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Critique Les Trois Mousquetaires : Milady, blockbuster Ă  double tranchant 🗡

On prend les mĂȘmes et on recommence. Un peu plus de six mois aprĂšs D’Artagnan, la saga Les Trois Mousquetaires revient au cinĂ©ma avec une conclusion qui s’annonçait Ă©pique. L’épĂ©e du jeune gascon est-elle Ă©moussĂ©e ? Critique.

En avril dernier, PathĂ© investissait les salles obscures d’une mission capitale pour le grand divertissement Ă  “la française”. Lorgnant sur les succĂšs des mastodontes d’Hollywood, l’exploitant de salles et producteur français s’apprĂȘtait Ă  livrer sa propre franchise blockbuster. Ici, pas de super-hĂ©ros en cape et en collants, mais une armĂ©e de justiciers au service de Louis XIII et face Ă  un complot politique d’envergure.

PensĂ©e comme une cĂ©lĂ©bration Ă  l’imaginaire de Dumas, cette Ă©niĂšme adaptation des aventures d’Athos, Porthos, Aramis et D’Artagnan voulait jouer de tous les superlatifs pour attirer les amateurs de films de cape et d’épĂ©e autant que les novices. PathĂ© n’a pas fait les choses Ă  moitiĂ© en recrutant toutes les stars montantes et bien installĂ©es du cinĂ©ma français. François Civil, Pio MarmaĂŻ, Vincent Cassel ou encore Lina Khoudri, Les Trois Mousquetaires 2.0 avaient fiĂšre allure. La campagne de sĂ©duction a Ă©tĂ© couronnĂ©e de succĂšs puisque le film a rĂ©uni plus de trois millions de spectateurs Ă  sa sortie. Le premier volet s’offre d’ailleurs une nouvelle exploitation quelques jours avant l’arrivĂ©e du deuxiĂšme film, une occasion rĂȘvĂ©e pour PathĂ© de gonfler encore un peu ces chiffres dĂ©jĂ  mirobolants. Sa suite peut-elle surpasser ces excellents rĂ©sultats, bien aidĂ©e par une pĂ©riode de vacances scolaires et de fĂȘtes de fin d’annĂ©e ?

Les 3 Mousquetaires 2 Pathé
© Pathé

AprĂšs la phase d’exposition, ayant vocation Ă  prĂ©senter les personnages lĂ©gendaires et Ă  introduire les enjeux narratifs, les choses se corsent pour les Mousquetaires du Roi. L’étau se resserre autour de la couronne qui se retrouve face Ă  une guerre de religions, menacĂ©e d’invasion par l’Angleterre. Le jeune D’Artagnan poursuit sa quĂȘte de vĂ©ritĂ© et croise Ă  nouveau le chemin — et le fer — de Milady de Winter. Comme son nom l’indique, ce nouveau film entend explorer le passĂ© tumultueux de l’espionne tout en livrant des sĂ©quences de combats Ă©piques, des moments tragiques avec toujours l’aventure pour seul guide.

Le revers de la médaille

Les lecteurs du roman de Dumas le savent, le premier volet n’était qu’une entrĂ©e en matiĂšre. Assez habilement, les scĂ©naristes Matthieu Delaporte et Alexandre de la PatelliĂšre ont choisi de scinder leur rĂ©cit en deux chapitres distincts. L’adoubement de D’Artagnan fait ainsi office de point de bascule du rĂ©cit, la fin de son parcours initiatique. Maintenant que le hĂ©ros est bien installĂ©, les deux auteurs peuvent se pencher sur la destinĂ©e de son antagoniste : la dĂ©routante Milady de Winter.

AprĂšs avoir Ă©tĂ© cantonnĂ©e Ă  la figure d’espionnage mystĂ©rieuse et envoutante, la narration lui offre enfin l’espace pour construire sa mythologie. Toujours portĂ©e par une Eva Green au meilleur de sa forme, le protagoniste attire toute la lumiĂšre. Le film manie avec beaucoup d’aisance toute son ambivalence, il construit un nouveau sous-texte malin autour de la condition fĂ©minine et de son Ă©mancipation. Matthieu Delaporte et Alexandre de la PatelliĂšre s’affranchissent du rĂ©cit originel pour rĂ©inventer cette femme a priori sans scrupules, pour la doter de nouvelles motivations et ainsi faire naĂźtre une anti-hĂ©roĂŻne loin d’ĂȘtre manichĂ©enne. Le revers de la mĂ©daille de tels choix ne tarde nĂ©anmoins pas Ă  se faire ressentir, D’Artagnan s’en retrouve coincĂ© dans une caractĂ©risation archĂ©typale du hĂ©ros. Si leur rencontre prĂȘte Ă  sourire, le film rejoue leurs confrontations sous la forme d’une collaboration forcĂ©e, tous les changements opĂ©rĂ©s ne sont pas aurĂ©olĂ©s de rĂ©ussite.

Athos Les Trois Mousquetaires
© Pathé

Vous avez la lame Ă  l’Ɠil ?

Le volet politique en devient ainsi plus confus, voire anecdotique. Si Les Trois Mousquetaires est avant tout une histoire de personnages, le premier opus parvenait pourtant Ă  rendre les intrigues de la couronne plus captivantes. C’est d’autant plus dommageable qu’en dehors du duo de tĂȘte, et de Constance Bonacieux, Les Trois Mousquetaires : Milady n’offre pas Ă  chacun la part de lumiĂšre qu’il mĂ©rite. La franche camaraderie du premier opus est mise au second plan et l’alchimie entre le quatuor de tĂȘte aurait mĂ©ritĂ© d’ĂȘtre plus accentuĂ©e pour faire honneur Ă  la promesse d’une rĂ©union de quatre Mousquetaires haut en couleur.

EsquissĂ©s dans le prĂ©cĂ©dent volet, Porthos et Aramis se retrouvent engluĂ©s dans un emploi purement comique, au cƓur de scĂ©nettes aux allures de points de rupture avec la tonalitĂ© gĂ©nĂ©rale plus dramatique. De son cĂŽtĂ©, Louis Garrel continue de nous rĂ©galer en Louis XII, pĂ©tri de mimiques amusantes et avec un tempo comique impeccable.

D'artagnan Les Trois Mousquetaires
© Pathé

Les lecteurs le savent, l’entrain des premiers jours est loin pour nos mousquetaires qui traversent une pĂ©riode plus funeste de leur histoire. Ce blockbuster Ă  la française doit ainsi se parer de noir Ă  mesure que la tragĂ©die s’invite. Et lĂ , c’est le drame. Usant et abusant des violons pour faire pleurer dans les chaumiĂšres, Milady est souvent dissonant. Le film ne s’épanouit pas dans le registre dramatique, la faute sans doute Ă  des protagonistes qui n’auront finalement pas eu le loisir de se rendre assez attachants pour Ă©mouvoir. Ce second volet n’est pas poignant, il tire frĂ©quemment vers le mĂ©lo et le soap opĂ©ra. Si la part d’action est une franche rĂ©ussite, il manque Ă  Milady la sensibilitĂ© nĂ©cessaire Ă  l’Ă©closion d’une adaptation parfaite.

Trancher dans le vif

MalgrĂ© toute la gĂ©nĂ©rositĂ© de sa mise en scĂšne, se prĂ©lassant dans les dĂ©cors naturels de nos vertes contrĂ©es et immortalisant un Paris historique, le premier volet des aventures de D’Artagnan et ses compĂšres manquait d’un peu (beaucoup) de lumiĂšre. Sans doute inspirĂ© par les propositions plus en plus grisonnantes des studios Hollywoodien, Les Trois Mousquetaires avait troquĂ© les ambiances et costumes colorĂ©s de ses ancĂȘtres pour se vĂȘtir de crasse et de bruns. Les spectateurs rĂ©fractaires Ă  cette esthĂ©tique ont Ă©tĂ© entendus puisque le rĂ©alisateur Martin Bourboulon a confiĂ© Ă  PremiĂšre avoir opĂ©rĂ© quelques changements de colorimĂ©trie en salle de montage.

Cardinal Richelieu Les Trois Mousquetaires
© Pathé

Le siĂšge de la Rochelle permet aussi Ă  son divertissement de se doter de dĂ©cors plus riches, de s’extraire des forĂȘts sombres qui avaient Ă©tĂ© le thĂ©Ăątre de nombreuses scĂšnes dans le premier film. Plus contrastĂ© et lumineux, ce nouveau mĂ©trage jouit d’une mise en scĂšne efficace, gĂ©nĂ©reuse et ambitieuse. Si certaines scĂšnes de combat manquent d’ampleur, reposant trop souvent sur un montage Ă©pileptique qui ne rend pas justice Ă  l’impressionnant travail chorĂ©graphique, Les Trois Mousquetaires touche frĂ©quemment sa cible. C’est d’ailleurs au dĂ©tour d’une confrontation particuliĂšrement attendue que la magie opĂšre vĂ©ritablement.

CamĂ©ra Ă  l’épaule, plan sĂ©quence, Les Trois Mousquetaires nous rappelle son statut de divertissement d’envergure, de film d’action exigeant et malin. On prend plaisir Ă  suivre ces fines lames pour sortir avec l’impression d’un moment gĂ©nĂ©reux, imparfait certes, mais assez solide pour mĂ©riter que l’on s’y attarde. Seule ombre au tableau, la musique de Guillaume Roussel manque l’appel Ă  l’aventure. Les premiers thĂšmes musicaux Ă©taient assez oubliables et cette suite ne rectifie pas le tir.

Les Trois Mousquetaires Deuxième Parttie
©

L’ambition de PathĂ© avec sa relecture des Trois Mousquetaires Ă©tait assez claire : rivaliser avec les blockbusters amĂ©ricains, les films de super-hĂ©ros qui inondent rĂ©guliĂšrement nos salles obscures. Si un dĂ©sintĂ©rĂȘt semble naĂźtre pour ces Ă©curies, la relĂšve française est lĂ  pour repĂȘcher les amateurs de rĂ©cits hĂ©roĂŻques.

Ce diptyque s’impose d’ailleurs comme une dĂ©monstration de force Ă  l’attention du public français ; qui peut dĂ©jĂ  ĂȘtre assurĂ© de retrouver trĂšs prochainement ce genre de film Ă  grand spectacle dans les cinĂ©mas de l’Hexagone. En 2024, c’est avec Edmond DantĂšs que les spectateurs ont rendez-vous. Recette similaire et mĂȘmes ambitions, cette nouvelle adaptation du Comte de Monte-Cristo espĂšre faire au moins aussi bien que son prĂ©dĂ©cesseur. Cette fois-ci, une autre figure incontournable du cinĂ©ma français tiendra l’affiche. Pierre Niney incarnera celui que l’on considĂšre aujourd’hui comme le premier super-hĂ©ros français. Ça ne s’invente pas.

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Notre avis

Moins scolaire que le prĂ©cĂ©dent film, mais aussi plus confus, Les Trois Mousquetaires : Milady remplit ses objectifs de blockbuster Ă  la française. Il invite aussi tous les travers de ces divertissements d’ampleur, sacrifiant la dimension tragique des rĂ©cits de Dumas au profit d’une partition plus nerveuse, plus politique, mais une bienvenue relecture de la principale antagoniste.

L'avis du Journal du Geek :

Note : 6 / 10
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