Parfois, pour nous donner envie de courir en salles, il suffit d’associer un nom avec un projet qui sent bon le cinéma bis. Par exemple, Jason Statham vs un Mégalodon dans En eaux troubles (et bientôt sa suite). Alors quand on nous vend le Dieu hollywoodien du surjeu cocaïné, alias Nicolas Cage, en Comte Dracula, on était obligés de sortir la carte bancaire pour acheter Renfield.
Renfield, c’est Nicholas Hoult jouant le serviteur du célèbre vampire, s’occupant des tâches ingrates comme lui fournir des victimes à sucer. Pris au piège de cette relation de codépendance toxique, Renfield va se découvrir le courage de se rebeller au contact de Becca (Awkwafina), flic incorruptible essayant d’arrêter le cartel qui contrôle la ville dans laquelle Dracula et son sbire viennent de s’installer.
On ne le dira jamais assez, on est plus que ravis de revoir Nic Cage hors du cercle des Direct-to-Video dans lequel il semblait s’être piégé, pris en otage sous les impôts à payer et les projets n’arrivant pas à se hisser à la hauteur de l’homme. Une résurgence dans les salles obscures avec de beaux rôles comme dans Joe ou des délires métas à l’image d’Un talent en or massif. Renfield n’a pas l’écriture de l’un ni même l’amusement de l’autre, mais il permet à l’acteur de vampiriser un film qui n’a du goût que par sa présence.
L’occasion pour le comédien non pas d’enfiler la cape de tout ceux qui l’ont précédé derrière les crocs de cette figure fantastique mythique, mais de réaliser un numéro d’équilibriste entre l’obscurité du personnage et le cabotinage de celui qui l’incarne. Magnétique, terrifiant, plaisantin, mordant, ce n’est pas Dracula, c’est Nicula et à ce jeu-là, il bouffe l’ensemble d’un casting qui se débat dans son ombre.
D’autant que le métrage parvient à apporter sa pierre à l’édifice de la légende vampirique en s’intéressant à sa facette la plus manipulatrice. Comme si Keanu Reeves avait succombé aux charmes de Gary Oldman dans le Dracula de Coppola. Une matière première idéale pour dériver sur un propos bien plus contemporain et principal fil rouge du film : les pervers narcissiques et leurs victimes. Qu’est-ce qui différencie un vampire d’une chef de cartel dirigeant son empire par la peur ? Les crocs. Non sans user de l’humour comme arme de dénonciation, Renfield interroge notre rapport à la hiérarchie, à la soumission et à notre capacité à sortir d’un cercle vicieux dans lequel on ne parvient plus à dire non.
Et pour jouer le rôle de l’employé martyrisé sans aucun pouvoir sur son destin, le réalisateur Chris McKay peut compter sur la figure blanchâtre et apeurée d’un Nicholas Hoult rompu à l’exercice du zombie sans volonté. L’acteur nous livre une prestation qui n’est pas sans rappeler le mort-vivant qu’il incarnait dans Warm Bodies une décennie auparavant. Rôle différent, même énergie.
Renfield en manque de sang
Renfield a donc pour lui un pitch malin, bien mené au début (la réunion d’anonymes où notre sbire dénonce les agissements de son patron sans les détails gore pour qu’on l’associe à n’importe quel boss) et un duo incarné et bien trouvé. Bref, on sent pointer la petite réussite qu’on n’attendait pas.
Sauf qu’incompréhensiblement, le film lâche rapidement la rampe pour bifurquer vers la comédie d’action sanglante générique au possible. Dès qu’Awkwafina et sa guerre contre le cartel rentre en jeu, le métrage se désintéresse de son propos de base pour tomber dans une énième inspiration Deadpoolienne où un mec avec de super-pouvoirs va mutiler salement des figurants en appuyant bien sur le côté comique de la chose parce que le démembrement, c’est rigolo. Niveau serviteur déboussolé, on a vu mieux.
Une entreprise de sabotage relativement bien fichue, puisque niveau divertissement, il faut admettre qu’on ne s’ennuie pas devant un film qui ne dure qu’une heure trente. Comme s’il savait que ses idées ne tiendraient de toute manière pas la longueur.
Certes, les scènes d’action sont rigolotes et on ne passe pas foncièrement un mauvais moment. Le long-métrage n’est absolument pas ce qu’il nous avait promis, ce qu’il semblait être, et il peut s’apprécier pour ce qu’il est. Néanmoins, Renfield reste en travers de la gorge comme un acte manqué, une promesse non tenue et un Nicolas Cage trop peu présent. Un film au potentiel gâché, qui se contente d’être dans la moyenne, distrayant faute de mieux.
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