Critique Kung Fu Panda 4 : Po mieux faire 🐼

Suivant une année 2023 plutôt discrète pour DreamWorks, le studio d’animation américain est de retour sur le devant de la scène avec Kung-Fu Panda 4. L’an passé, Trolls 3 parvenait à peine à rattraper l’échec de Ruby, l’ado Kraken. Conscient de la force d’attraction de ses grandes licences, le géant du divertissement a donc pris soin de les placer stratégiquement dans son calendrier de sorties afin de pallier toute éventualité. 2024 débute alors sur les chapeaux de roue en compagnie de Po Ping, l’adorable et redoutable Guerrier Dragon que les spectateurs apprécient tant.

Depuis sa première apparition au cinéma en 2008, le panda est devenu l’une des figures de proue de DreamWorks aux côtés de Shrek, Dragons ou encore Madagascar. La stratégie de retour aux sources entamée en 2022 avec Le Chat Potté 2 se poursuit désormais avec une nouvelle aventure de la mascotte spécialiste des arts martiaux. Après les efforts d’innovation appliqués au dernier périple du félin bien dans ses bottes, Kung Fu Panda 4 avait toutes les cartes en main pour suivre ce courant créatif qui a su faire mouche. Mais contre toute attente, le studio américain nous livre une suite vide de l’âme et du charme qui ont su faire de Po l’icône qu’il est aujourd’hui.

Le renouveau des grandes mascottes DreamWorks

Le retour de Kung Fu Panda dans les salles obscures n’est pas anodin : DreamWorks cherche à retrouver la force de ses belles années. Entre 2016 et 2021, les sorties du studio ont été majoritairement dominées par de nouveaux venus. Les Trolls, Baby Boss et Les Croods ont fait de telles preuves au box-office que leur potentiel a rapidement été épuisé. Sur les dix films diffusés en six ans, ces trois licences en comptent pour la moitié. Le reste des sorties est composé de films aux performances décevantes (Abominable et Capitaine Superslip), d’un long-métrage sorti exclusivement sur Netflix chez nous (Spirit : Untamed) et de Dragons 3 qui a quant à lui su s’en sortir haut la main. La tendance était donc claire : un retour des licences fortes du passé s’imposait.

C’est ainsi que DreamWorks a su nous surprendre avec le Chat Potté 2. La réapparition du félin sur grand écran signait non seulement le retour de la licence Shrek, pour la première fois depuis 2011, mais s’accompagnait aussi d’une prise de risque visuelle. En introduisant un nouveau générique et un style d’animation encore jamais vu chez le studio, ce long-métrage laissait présager un véritable renouveau. Pourtant, voilà que DreamWorks se retrouve à pédaler en arrière avec Kung Fu Panda 4. La reprise trait pour trait des visuels du passé à de quoi surprendre, mais pourrait s’ancrer dans un objectif nostalgique. Malheureusement, ce nouvel opus semble se complaire dans une paresse lui coûtant toute once de charme et d’intérêt.

Un manque de maîtrise dans de nombreux aspects

Kung Fu Panda 4 a l’effet d’une capsule temporelle loin d’être flatteuse et nous donne l’impression de découvrir un film d’un autre temps. Suivant les prouesses techniques de DreamWorks dans ses dernières productions, le quatrième volet des aventures de Po fait pâle figure. Après nous avoir habitués à des décors chinois à couper le souffle et des scènes de combats toutes aussi comiques que spectaculaires, la franchise Kung Fu Panda se retrouve soudainement privée de ses qualités. Le long-métrage semble se contenter du strict minimum, en présentant des environnements vides que des angles de caméra étrange tentent de rattraper en cachant la misère. Pire encore, les chorégraphies de combat n’ont rien de marquant et se contentent parfois de remplacer l’animation par des images statiques ou des ombres qui n’ont rien d’une décision artistique, mais relèvent plutôt de la facilité. Aucun environnement, aucune scène de combat ni même aucun effet visuel ne laissent penser qu’il s’agit là d’un film d’animation produit ces dernières années. L’ensemble est trop souvent sombre et dépourvu de texture attrayante.

Et ces lacunes ne sont pas seulement visuelles. Étrangement, le monde de Po tout entier semble avoir été vidé de son identité. Après avoir construit le parcours du protagoniste autour de ses camarades les Cinq Cyclones, Kung Fu Panda 4 s’en défait sans vergogne en répondant simplement “qu’ils sont partis faire autre chose”. Sachant que le groupe d’experts en arts martiaux était interprété par de grandes stars d’Hollywood telles qu’Angelina Jolie et Jackie Chan, c’est à croire que le studio cherchait seulement à faire des économies. Et voici la philosophie qui transparaît tout au long du film. Celui-ci apparaît comme un opus en demi-teinte, développé à la va-vite et dans le simple but de remplir le calendrier de DreamWorks avec un grand nom pour signer une réussite au box-office. Toutefois, la popularité de Po ne peut rien face à la fainéantise de ce long-métrage qui, accompagné d’une animation quelconque, ne fait que renforcer les lacunes de son scénario tout aussi médiocre.

Une aventure aux airs de quête secondaire

En l’absence des personnages emblématiques des trois films précédents, les spectateurs devront se contenter d’une intrigue centrée sur Po. Rien de mal à cela, si ce n’est que les scénaristes ont fait le choix de réduire tous les efforts du personnage à néant. À peine a-t-il eu le temps de jouir de son rôle de Guerrier Dragon que Po doit déjà partir à la retraite. Pourquoi donc ? Parce que Maître Shifu en a décidé ainsi, et puis c’est tout. Ayant hérité du sceptre de maître Oogway, le jeune héros n’a d’autre choix que de devenir guide spirituel. Alors que se profile une quête initiatique abordant des thématiques fortes de réincarnation, de valeur de l’âme ou encore de succession, le film abandonne ces belles idées au profit d’une ultime quête tout ce qu’il y a de plus banale.

Comme par hasard, une nouvelle antagoniste surpuissante cherchant à régner sur la Chine vient de faire son apparition : l’occasion pour Po de vivre une dernière aventure et de procrastiner son nouveau rôle. Celle que l’on appelle La Caméléone est présentée comme une ennemie invincible, mais pourtant, personne n’en a entendu parler auparavant. Ou du moins à l’exception de Zen, un personnage inédit qui va devoir faire équipe avec Po malgré quelques différends. Tous les éléments de l’intrigue tombent comme un cheveu sur la soupe et donnent l’impression d’un scénario ficelé à partir de rien pour forcer le retour du panda sur grand écran. Le rythme de l’aventure a de quoi nous décrocher de sacrés bâillements pour la simple et bonne raison qu’il ne se déroule pas grand chose. L’ensemble du périple est contenu dans la courte bande-annonce de 2 minutes 30. L’humour légendaire de Po ne suffit pas à rattraper ce naufrage, et finit même par générer plus de malaises que de rires dans cet ensemble véritablement décevant. En essayant d’émuler le charme caractéristique de ses prédécesseurs en faisant le moins d’efforts possibles, Kung Fu Panda 4 n‘a aucune identité et apparaît finalement comme la suite de trop.

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