Le récit d’Alexandre Dumas fait partie intégrante du panorama culturel français. En 1903, au début du cinéma muet, George Meliès met en scène Les Mousquetaires de la Reine. Depuis, on ne compte plus le nombre de réalisateurs ayant posé leurs yeux sur les aventures de D’Artagnan et ses compagnons. La dernière incursion de l’œuvre au cinéma sous la direction de Paul W.S. Anderson avait néanmoins laissé quelques stigmates, la copie du cinéaste étant loin d’avoir convaincu la presse et le public.. Martin Bourboulon, à qui l’on doit Eiffel, a bien l’intention de remettre les quatre amis sur le devant de la scène. Et plutôt deux fois qu’une…
Jeune gascon fraîchement arrivé à Paris, D’Artagnan n’a qu’un seul but : devenir un mousquetaire du Roi. Avec sa lettre de recommandation sous le bras, il se présente au capitaine du régiment et lui demande une place dans ses rangs. Mais en sortant, il fait de tristes rencontres et se voit contraint d’affronter trois mousquetaires au caractère bien trempé. Il va malgré lui se retrouver au cœur d’un vaste complot politique, mené par le Cardinal de Richelieu et ses hommes qui veulent à tout prix que la guerre soit déclarée à l’Angleterre. D’Artagnan, Athos, Porthos et Aramis vont œuvrer pour sauvegarder la paix du royaume et servir Louis XIII jusqu’à leur dernier souffle.
Un pour tous, tous pour un !
Lorsque Pathé annonce un film de l’envergure des Trois Mousquetaires, les studios ne lésinent pas sur les zéros. Avec un budget estimé à 70 millions d’euros, répartis sur les deux volets, le projet compte parmi les plus ambitieux du panorama français de cette année 2023. Martin Bourboulon et ses équipes sont bien décidés à dépoussiérer le film de cape et d’épée, et à prendre cette tâche très au sérieux. Ils nourrissent l’espoir de faire oublier l’échec d’Astérix et Obélix : L’Empire du Milieu, qui était lui aussi promis à de grandes choses mais a dû se confronter à une critique virulente.
Mais il faut aussi composer avec l’empreinte du récit d’Alexandre Dumas, restée intacte 179 ans après sa publication. Entre respect de l’œuvre originale et réinvention, Les Trois Mousquetaires : D’Artagnan aurait pu marcher sur des œufs. Martin Bourboulon réussit toutefois à trancher dans le vif, galvanisé par la portée épique d’un récit intemporel, et le talent de ses comédiens.
À mi-chemin entre le western et le film de cape et d’épée dans la pure tradition du genre, le métrage repose sur une fine cuisine. Son introduction, centrée sur la renaissance du protagoniste principal, suffit à elle seule pour convaincre les spectateurs réticents. Le réalisateur se permet quelques exubérances visuelles bienvenues, toujours avec l’envie d’offrir au public un grand spectacle. Sa caméra s’épanouit aussi bien dans les intérieurs luxueux que les ruelles sombres de Paris ou les campagnes infestées de bandits de grands chemins. Le film est bien plus nerveux qu’on aurait pu le croire. Sans être effréné, le préambule aux aventures des trois mousquetaires ne faiblit pas.
La proposition de Martin Bourboulon repose sur de solides chorégraphies, une franche camaraderie et un indéniable talent pour faire monter la pression. Les Trois Mousquetaires : D’Artagnan est un divertissement généreux et régressif à prendre au sérieux. Le film sait aussi construire autour de ses duels des joutes verbales et des affrontements politiques malins. Reste que parfois, la photographie ne rend pas toujours hommage à cette épopée grandiose. Elle se prélasse plus que de raison dans l’obscurité et une ambiance terne.
Certaines scènes manquent aussi de précision dans leur découpage, rendant les combats beaucoup moins incisifs, alors même qu’ils se devaient d’être à l’épicentre du récit. Martin Bourboulon avait l’ambition de faire naître un blockbuster à la française, et réussit à bien des égards, mais pêche parfois à rendre hommage aux fines lames qu’il met en scène. On lui pardonne bien volontiers, tant le plaisir de voir évoluer ces héros royaux est là.
Chapeau !
La nouvelle production de Pathé ne fait pas dans l’économie, et à plus d’un titre. Pour faire naître son imagerie, Les Trois Mousquetaires : D’Artagnan repose sur des décors spectaculaires et des costumes qui le sont tout autant. Cette minutie participe évidemment à l’émergence d’une fresque historique convaincante. Le film reste ainsi très fidèle à son matériau de base, même si ce n’est évidemment pas à la virgule près. Le genre tombé en désuétude se réinvente alors, avec des dialogues qui oscillent entre respect du texte et anachronisme volontaire.
Les deux scénaristes Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte s’amusent avec le verbe de leurs protagonistes pour faire éclore une partition comique. Jouant allègrement avec la langue de Molière, tantôt pour appuyer son ancrage temporel, ou pour créer des ruptures bienvenues, ce premier volet est assez prometteur et parvient à remettre la lumière sur l’une des œuvres majeures de la littérature française.
Reste que le récit ne parvient pas toujours à donner de l’épaisseur aux différents personnages qui évoluent devant la caméra. Il manque sans doute un peu de caractérisation pour que la mayonnaise prenne réellement. Les Trois Mousquetaires : D’Artagnan reste trop à distance de ses personnages et des enjeux narratifs pour piquer l’intérêt des spectateurs. Alors que le prochain volet promet déjà d’être plus dramatique, et donc de gagner en intensité, espérons que les deux scénaristes ne céderont pas aux sirènes du mélodramatique et que le résultat ne sera pas D’Artagnan-gnan.
Pas de seconds couteaux
Qui dit production d’envergure, dit casting de taille. Les Trois Mousquetaires : D’Artagnan ne fait pas les choses à moitié en convoquant tout le gratin français pour donner vie aux aventures des quatre joyeux lurons. Véritable coqueluche, c’est François Civil qui se voit confier la partition du jeune gascon au caractère bien trempé. Un rôle dont il parvient à s’emparer avec justesse, et un indéniable capital sympathie.
Ses compères de joute ne sont pas en reste, et notamment Pio Marmaï qui ne s’écarte que très peu de ses prestations habituelles, mais qui fait un parfait Porthos. Romain Duris tire aussi son épingle du jeu avec une prestation nuancée, entre homme de foi et coureur de jupon impétueux. Du côté du casting féminin, c’est Vicky Krieps qui se démarque particulièrement dans la peau de la Reine. Eva Green est quant à elle parfaite en Milady, qui aurait pu en douter ?
Si elle pouvait sonner comme le film de trop, cette nouvelle adaptation des Trois Mousquetaires est finalement une bien belle surprise. Martin Bourboulon et Pathé ont fait éclore un blockbuster à la française, qui respecte son matériau de base (sans doute parfois un peu trop) et parvient à s’imposer comme un divertissement à part entière.
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Un Porthos bisexuel, un Africain et une Maghrébine. C’est bon, le cahier des charges est rempli. Dumas peut aller se recoucher… dans sa tombe.
Ah oui, ce même Dumas qui était métis et qui a lutté toute sa vie contre le racisme dont il était l’objet ? Dur d’être ignorante et de l’étaler chaque jour à la face du monde…
AURELIE
c’est vrai je suis d’accord avec vous a 100%.
on aurait du avoir que des blondes aux yeux bleues et des blonds de taille minimum de 1,90m.
cordialement
@Aurélie, c’est qu’il y a des quotas m’voyez.
Ça aurait pu être pire. Je voyais bien Omar Sy en d’Artagnan, et Yseult en Milady, pour faire rager les fachos 😄
Ça ne nous aurait pas empêché de recevoir de leçons de cohérences “historiques” et de tolérance.
C quoile rapport ? Dumas père a aussi écrit la Reine Margot et donc faut mettre des minorités,y’en avait dans le film des 90’s avec Auteuil ?
Porthos bisexuel oui, ça fait un peu mal aux fesses ( si j’ose dire XD ).
Et avec un Aramis blasphématoire, pour plaire aux christianophobes de base, toutes les cases de la bienpensance sont cochées.
Et le roi et sa reine se baladant main dans la main comme Harry et Meghan…fadasse, ce film. Pas d’émotion.
Il est bien honnêtement, j’ai passé un bon moment.
Il est beau, c’est visuellement très soigné (de beaux plans, de magnifiques décors avec des éclairages soignés).
Les scènes d’actions sont dynamiques, bien amenées par et dans l’histoire.
L’histoire est belle avec une amourette touchante.
Je pense que le principal bémol que je verrai est entre les dialogues et les interprétes. Il y a quelque chose qui cloche par moment. Je ne sais pas si ce sont les interprétes qui ne sont pas parvenus à incarner les personnages ou si les dialogues sonnaient simplement faux.
Les dialogues ne sont pourtant pas particulièrement soutenus, mais ça ne fonctionne pas tout le temps ; il y a des creux.
Je me souviens avoir revu La fille de d’Artagnan récemment. Les dialogues étaient bien plus relevés, avec de longues tirades que les acteurs arrivaient à sortir d’une traite qu’ils soient heureux, en colère ou désespérés. C’était d’une grande finesse avec un humour très fin que j’adorais.
Dommage que ce niveau de maitrise de la langue (le problème est peut-être là ?) ne soit pas atteint. Ça aurait donné de loin le meilleur film français depuis longtemps.
Reste cette histoire sur la sexualité de Porthos, venant comme un cheveux sur la soupe et n’apportant strictement rien au scénario.
Ce qui m’a fait délirer, c’est qu’on s’est assuré que le spectateur comprenne bien la sexualité de Porthos, cela semblait très important !
Il a d’abord fallu que personnage le dise, mais qu’en suite un plan (à 3…) mette à l’image ce que Porthos dit quelques secondes avant.
Nous n’aurions pas compris sinon ! 😜