Critique Loki saison 2 : la série Toujours Vraiment Appréciable 🕓

Il y a encore quelques mois, Marvel remplissait les salles obscures sans entrave. Depuis Iron Man en 2008, le studio est parvenu à mettre sur pied une franchise tentaculaire au succès incontestable. Avec plus de deux milliards de dollars au box-office mondial, Avengers : Endgame faisait office de consécration pour cette machine décidément bien huilée.

Mais voilà, après une décennie de succès, la Maison des Idées rencontrait cette année de premières embûches. Ant-Man et la Guêpe : Quantumania n’a pas été le succès escompté dans les salles obscures. Si d’aucun pourrait croire que son exploration du petit écran serait synonyme de renouveau, Wandavision l’a été, le reste continue d’éprouver quelques difficultés à convaincre. Même chez les spectateurs largement acquis à sa cause, la franchise déçoit. Aucune série n’a été assez populaire pour être renouvelée. Aucune ? Pas vraiment puisque Loki bénéficie d’un traitement de faveur. Le personnage campé par Tom Hiddleston revient pour de nouvelles aventures sur Disney. Le dieu de la malice nous fait-il perdre notre temps ?

Après sa rencontre avec Celui Qui Demeure, Loki se retrouve face aux conséquences de ses actes… et surtout celles du choix de Sylvie. La variante a tué le créateur de la TVA ouvrant par la même occasion les portes du multivers. Ce retour du libre arbitre n’a pas eu le succès escompté, l’avenir de ses réalités alternatives est en danger. Loki, Mobius et B-15, désormais seuls maîtres à bord de l’institution proche de l’effondrement, doivent aussi composer avec la menace latente d’un nouveau variant du créateur de la TVA. De son côté, Ravonna Renslayer est aux abonnés absents.

Quand je serai grand, je veux être…

Véritable ovni au sein d’un univers cinématographie calibré, la première saison offrait aux productions super-héroïques une occasion de faire peau neuve. La recette d’un tel exploit : la création de Michael Waldron n’en était pas vraiment une. Le frère adoptif de Thor a toujours joué avec les lignes, lorgnant allégrement du côté des méchants aussi bien que de celui des sauveurs. Sa morale n’est pas à toute épreuve, il fait tout par intérêt et n’hésitera pas à vous trahir si le cœur lui en dit. Ce personnage vaniteux et manipulateur s’était pourtant offert quelques rédemptions, comme lorsqu’il a sacrifié sa vie face à Thanos dans Infinity War. Ainsi, sa première apparition sur Disney+ n’avait rien d’une épopée classique.

Il lui fallait naviguer entre la perspective d’un avenir loin des siens et d’une lourde dette à payer pour sa tentative d’évasion à New-York en 2012. La première salve évoluait autour des différents événements déterminants de sa longue carrière chez Marvel, tout en le confrontant à un double bien décidé à mettre en branle la “ligne temporelle sacrée” de la TVA et de rétablir le libre-arbitre.

Quatre minutes pour sauver le monde

C’est sans doute là le principal atout d’une exploration de ce concept de multivers sur nos écrans, la manière qu’il a de parler de déterminisme social. Le plus souvent, l’histoire s’en empare pour raconter l’affranchissement de ses héros. Spider-Man Across the Spider-Verse est sans conteste l’exemple le plus parlant, le film d’animation évoluant autour de ces moments inéluctables pour chaque porteur du costume.

Pourtant, après avoir raconté la lutte de Sylvie et Loki contre la TVA, il s’agit désormais de mettre en scène la manière dont ils vont devoir la sauver. Cette quête pour le libre-arbitre en devient plus nuancée, elle est à l’épicentre des relations entre les personnages. Certains décident d’embrasser leurs vocations et de renoncer à un retour à la réalité tandis que d’autres s’engagent loin de la TVA pour découvrir ce qu’ils auraient pu être.

Si les quatre épisodes que nous avons pu voir ne jonglent pas toujours bien avec cette idée, qui est souvent ensevelie sous de longues tirades aux allures de charabia temporel, Loki ne perd rien de son attrait. On lui reprochera seulement un rythme parfois trop effréné, qui ne permet pas toujours aux spectateurs de prendre la mesure des dilemmes auxquels les héros sont confrontés.

À travers ces voyages dans le temps et ces missions périlleuses, la série désormais chapeautée par Eric Martin parle surtout d’une quête de sens pour des protagonistes privés de passé et d’avenir. Elle a tendance à s’éparpiller, avec une vaste galerie de personnages, Loki apparaît occasionnellement être au second plan de sa propre série. Cette seconde salve parvient tout de même à dresser les portraits de chacun d’entre eux, entre sensibilité et humour ravageur. Mais ce n’est pas qu’un voyage introspectif, c’est surtout une course contre-la-montre bien menée.

Loki Who ?

Dans sa seconde saison, Loki change un peu d’approche. Pour nos héros, l’heure n’est pas à l’émancipation, mais à la résolution d’un problème qui pourrait être à l’origine d’une nouvelle guerre du multivers. Le premier épisode mise sur une tension de tous les instants pour poser les enjeux de son récit. Après un huis clos d’une efficacité redoutable, jouant habilement sur ces concepts, la dernière-née des studios s’embarque dans un nouveau voyage à travers le temps et l’espace.

Loin des décors pourtant ludiques de la TVA, la série se réinvente à la sauce Doctor Who. La mise en scène gagne aussi en pertinence, devenant plus franche dans sa démarche. Appuyant les blagues ou immortalisant l’ambiance de ces décors et époques, Loki s’inscrit aisément dans ce que Marvel fait de mieux sur le petit écran et même le grand. La musique originale, composée par Natalie Holt, fini d’ajouter quelques couleurs à cette exploration plutôt fascinante du multivers. Il reste évidemment encore deux épisodes pour définitivement trancher, mais Loki est déjà notre nouvelle obsession. Les nouveaux visages de ce récit n’y sont pas étrangers.

Si Tom Hiddleston n’a plus à prouver sa maîtrise du personnage et ses nuances, il n’est pas le seul artiste de talent au casting de cette production. Owen Wilson continue de nous régaler avec les joutes verbales auxquelles il s’adonne face au dieu de la malice. L’acteur prouve qu’il n’y a pas besoin de connaître le MCU dans tous ses recoins, il a tout appris de Tom Hiddleston, pour y trouver sa place. Wunmi Mosaku, qui incarne B-15 semble un peu en retrait pour cette nouvelle salve, mais devrait revenir sur le devant de la scène à plus d’un titre. Enfin, la série profite d’un ajout non négligeable.

Inviter Ke Huy Quan est sans doute la meilleure idée de la série à ce jour, l’acteur étant déjà particulièrement au fait des explorations du multivers. Depuis Everything, Everywhere All At Once, l’américain de 52 ans est de tous les rendez-vous. Il déploie encore une énergie folle pour camper l’attachant O.B, ingénieur lunaire qui participe grandement à rendre cette suite des aventures de Loki aussi réjouissante que possible. Le seul bémol réside sans doute dans la partition confiée à Sophia Di Martino. Alors que sa sincérité se voulait criante dans la précédente saison, l’actrice qui campe Sylvie est désormais confrontée à une écriture un peu plus lacunaire. Il s’agit surtout pour le récit de la placer dans un entre-deux qui ne lui sied guère. On soulignera que de tous les personnages, celui de l’horloge parlante Miss Minutes est sans doute celui qui nous offre le plus de moments surprenants.

Au terme de ces quatre premiers épisodes, d’une saison qui en comporte six, Loki s’impose encore comme le haut du panier chez Marvel. Malgré ses quelques défauts, dans le fond comme la forme, la série imaginée par Michael Waldron et dorénavant portée par Eric Martin continue de nous faire voir la vie en vert.

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