La filmographie de M.Night Shyamalan regorge de surprises, bonnes ou mauvaises. Le rĂ©alisateur du SixiĂšme Sens et Le Village sâest imposĂ© en quelques mĂ©trages comme une rĂ©fĂ©rence du cinĂ©ma de genre. Pourtant, il nâa pas toujours fait honneur Ă cette rĂ©putation. Il fait preuve dâune certaine irrĂ©gularitĂ© sur le grand Ă©cran, Ă©prouvant parfois quelques difficultĂ©s Ă construire en dehors de ses concepts accrocheurs. Sa derniĂšre crĂ©ation, adaptĂ©e dâune bande dessinĂ©e pourtant brillante, en est lâexemple parfait. Old nâavait pas Ă©tĂ© la vague cinĂ©matographique annoncĂ©e et laissait de nombreux spectateurs sur le carreau.
Pourtant, Shyamalan est aussi responsable de nombreuses pĂ©pites du 7e art. Lâexcellent Signes suffit Ă lui seul pour justifier sa maĂźtrise du thriller fantastique. Avec ce qui ressemble en apparence Ă une invasion alien comme on en a vu beaucoup sur le grand Ă©cran, le cinĂ©aste faisait Ă©clore un drame familial dâune efficacitĂ© redoutable, avec une sensibilitĂ© folle. Lâadaptation dâun ouvrage dans la veine de ceux de Stephen King, qualifiĂ© par beaucoup comme la plume la plus prometteuse de lâhorreur sur papier, avait ainsi de quoi nous rĂ©galer.
TirĂ©e dâun roman de Paul Tremblay, lâhistoire suit une petite famille qui part sâisoler dans une petite cabine aux milieux de la forĂȘt. Alors quâils profitent du calme des lieux, il se retrouvent nez Ă nez avec quatre Ă©tranges personnages. Retenus captifs, Wen et ses deux pĂšres vont devoir volontairement sacrifier lâun des leurs pour sauver lâhumanitĂ© dâune apocalypse imminente.
Un film complÚtement toqué ?
Les propositions cinĂ©matographiques de M.Night Shyamalan reposent essentiellement sur une idĂ©e simple mais dĂ©finitivement accrocheuse. L’enfermement avec The Village, la mort avec SixiĂšme Sens ou encore un envahisseur extraterrestre avec Signes, les concepts qui nourrissent ses rĂ©cits sont en apparence assez Ă©culĂ©s. Pourtant, avec ces postulats de dĂ©part, Shyamalan rĂ©invente le thriller fantastique Ă de nombreuses reprises. Knock At the Cabin dĂ©bute sur de mĂȘmes bases. La nouvelle crĂ©ation du rĂ©alisateur entend nous interroger sur le bien-fondĂ© de sacrifier une Ăąme pour en sauver des milliards. Un questionnement mĂ©taphysique quâil va explorer pendant un peu moins de deux heures.
AprĂšs une introduction dâune efficacitĂ© redoutable, qui prouve quâencore une fois les propositions cinĂ©matographiques de Shyamalan sont avant tout une histoire dâambiance, le rĂ©alisateur use du hors champ et des gros plans pour faire monter la tension chez les spectateurs. Il fait dĂ©monstration dâun vĂ©ritable sens du rythme et du montage, on nâen doutait pas vraiment venant de sa part.
Le film est peuplĂ© de belles idĂ©es de mise en scĂšne, des mouvements dĂ©saxĂ©s quâil nous avait dĂ©jĂ proposĂ©s par le passĂ© ou encore des jeux dâĂ©chelle pour placer le public tantĂŽt en spectateur tantĂŽt en acteur. La prĂ©misse de ce thriller taille dans le vif, avant que la suite renverse la vapeur pour explorer le volet plus fantastique du rĂ©cit. Mais ce surnaturel plane au-dessus des personnages, sans jamais ĂȘtre montrĂ©. Un peut-ĂȘtre qui se mĂ©tamorphose petit Ă petit dans lâesprit des personnages, mais aussi dans celui de lâauditoire.
De son aurore Ă son crĂ©puscule, lâhistoire racontĂ©e par M.Night Shymalan cultive le mystĂšre. Pourtant, aucun twist final ne reviendra rebattre les cartes. La conclusion est finalement plutĂŽt attendue, logique. On peut noter que le cinĂ©aste nâa que trĂšs peu appuyĂ© les rĂ©fĂ©rences Ă nos sociĂ©tĂ©s pourtant latentes dans lâouvrage papier. Les rĂ©flexions sur la dĂ©sinformation et le vivre ensemble restent ainsi en surface, le rĂ©cit prĂ©fĂ©rant ne pas marteler les spectateurs plus que de raison.
Le cinĂ©aste Ă©vite ainsi dâenfoncer des portes ouvertes, mais tombe parfois dans le piĂšge de lâexplication littĂ©rale. Ce qui aurait dĂ» ĂȘtre passĂ© sous silence est expliquĂ© au moyen de lignes de dialogue. Un manque de subtilitĂ© dont on ne lui tiendra pas rigueur, Knock At The Cabin Ă©tant finalement assez bien ficelĂ©.
Reste quâon attendait du cinĂ©aste une production plus radicale, la promotion du film ayant rabĂąchĂ© son caractĂšre inĂ©dit. Ce qui devait ĂȘtre un film plus proche de lâhorreur que de lâĂ©pouvante manque dâhĂ©moglobine et dâun peu de panache. LâĂ©pilogue confirme dâailleurs ce sentiment. On pardonne volontiers Ă M.Night Shyamalan cette approche un peu tiĂšde, tant le casting sauve la mise Ă plusieurs reprises.
Un casting qui envoie du bois
RĂ©cemment, Dave Bautista annonçait vouloir sâĂ©carter des partitions comiques qui lui sont rĂ©guliĂšrement confiĂ©es pour sâattaquer Ă des rĂŽles plus dramatiques. Exit Drax et ses calembours Ă nâen plus finir, lâacteur explore de nouveaux horizons, et grand bien lui fasse. Il vole la vedette au reste du casting avec sa performance oscillant entre celle dâun antagoniste et un protagoniste plus touchant. Il offre de beaux moments de sensibilitĂ©. Le reste du casting est tout aussi brillant, Ă commencer par Nikki Amuda-Bird qui avait dĂ©jĂ jouĂ© devant la camĂ©ra de M.Night Shyamalan pour Old.
Rupert Grint continue sa mĂ©tamorphose, parvenant Ă faire complĂštement oublier son rĂŽle de meilleur ami un peu gauche dans la saga Harry Potter. Ce nâest dâailleurs pas la premiĂšre fois quâil apparaĂźt devant la camĂ©ra du rĂ©alisateur puisquâil avait dĂ©jĂ fait dĂ©monstration de son talent avec la sĂ©rie Servant diffusĂ©e sur Apple TV+. Enfin, on terminera sur la performance du trio de tĂȘte, menĂ© par Jonathan Groff, Ben Aldrige et la trĂšs jeune Kristen Cui. Tout le monde sâen sort Ă merveille surtout dans les moments plus dramatiques du film. Dommage que le rĂ©alisateur ne se dĂ©tache un peu trop de ses sujets Ă mi-parcours.
Finalement, le film sâarrĂȘte aux portes de nos cĆurs. On sâattendait Ă ce que Knock At The Cabin frappe fort, câest finalement un coup dâĂ©pĂ©e dans lâeau. Le film compte sans doute parmi les Ćuvres les plus mineures de la filmographie de M.Night Shyamalan, lui qui indiquait pourtant rĂ©cemment nâavoir jamais autant bossĂ© pour un film. Toc, Toc… Qui est lĂ ? Sans doute pas le succĂšs escomptĂ©. Tant pis, on se contentera d’un film assez intĂ©ressant pour occuper nos week-ends pluvieux.
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