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Critique Godzilla Minus One : le géant qui avait bouleversé les tops de fin d’année 🦖

En décembre dernier, le Père Noël avait pris un peu d’avance et amené dans sa hotte l’un des blockbusters les plus impactants de 2023. Godzilla Minus One est une force destructrice dont le seul défaut n’était de rester que deux jours par chez nous. Bonne nouvelle, il revient au cinéma et vous n’avez plus d’excuses !

Comme le disait un certain boxeur de fiction, le combat n’est pas terminé tant que la cloche n’a pas encore sonné. À l’heure où toutes les rédactions spécialisées divulguaient leurs tops cinématographiques de l’année, Godzilla Minus One débarquait le 7 décembre dernier sur nos écrans, regardant ces classements de haut, en riant. On exagère, évidemment, ces tops étant complètement subjectifs et soumis à la sensibilité de chacun. Nous concernant, le film de Takashi Yamazaki a cueilli notre sensibilité avec une puissance écrasante, comme pour nous rappeler que l’année n’était pas encore finie.

L’histoire est assez simple. Au sein du Japon d’après-guerre, la population tente de se reconstruire avec ses traumatismes. C’est là qu’une nouvelle menace surgit sous l’apparence d’un monstre géant que les locaux surnomment « Godzilla ».

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© Piece of Magic Entertainment

Hasard du calendrier (ou pas), le long-métrage de la Toho arrivait dans l’hexagone, pour une sortie limitée les 7 et 8 décembre prochains, quasiment en même temps que Warner Bros ait révélé la bande-annonce du nouveau produit de leur monsterverse : Godzilla x Kong prévu pour l’an prochain. Le grand écart entre production japonaise et américaine sur le traitement du lézard radioactif ne pouvait pas être plus évident ; la seconde préférant l’utiliser comme un outil à divertissement démesuré, ayant que très peu de respect pour la créature. Là où les Japonais la voient toujours comme un objet de fascination et de peur qui raconte quelque chose de leur histoire. Le Godzilla de Minus One ne devient pas rose et ne court pas en compagnie de Kong en mode Avengers, il détruit.

La métaphore monstrueuse

Mais comment parvenir à se démarquer quand Minus One est déjà le trente-septième film consacré au kaijū et qu’une série, Monarch, est à l’œuvre sur le sujet ? Dans l’ombre du succès de Shin Godzilla sorti en 2016 (considéré comme l’un des meilleurs représentants de la saga), la Toho confie la tâche au réalisateur Takashi Yamazaki dont nous avions apprécié le travail sur le film d’animation 3D consacré à Lupin III : The First. L’homme revient aux sources et replace le monstre dans son contexte d’origine : le Japon d’après-guerre.

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© Piece of Magic Entertainment

Sauf que Yamazaki n’a pas tant envie de parler de l’holocauste nucléaire à travers sa créature que du ressentiment d’un pays traumatisé par les événements, d’une population incapable de relever la tête. Une façon d’exprimer aussi bien les failles passées que les problématiques du gouvernement japonais actuel (le film a été écrit pendant le confinement) dont Yamazaki aime bien pointer les insuffisances. Godzilla revient ainsi à son essence, où l’important n’est pas tant la créature que ce qu’elle permet de raconter sur la capacité d’une nation à se relever après une catastrophe. Une nation qui avait élevé la mort au rang d’honneur par manque de considération pour la vie.

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© Piece of Magic Entertainment

C’est là qu’intervient Godzilla. Un fléau inarrêtable, une force de la nature destructrice, impossible à raisonner, à utiliser, à vaincre et qui va poser la question du pourquoi on se bat, pourquoi on vit. De sorte que Minus One est un parfait mélange entre le blockbuster et le drame humain avec des personnages pensés émotionnellement. Une chose malheureusement devenue trop rare dans le cinéma d’action. Loin de nous balancer des protagonistes utilitaires, le métrage s’attarde longuement sur ces derniers, habités par leurs traumatismes, de sorte que même sans qu’il ne soit visible à l’écran, le monstre reste présent et vice-versa. Là où Godzilla frappe, l’homme n’est jamais loin.

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© Piece of Magic Entertainment

Une implication émotionnelle qui, si parfois elle tourne au cliché, parvient à nous cueillir dans ces moments de joie comme de tristesse. On s’attache à chacun et on en vient à espérer l’impossible : que tous s’en sortent. À l’opposé des exploitations de l’Oncle Sam, cette mise en avant humaine empêche de voir Godzilla comme un lézard-un-peu-encombrant-mais-qui-est-notre-copain.

Une puissance destructrice

En parlant de ce dernier, on vous met au défi de ne pas voir chaque million investi dans le film dès lors que celui-ci fait parler son action. Et on parle d’un budget de seulement quinze millions. Pour rappel, The Flash en a coûté 200 à 220 millions (on aime tirer sur l’ambulance). On sent que Takashi Yamazaki s’est servi de son expérience en tant que superviseur des effets-spéciaux pour veiller personnellement sur l’usage numérique fait autour de sa créature, qui rend en partie hommage au costume en caoutchouc imaginé par Ishirō Honda à l’époque du premier long-métrage.

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© Piece of Magic Entertainment

Le lézard géant est pensé dans le moindre de ses aspects et les textures diffèrent en fonction que la caméra s’attarde sur ses pattes, sa gueule ou l’usage de son rayon thermique. Afin d’en faire un symbole davantage que le fruit d’une mutation radioactive, ce Godzilla s’éloigne fortement d’un aspect réaliste, Minus One jouant habilement entre le mouvement destructeur et un aspect plus rigide, entre l’effet-spécial grandiloquent et un rendu fait-maison. Un mélange qui ancre le kaijū dans sa dimension fantastique. S’il ne peut être détruit, il ne peut pas non plus exister.

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© Piece of Magic Entertainment

Ce qui n’empêche pas d’être époustouflé dès que cette machine de destruction rendre en action. Le métrage se montre particulièrement généreux lors de ces moments avec un Godzilla insurmontable explosant chaque parcelle du décor qu’il parcourt. Son aspect en était d’ailleurs un gros indice et il le confirme une fois en mouvement : il est effrayant. Cela donne un résultat spectaculaire, confirmant le talent du metteur en scène pour le grand spectacle, qu’importe la matière (il le prouvait en animation avec Lupin III) ou l’échelle. D’autant qu’il faut saluer la formidable bande-son de Naoki Saoto qui accompagne chaque séquence, les notes renforçant chaque frisson ressenti.

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© Piece of Magic Entertainment

À l’arrivée, Godzilla Minus One est l’un des spectacles les plus réjouissants de l’année, jonglant entre plusieurs domaines, le blockbuster et le drame intimiste, l’héroïque et le sous-texte-politique, l’héritage passé et la réflexion sur l’avenir, le monstre et l’homme. Et le plus impressionnant dans tout ça, c’est que c’est fait dans un équilibre presque parfait. Le film n’a que deux problèmes réellement dérangeants : la possibilité pour le public français de ne pouvoir voir le métrage que pendant deux jours sur grand écran et l’absence de Jean Reno mâchant un chewing-gum en imitant l’accent américain. Bon, ça ce n’est peut-être pas un défaut.

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Notre avis

On a envie de dire que Godzilla Minus One débarque chez nous par la grande porte, mais la porte n'est pas assez grande. Il y a un amour pour la créature crée par Honda autant qu'une envie de porter le message autrement, de respecter les bases tout en allant plus loin dans le propos. Cette envie de nous proposer un blockbuster intelligent qui a autant le charme du savoir-faire maison niveau action que de composer avec une galerie de personnages humains. Définitivement rien de Minus ici.

L'avis du Journal du Geek :

Note : 9 / 10

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