En marge du Marvel Cinematic Universe, Sony capitalise sur les hĂ©ros de la maison des idĂ©es avec son univers connectĂ©. La firme sâintĂ©resse Ă de nombreux personnages de papier glacĂ©, et notamment ceux qui gravitent autour de lâhomme araignĂ©e. Ce nâĂ©tait donc plus quâune question de temps avant que la firme ne se penche sur le sort de Morbius, anti-hĂ©ros sombre aux allures de Dracula des temps modernes.
Lâintrigue suit Michael Morbius, un petit gĂ©nie atteint dâune maladie orpheline. Dans un dernier espoir de sauver tous les gens atteints de la mĂȘme pathologie, il dĂ©veloppe un remĂšde Ă partir de gĂȘne de chauve-souris vampires.
Mais son projet va tourner au cauchemar quand aprĂšs sâĂȘtre inoculĂ© ce mystĂ©rieux remĂšde, il se dĂ©couvre un appĂ©tit insatiable pour le sang. TraquĂ© de toutes parts, Morbius devra affronter un ennemi aussi puissant que lui, et composer avec son envie irrĂ©pressible de consommer le sang de chaque personne quâil croise.
Le Sonyâs Spider-Man Universe est encore balbutiant. La franchise a Ă©tĂ© lancĂ©e en 2017 avec Spider-Man : Homecoming, oĂč lâhomme araignĂ©e Ă©tait incarnĂ© par un certain Tom Holland. Depuis, grĂące Ă la popularitĂ© du tisseur de toile, le personnage sâest imposĂ© parmi les plus grosses licences du box-office ; No Way Home ayant atteint des sommes records Ă travers le globe.
Lâintroduction de Venom a Ă©tĂ© plus laborieuse, avec deux opus Ă la qualitĂ© scĂ©naristique discutable. NĂ©anmoins, le public semble avoir Ă©tĂ© conquis, le second volet rĂ©alisĂ© par Andy Serkis a amassĂ© pas moins de 502,1 millions de dollars au box-office. La recette est lucrative, Sony ne va donc pas changer son fusil dâĂ©paule.
Sang pour sang Marvel ?
Le mythe du vampire n’est pas nouveau au cinĂ©ma, donnant naissance Ă des chef-d’Ćuvres fantastiques Ă lâimage de Dracula de Francis Ford Coppola ou encore Entretien avec un Vampire de Neil Jordan.
Sony arrive donc en terrain minĂ© avec Morbius, qui entend piocher du cĂŽtĂ© de lâhorreur pour se distinguer des productions Ă©dulcorĂ©es de Marvel chez Disney. Un postulat de dĂ©part plutĂŽt intĂ©ressant qui promettait dâun peu renouveler le genre. Pour ce faire, Sony recrute Daniel Espinosa, Ă qui lâon doit Life : Origine Inconnue sorti sur nos Ă©crans en 2017.
AprĂšs nous avoir offert une incursion Ă la frontiĂšre entre la science-fiction et lâhorreur, le cinĂ©aste tente d’instiller sa maĂźtrise du genre avec des sĂ©quences horrifiques maĂźtrisĂ©es, mais trop peu nombreuses. Car lĂ oĂč il aurait pu embrasser tout Ă fait la dimension gothique du long-mĂ©trage, Espinosa prĂ©fĂšre nous plonger dans une dĂ©bauche dâeffets numĂ©riques douteux, au cĆur dâune citĂ© moderne et dĂ©sincarnĂ©e.
Si The Batman avait Ă cĆur de sâimposer comme un exercice de style, Morbius nous rappelle douloureusement que le film de Matt Reeves fait figure dâexception. Du cĂŽtĂ© des effets numĂ©riques dâailleurs, le film semble tout droit sorti dâun Ă©pisode de Buffy contre les vampires. Le look des personnages, trĂšs fidĂšles Ă celui des comics, ne fonctionne pas, pire cela en devient presque risible Ă certains moments.
La mise en scĂšne en autopilot continue dâenfermer Morbius dans son cercueil de clichĂ©s, rien ne pourra visiblement sauver ce long-mĂ©trage du naufrage. On ne peut nĂ©anmoins pas nĂ©gliger les scĂšnes d’action, qui sont de plutĂŽt bonne facture. Tout n’est pas Ă jeter.
Ail, ail, ail ça piqueâŠ
Cet intertitre nâest pas uniquement une blague douteuse sur la crĂ©ature dont sâinspire Morbius, mais plutĂŽt le triste constat dâun rendez-vous manquĂ©. Mettre en scĂšne des antihĂ©ros, Ă la limite de lâantagoniste, est un gros dĂ©fi pour les studios ; ils ne parviendront pas Ă le relever. Morbius se serait plus Ă©panoui dans un film de monstre, Sony a prĂ©fĂ©rĂ© jouer la sĂ©curitĂ© en ne sâĂ©cartant finalement que trĂšs peu de son cahier des charges.
Dans sa construction, la nouvelle bĂȘte de Sony a de nombreuses lacunes. DĂ©jĂ , parce qu’elle tente de puiser ses inspirations Ă peu prĂšs partout, sans jamais rĂ©ussir Ă faire Ă©clore un divertissement grandiloquent comme elle l’ambitionne. Mais aussi et surtout parce qu’elle ne rend jamais hommage aux genres qui lâinfusent.
Le thriller rencontre le fantastique et lâhorreur, mais la mayonnaise ne prend pas. La faute Ă une construction lacunaire et un souci de rythme. Ă ne jamais vraiment choisir de ligne conductrice, Morbius nâĂ©vite pas la sortie de route.
à renfort de grosses ficelles scénaristiques pour nous rapprocher du combat final, le film écrit par Burk Sharpless et Matt Sazama balaie de la main tous les éléments qui auraient pu le rendre plus intéressant.
Lâenjeu principal de cette mutation, lâenvie irrĂ©pressible de sâabreuver du sang de pauvres innocents, trouve sa rĂ©solution dĂšs les premiers instants. Morbius ne deviendra pas un tueur sanguinaire sans pitiĂ©, il a crĂ©Ă© du sang bleu quelques mois auparavant.
Pourtant, lâintroduction est loin dâĂȘtre mauvaise. On prend dâailleurs plus de plaisir Ă le voir se battre contre ses nouvelles pulsions que contre son antagoniste, incarnĂ© par un Matt Smith qui nous avait habituĂ©s Ă mieux.
Entendons-nous bien, câest quand mĂȘme mieux que Venom : Let There Be Carnage, mais câest loin dâĂȘtre suffisant pour nous convaincre. Heureusement, Morbius a un solide atout dans sa poche : sa durĂ©e rĂ©duite d’une heure et quarante minutes.
Morbius Horror Picture Show
Jared Leto change de crĂ©merie. Lâacteur, qui a de nombreux trĂšs beaux rĂŽles Ă son actif, espĂ©rait sans doute faire oublier son tristement bafouĂ© Joker devant la camĂ©ra de David Ayer chez DC.
Et on peut dire que son incarnation nâest pas dĂ©nuĂ©e dâintĂ©rĂȘt. Lâacteur navigue comme il peut dans cet ocĂ©an dâincohĂ©rences et de facilitĂ©s scĂ©naristiques, mĂȘme sâil nâest pas aidĂ© par les dialogues qui manquent cruellement de densitĂ©.
Autour de lui gravitent des acteurs de sa trempe, du moins sur le papier. Matt Smith, qui confiait rĂ©cemment ne pas avoir tout compris au sujet du personnage quâil campe, sâimpose en grand mĂ©chant caricatural et trĂšs bavard.
Jared Harris est quant Ă lui injustement relĂ©guĂ© au second plan, alors quâil aurait mĂ©ritĂ© plus de lumiĂšre. Adria Arjona dans la peau de la scientifique et collaboratrice de Morbius sâen sort plutĂŽt bien. Les autres acteurs sont cantonnĂ©s aux rĂŽles de figurants, Ă lâinstar de Tyrese Gibson et Al Madrigal qui jouent les deux agents de police.
Reste Ă voir quel accueil le public rĂ©servera Ă Morbius. Face Ă la surpuissante, et il faut bien lâadmettre efficace, recette Marvel chez Disney, Sony peine Ă sâimposer comme une rĂ©fĂ©rence pour les amateurs de productions super-hĂ©roĂŻques.
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