Le temps passe et passe et passe et beaucoup de choses ont changé. Qui aurait pu s’imaginer que la saga Mission : Impossible aurait autant évolué ? Et si on a bien envie de faire le bilan, calmement, en se remémorant chaque instant, Mission : Impossible – Dead Reckoning Partie 1 nous rappelle que la licence n’a pas dit son dernier mot, et encore moins sa tête d’affiche.
D’autant que si, à 61 ans, on aurait pu penser que Tom Cruise commençait à préparer sa retraite de super-agent avec un dernier diptyque pour la route, le réalisateur Christopher McQuarrie a récemment déclaré que Dead Reckoning ne signait pas forcément la fin de la force Mission : Impossible. Une suite que l’on pourrait envisager sans Ethan Hunt ? À voir le film, aucune chance.
Ici, Ethan doit affronter une menace inédite capable de contrôler l’ensemble des systèmes jusqu’à pouvoir prédire le futur. Hunt et son équipe vont devoir remonter le fil pour tenter de localiser et de stopper cet ennemi qui connaît tout d’eux. Mais entre réussir sa mission et sauver ses amis, Ethan va être amené à faire des choix.
Évidemment, il paraît inconvenant de réduire Tom Cruise à son âge, d’autant que celui-ci n’en a jamais fait un frein à ses exploits, de sorte qu’on finisse par le voir comme la star qui refuse de vieillir. Néanmoins, l’acteur, qui se raconte constamment au travers ses choix de carrière, semble de plus en plus conscient de son appartenance à un autre temps ; temps qu’il s’efforce de maintenir en vie de la plus belle façon qui soit : en faisant du cinéma. Top Gun : Maverick était une ode à une époque finalement pas si révolue avec des effets réels prenant le pas sur le numérique ; ou la nouvelle garde ne pouvait concurrencer l’ancienne ; ou Tom Cruise sauvait le monde et emballait la fille.
Un esprit qui l’a suivi jusque dans sa résidence cinématographique principale car, si Mission : Impossible n’a jamais auparavant ne serait-ce qu’envisager son héros vieillir (alors qu’il court depuis 1996), cette première partie de Dead Reckoning nous plonge dans ce qui paraît être la nouvelle obsession de son acteur / producteur : le passé face au futur.
Le Tom entre deux chaises
Pour une fois, le méchant de service (Esai Morales, jamais menaçant) et les camarades de Hunt (Ving Rhames et Simon Pegg) sont d’accord : Ethan ne peut pas réussir cette mission. Face à un ennemi intangible, numérique, qui peut tout prédire, la vieille équipe n’a aucune chance. Il est facile d’y déchiffrer une allégorie du temps qui passe, de l’évolution inexorable du blockbuster (et du cinéma en général) vers un mode de fonctionnement plus programmatique, plus prévisible, moins coûteux, devant lequel chacun doit se soumettre, mais celui qui a grandement participé à donner au genre ses lettres de noblesse. Ça serait mal connaître le bonhomme.
Pendant 163 minutes, Tom Cruise, aidé par son fidèle metteur en scène Christopher McQuarrie, va encore démontrer que l’action se doit d’être physique, palpable, nous entraînant dans une séquence de course-poursuite à Rome recouvrant sans difficulté les traces de pneus de Fast and Furious X ou dans la fameuse scène du saut en parachute, moment de bravoure que la branche marketing du studio aura mise en avant jusqu’à plus soif. Avec une redondance presque parodique, Ethan Hunt court, beaucoup, comme pour rappeler les forces de cette saga que son interprète a construit à la force de ses mollets.
L’homme est inépuisable jusqu’à la caricature, flirtant sans gêne avec son pendant le plus james bondien dès lors que la gent féminine pose un regard sur lui. C’est peut-être là que la peur de vieillir se ressent comme jamais auparavant : là où on s’était habitué à la cure de jouvence physique, voilà que le scénario se met également à lui redonner ses trente ans.
Un scénario continuellement soumis à ce leadership incontestable au bout de s’écraser sous son poids. Le long-métrage ne parvient pas à exister sans son héros, l’iconisant à la manière d’un John Woo dans le second volet ou se prenant les pieds dans le tapis dès lors qu’il faut raconter autre chose. On se retrouve avec une intrigue inutilement confuse et des personnages secondaires complètement sacrifiés jusqu’à nous gâcher Rebecca Ferguson (pourtant le meilleur ajout à la licence).
Et c’est là qu’on commence à voir les ténèbres au bout du tunnel. Mission : Impossible – Dead Reckoning Partie 1 n’est pas tant le début de la fin pour un Tom Cruise en déification de lui-même que, peut-être, celle de la saga qui, bien que toujours fleuron du cinéma de divertissement, commence sérieusement à manquer de surprise, ne parvenant pas vraiment à renouveler la franchise. Ultime signe de fatigue, le numérique ne s’est jamais autant invité à la fête, comme s’il fallait offrir une béquille à un canard rebelle, mais légèrement boiteux. Si le jour où Mission : Impossible faillira n’est pas encore arrivé, il est désormais évident qu’on se rapproche de la fin.
🟣 Pour ne manquer aucune news sur le Journal du Geek, abonnez-vous sur Google Actualités. Et si vous nous adorez, on a une newsletter tous les matins.