisateur d’un Ă©tablissement strict, Sex Education s’Ă©panouit Ă raconter de nouvelles injustices. Rebelles un jour, rebelles toujours. Entre rĂ©cit nostalgique et contemporain, perpĂ©tuel anachronisme esthĂ©tique, Sex Education sait jouer de ses arguments pour nous convaincre de ne pas cĂ©der aux sirĂšnes dâune autre Ćuvre du genre. Otis, Maeve, Eric, Aimee ou encore Cal sont autant de protagonistes que lâon aime voir Ă©voluer et dont on redoute les adieux.
âTeenage dirtbagâ
Quand sonne enfin la fin de cette rĂ©crĂ©ation pop sur Netflix, le genre de production bien trop rare, ne reste quâune seule chose pour se consoler : la chance dâavoir vu Ă©voluer des jeunes pousses du petit Ă©cran destinĂ©es Ă de grandes choses. Car oui, malgrĂ© le succĂšs quâelle rencontre, la sĂ©rie doit plier bagage pour laisser Ă ses interprĂštes lâoccasion de briller sous de nouveaux projecteurs. Lâapparition dâEmma Mckey et Ncuti Gatwa dans ce qui sâannonce comme le film le plus rentable de lâannĂ©e nâest pas une coĂŻncidence. Ceux qui prĂȘtent leurs traits Ă Maeve et Eric ont dâailleurs dĂ©jĂ Ă©tĂ© investis de grandes partitions, dans Eiffel pour la premiĂšre et Ă lâaffiche de Doctor Who pour le second.
Plus largement, chacun des artisans de ce succĂšs mĂ©rite sa part de lumiĂšre, Ă commencer par Aimee Lou Wood qui frappe par sa justesse et sa sincĂ©ritĂ©. Mais Sex Education nâest pas seulement portĂ©e par des acteurs et actrices de talent, la sĂ©rie est surtout le reflet de lâadolescence de nombreux spectateurs. Câest sans doute lĂ quâelle puise sa singularitĂ©, dans sa capacitĂ© Ă rĂ©sonner chez tout un chacun, pas de la mĂȘme maniĂšre et pas avec la mĂȘme intensitĂ©. Quand le rideau se baisse, on sort les mouchoirs et on essuie⊠nos larmes.
Maintenant que cette page est tournĂ©e, difficile de voir une autre sĂ©rie reprendre le flambeau. Si chaque gĂ©nĂ©ration a eu sa sĂ©rie adolescente, la promotion 2023 a dĂ©cidĂ©ment Ă©tĂ© vernie. Sex Education s’en va, et avec elle la promesse d’une dose annuelle d’humour et d’amour. Non, c’est vous qui pleurez.
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Une derniĂšre saison remplie de wokisme gerbatoire
Jâai adorĂ© cette sĂ©rie et je ne suis pourtant pas un ado mais un adulte, papa de 3 enfants qui vont de 18 Ă 7 ans. JâespĂšre que ma grande a regardĂ© (il faudra que je lui demande đ , ou alors elle me lâa dĂ©jĂ dit⊠bref đ đ€Š). Un article trĂšs bien Ă©crit, bien dĂ©peint, de ce qui fut une vraie belle surprise pour ma part. Jâai aimĂ© chaque personnage, je mây suis attachĂ© et je prenais vraiment plaisir chaque annĂ©e Ă reprendre le cours de cette belle histoire. Je pense ĂȘtre bon public mais cette sĂ©rie se dĂ©marque des autres car elle ose tout simplement lĂ oĂč dâautres vont ĂȘtre plus conventionnelles. Bref Otis et sa bande vont me manquer (ça fait bizarre de dire ça Ă chaque sĂ©ries auxquelles nous avons adhĂ©rĂ© Ă lâunivers). Une petite larme et un souhait dâun bel avenir pour chacun des talentueux acteurs de cette merveilleuse sĂ©rie đ„Č.