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Critique Le Seigneur des Anneaux : La Guerre des Rohirrim à rien ?

Le Seigneur des Anneaux : La Guerre des Rohirrim est un film d’animation tiré, comme son nom l’indique, de l’univers de Tolkien. Un métrage qui prend plus d’une liberté, mais à quelle fin ?

Cela fait un moment que Le Seigneur des Anneaux a dépassé les écrits de son auteur pour devenir une franchise à part entière. Depuis que Peter Jackson a réalisé une trilogie gravée dans le marbre du cinéma, puis une seconde trilogie gravée sur le mur en face de l’urinoir du cinéma, la marque n’a cessé de s’étendre très loin de ses premiers échos, déjà animés, des années 70. Aujourd’hui, on compte donc six métrages inspirés directement des livres de J.R.R. Tolkien, une série Les Anneaux de Pouvoir sur Prime Video qui comprend, pour le moment, deux saisons, et au moins deux films en préparation sur l’ami des poissons, Gollum. Et au milieu de toute cette ambition en prise de vues réelles, Le Seigneur des Anneaux : La Guerre des Rohirrim débarque avec l’idée de nous rappeler le potentiel de l’animation dès qu’il s’agit d’Heroic Fantasy.

Il est bon de rappeler que le métrage arrive en clôture d’une année qui aura été particulièrement féconde dans le milieu de l’animation, voire, osons le dire, supérieure à son pendant de chair et d’os. Rien que pour rester sur les productions récentes, le grand écran nous aura offert le charmant Flow et le magnifique Le Robot Sauvage ; alors qu’Arcane a remontré au monde entier les possibilités infinies de cet art sur Netflix. Avec son côté plus traditionnel, Le Seigneur des Anneaux : La Guerre des Rohirrim jouerait presque le match à contre-courant.

La Guerre Des Rohirrim (1)
© Warner Bros

Rohirrim, en avant les histoires

L’histoire se déroule 183 ans avant que Bilbo ne trouve l’Anneau, comme nous le rappelle la narratrice Miranda Otto, alias Éowyn chez Jackson. Un choix opportun puisque le film raconte la chute de la Maison Helm Poing-de-Marteau, roi du Rohan bien avant Théoden, lorsque Wulf, seigneur cruel, se met en quête de vengeance. Bientôt assiégés au Fort-le-Cor, connu plus tard comme Gouffre de Helm, les habitants vulnérables vont devoir compter sur Héra, fille de Helm, pour résister.

Un récit qui s’inspire des annexes officielles écrites par Tolkien. Mais là où l’auteur préférait s’en tenir à la simple évocation, déclarant lui-même que « les histoires les plus intéressantes sont celles qui n’ont pas été racontées », les scénaristes Jeffrey Addiss, Will Matthews, Phoebe Gittins et Arty Papageorgiou entendent bien la raconter, persuadés de tenir une histoire intéressante. Pour celles et ceux qui lèvent les yeux au ciel à chaque liberté narrative prise par la série Les Anneaux de Pouvoir, La Guerre des Rohirrim risque de leur rappeler des souvenirs.

La Guerre Des Rohirrim
© Warner

Évidemment, pour tenir un film de 134 minutes sur quelques lignes originales, il faut bien faire preuve d’une certaine largesse créative qui commencera, par exemple, à donner un nom à une héroïne qui en avait officiellement jusqu’alors aucun. L’intention est, en soit, valable et on se gardera bien de juger de la longueur de la corde qu’on peut tirer de l’esprit de Tolkien et de l’argent qu’on peut se faire avec celle-ci. D’autant qu’il est vrai que la Terre du Milieu est une source presque inépuisable de grandes aventures, inspirées ou inventées, et qu’on est les premiers à en redemander, à la condition que l’écriture suive.

L’anneau entre deux chaises

En l’état, Le Seigneur des Anneaux : La Guerre des Rohirrim fait ce qu’on pouvait attendre lui, à savoir un métrage qui entend s’inscrire au sein d’un monde pré-existant tout en prenant assez de marge de manœuvre pour intéresser un nouveau public, moins connaisseur. Si on exclut un épilogue bien trop gratuit en référence — avec un personnage servant de plus en plus grossièrement de caution « Skywalker » pour cette franchise -, le métrage évite suffisamment de faire appel à son matériel source pour contourner les pièges. On dira même que c’est lorsque La Guerre des Rohirrim fait du Seigneur des Anneaux qu’il convainc le moins.

Car bien qu’un néophyte puisse apprécier l’oeuvre sans être noyé sous des clins d’oeil excluant, on ne peut nier que le manque de matière fournie par Tolkien handicape particulièrement un récit contraint de chercher sa source d’inspiration ailleurs : chez Peter Jackson lui-même. Est-ce que la production a trop pris à cœur les reproches faits aux Anneaux de Pouvoir ? Toujours est-il que La Guerre des Rohirrim entend reprendre la recette de la trilogie de Jackson presque à la lettre. On ne saura vous révéler toutes les clés de l’intrigue et on se contentera de souligner que quiconque connaît Les Deux Tours sur le bout des doigts pourra très souvent jouer au jeu du copier-coller.

Si le récit de La Guerre des Rohirrim n’a rien de déplaisant, il n’a malheureusement rien non plus de vraiment original. Le film cumule les poncifs autour de personnages stéréotypés. Comme si, par peur de commettre des impairs ou de salir la licence, le métrage jouait la carte de la sécurité jusqu’au ridicule. On n’est pas devant une œuvre qui a peur de faire, mais qui s’efforce de tout éviter. Si Les Anneaux de Pouvoir ont au moins le mérite de tenter de nous raconter un événement majeur, ce long-métrage choisit volontairement l’anecdotique ou s’efforce de le rendre ainsi. Et il n’y a bien que la réutilisation des compositions d’Howard Shore pour réveiller une guerre particulièrement mollassonne.

Il ne faudra compter que sur la mise en scène de Kenji Kamiyama pour bousculer un peu l’ensemble avec quelques débordements d’énergie, parfois mal placés, qui ont le mérite d’exister. Quant à la qualité de l’animation, si le prologue nous aura impressionné avec un environnement passant du pastel au photoréalisme, on a davantage de réserve sur les mouvements des corps et les expressions faciles, souvent assez figés, donnant une impression saccadée.

Une technique à l’ancienne, même pour de l’animation japonaise, qui colle bien au genre de l’heroic fantasy, néanmoins bien trop loin de la créativité à laquelle on a eu droit ces derniers temps, y compris au pays du soleil levant. Une forme à l’image du fond finalement, un résultat propre sans réelle magie. Parce qu’il s’inspire d’œuvres qui ont marqué leur temps, Le Seigneur des Anneaux : La Guerre des Rohirrim n’a rien de honteux et il s’apprécie comme une extension d’une franchise le temps d’une séance. Puis il s’oubliera.

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Notre avis

Le Seigneur des Anneaux : La Guerre des Rohirrim se charge de rappeler de bons souvenirs tout en se plaçant suffisamment à l'écart de l'histoire que l'on connaît tous pour attirer un nouveau public. Et paradoxalement, il fait trop bien les deux. On se retrouve devant une œuvre qui ne se montre jamais au niveau de ce qu'elle évoque, et qui ne raconte pas grand chose du reste. Et à part le budget, on voit mal ce qu'aura apporté l'animation à l'ensemble. La Terre du Milieu de gamme.

L'avis du Journal du Geek :

Note : 5 / 10

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