Passer au contenu

Critique Secret Level : une série sur le jeu vidéo qui n’a pas le niveau ?

Depuis qu’elle a été présentée à la surprise générale, la nouvelle série Prime Video a réussi à se hisser au niveau de nos plus grosses attentes de cette fin d’année. Secret Level est-elle vraiment le paradis des joueurs ?

En août dernier, l’édition 2024 de la Gamescom, le salon du jeu vidéo de Cologne, en Allemagne, faisait grise mine. Aucune énorme annonce n’était venue accaparer l’attention, hormis un Borderlands 4 pas vraiment attendu. Non, étonnamment, l’événement n’a pas été créé par le développement d’un futur hit sur consoles ou PC, mais par une série en approche sur Prime Video : Secret Level.

Découvrir Secret Level sur Prime Video

Sur le papier, Secret Level cumulait les signaux lumineux au vert. Une série d’anthologie en animation autour de nombreuses licences du jeu vidéo, conçue par Tim Miller, papa de Deadpool, et le studio Blur pour leur seconde collaboration. La première ayant donné l’excellente Love, Death & Robots sur Netflix, vous comprendrez facilement que ce nouveau projet nous fasse saliver d’avance. Au programme : quinze épisodes d’une quinzaine de minutes chacun mettant en vedette les univers de Armored Core, Concord, Crossfire, Donjons & Dragons, Exodus, Honor of Kings, Mega Man, New World, PAC-MAN, un mélange de titres PlayStation (avec notamment Kratos de God of War), Sifu, Spelunky, The Outer Worlds, Unreal Tournament, Warhammer 40,000. Quant au casting vocal, on note la présence de Patrick et d’Arnold Schwarzenegger, Keanu Reeves ou encore Kevin Hart. Bref, de notre point de vue, le show allait marquer cette fin d’année.

La description officielle est la suivante : Secret Level est une nouvelle série d’anthologie animée pour adultes qui présente des histoires originales se déroulant dans l’univers de certains des jeux vidéo les plus appréciés au monde. Créés par les créateurs de Love, Death & Robots, chacun des 15 épisodes est une célébration des jeux et des joueurs.

 

De notre côté, nous avons pu jeter un œil sur la grande majorité des épisodes composant la série et bien qu’une surprise soit toujours possible sur le peu qu’il nous manque, il faut reconnaître qu’en l’état, c’est la douche froide.

Une série AAA ?

Les gars de Blur Studio ont de l’expérience dans le photoréalisme et on peut dire que Secret Level fait preuve d’un haut degré de détails en ce qui concerne l’animation des personnages et les décors environnants. Question 3D, on peut estimer qu’on a devant nous ce qu’il se fait de mieux dans le domaine et l’épisode Donjons & Dragons a été, de loin, le plus impressionnant en la matière.

Néanmoins, la promesse d’une diversité d’animation n’est pas tenue. À l’heure où toutes les conversations tournent autour de la saison 2 d’Arcane (Netflix), louée pour sa direction artistique et son ambition graphique mettant en avant plusieurs techniques d’animation au sein d’une même séquence, cette expérience de Secret Level ressemble à un retour en arrière et un manque cruel d’originalité visuelle. Il est même facile de s’endormir au milieu d’une scène d’Unreal Tournament et de se réveiller devant Concord sans ressentir le changement d’épisode.

Secret Level
© Prime Video

Il ne faudra compter que sur Sifu et Spelunky pour proposer du neuf à ce niveau-là avec une direction artistique très proche des jeux. Sifu est, sans comparaison possible, le meilleur visionnage de ce Secret Level non seulement par son animation, mais également sa réalisation plus évolutive et une manière ingénieuse de mettre en scène la mécanique du jeu. Hormis ce dernier, tout semble ou presque avoir été conçu sur le même ton. Une impression accentuée par une absence de variété dans les contrastes, avec des couleurs ternes, et une absence générale de lumière dans les histoires choisies.

Concernant ces dernières, là encore, la pluralité n’est pas au rendez-vous. Pour ne citer que quatre exemples, Warhammer 40,000 nous présente une escouade d’Ultramarines faisant parler leur puissance avec une imagerie bien gore. Unreal Tournament nous parle de rébellion sous fond de tournoi à mort. Concord apporte une touche d’humour autour d’un équipage hétéroclite. Et Donjons & Dragons est une sorte de mini-quête pour un groupe d’aventuriers. En apparence, quatre scénarios différents, mais en l’état, l’ensemble est unanimement tourné vers l’action avec assez peu de dialogues. Peut-être que le choix des jeux n’est pas anodin — un RTS, un FPS, un RPG et un titre auquel personne n’a eu le temps de jouer avant qu’il ne disparaisse – puisqu’aucun n’a un gameplay faisant parler la subtilité et le pacifisme. Sauf que ça serait avoir une vision très réductrice de ces univers.

Secret Level (1)
© Prime Video

Un Secret Level trop secret ?

Le reste ne fera pas mieux, et même lorsqu’on sent enfin un vrai potentiel narratif, la durée trop courte des épisodes finira d’achever ce dernier. À l’image de l’épisode regroupant plusieurs licences Sony où des figures historiques ne font que passer sans avoir la latitude d’être plus qu’une apparition furtive. Seul The Outer Worlds nous aura fait sentir un réel enjeu et une envie de pousser le niveau de dramaturgie d’un médium trop restrictif.

Dans l’ensemble, quasiment aucun épisode n’a semblé vouloir raconter quelque chose des franchises dont ils s’inspirent, autre que de draguer le joueur avec des références et de la bagarre. Unreal Tournament cumule les clins d’œil autour de son modèle et rappelle de nombreux souvenirs, mais le générique de fin survint alors que le plus intéressant s’esquissait seulement. La durée limitée paraît être l’excuse parfaite pour s’empêcher d’explorer l’univers et chaque final ne nous aura provoqué qu’une réaction : et alors ? Chaque épisode nous aura fait l’effet d’une totale vacuité où le néophyte ne trouvera aucun point d’intérêt autre que visuel et le connaisseur s’amusera de ce qu’il maîtrise déjà tout en restant sur sa faim.

Secret Level (2)
© Prime Video

Quel est l’objectif de Secret Level ? Soit la réponse surviendra à la surprise générale à l’ultime épisode du parcours, soit la réponse ne plaira à personne. On visionne des longues cinématiques, graphiquement superbes – mais tout autant que le savoir-faire de Blizzard en la matière – dont le récit ne demande qu’à s’étendre au-delà. Mais quel au-delà ?

Le fait que la première bande-annonce de Secret Level ait été diffusée à la Gamescom paraît soudainement très à propos puisqu’on finit par se dire que le résultat recherché est de nous promettre un nouveau jeu tiré de chaque franchise, un nouveau DLC, ou, dans le cadre de Concord, simplement de nous faire y jouer (du moins, à l’époque du développement de la série). Est-ce réellement un show rendant hommage aux joueurs ou une opération marketing de grande ampleur avec chaque studio de jeu vidéo impliqué ? Le fait qu’Exodus, par exemple, soit tiré d’un jeu pas encore sorti en dit peut-être long sur le fameux objectif de « rendre hommage aux joueurs ».

Découvrir Secret Level sur Prime Video

Secret Level (3)
© Prime Video

🟣 Pour ne manquer aucune news sur le Journal du Geek, abonnez-vous sur Google Actualités. Et si vous nous adorez, on a une newsletter tous les matins.

Notre avis

Secret Level continue de nous prouver le talent de Blur Studio pour l'animation 3D. C'est bien tout ce que l'on retiendra d'une série faisant preuve d'un vide scénaristique et d'un manque d'ambition abyssal. Des longues cinématiques dont l'objectif semble être simplement de nous mettre la manette en main à l'heure où des titres comme Arcane ou Cyberpunk : Edgerunners ont démontré qu'on pouvait réaliser de grandes séries autour du jeu vidéo. Secret Level n'avait simplement pas le cheat code.

L'avis du Journal du Geek :

Note : 4 / 10

Mode