James Bond, Jason Bourne, L’agence tout risque, Jack Reacher, Mission Impossible… Les années 2000-2010 ont décidément été prolifiques pour les agents infiltrés à tendance cascadeurs. Alors que l’espion de Sa Majesté s’est tourné vers une atmosphère plus sombre, le virage entamé par Ethan Hunt est clairement axé sur la surenchère.
Si les situations désespérées ont toujours fait partie de l’ADN de la série, l’épisode original de Brian de Palma semble désormais révolu. Depuis celui de John Woo (MI 2), la saga n’a de cesse de repousser ses propres limites, quitte à perdre peu à peu la forme de crédibilité dont elle disposait jusque-là. Une vision décomplexée, loin des véritables codes de l’espionnage, qui a réussi à séduire un public friand d’effets spéciaux et de moments de bravoure en tout genre.
Une fois n’est pas coutume, le long-métrage se base sur une menace de destruction globale. En possession d’une cache de plutonium suite à une erreur de l’IMF (Impossible Missions Force), un groupe anarchiste nommé « Le Syndicat » entend bien créer le chaos dans le monde. Ethan Hunt (Tom Cruise) et son équipe vont essayer de les stopper en arrêtant Soloman Lane, à la tête du groupe. La CIA s’interroge sur les intentions de Hunt et décide d’envoyer August Walker (Henry Cavill) pour l’arrêter. Pris entre deux feux, il va faire face à de multiples dangers.
McQuarrie se sert de ce scénario catastrophique et presque banal dans la serie pour livrer un impressionnant récital d’action. Il expulse les enjeux du film en une scène explicative de quelques minutes pour nous lancer au plus vite dans sa fournaise visuelle. Elle consiste en un enchaînement de saynètes parfaitement réalisées, délivrées à un rythme métronomique pendant 2h30.
Certaines d’entre elles sont d’ailleurs vouées à devenir emblématiques du second cycle de la saga, débutée avec Protocole Fantôme. C’est notamment le cas d’une escapade parisienne survoltée, qui représente le meilleur tiers du film. Le réalisateur nous gratifie pèle mêle d’une chute libre vertigineuse au-dessus du Grand Palais, mais également d’une course-poursuite dans les rues (peu bondées) de la capitale, qui se pose comme un modèle de genre.
Chaque situation désespérée empire comme pour se rendre volontairement plus spectaculaire. Un accident de fourgonnette se transforme ainsi en piège mortel lorsque cette dernière tombe dans la Seine, provoquant une séquence aquatique aussi originale qu’inattendue.
En intérieur, l’ensemble se veut un peu moins inspiré. Les joutes au corps à corps sont parfaitement chorégraphiées, mais la photographie clinquante et les barbouzes aux costumes impeccables donnent l’impression de regarder une pub d’action commandée par Gucci.
McQuarrie essaye à plusieurs reprises de nous suggérer qu’une page se tourne dans la saga. Battu à plate couture par un expert des arts martiaux, Cruise, 56 ans, doit s’en remettre au robuste Henry Cavill et à Rebecca Ferguson pour s’en sortir. Mais l’élégance de sa comparse et la bonhomie du nouveau Superman n’y font rien : il est le garant d’une franchise qui aura du mal à perdurer sans lui.
Preuve en est, cet épisode a encore du mal à créer un véritable antagoniste à Ethan Hunt. Ce que James Bond a réussi à faire en enchaînant les castings audacieux (Mads Mikkelsen, Javier Bardem, Christoph Waltz…). Même les pitreries de Simon Pegg semblent avoir été mis en sourdine.
Cette réticence à écorner sa vedette se constate dans la dernière demi-heure, où McQuarrie envoit valdinguer les lois de la physique des corps et des objets. Une séquence contre la montre si hallucinée qu’elle fera même sourire les fans.
Mais ici encore, le réalisateur assure le spectacle et arrive à nous accrocher à son grand-huit, dont l’apogée est atteinte lors d’une bataille d’hélicoptère mémorable mais cartoonesque. Sans jamais faire naître une quelconque inquiétude quant à son déroulement, le long-métrage nous laisse repu. Ça tombe bien, c’était ce qu’on lui demandait.
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