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[Critique] Dernier Train pour Busan

Une fois n’est pas coutume, le cinéma coréen s’est une nouvelle fois invité à Cannes. Parmi les deux films diffusés au Festival, Dernier Train pour Busan…

Une fois n’est pas coutume, le cinéma coréen s’est une nouvelle fois invité à Cannes. Parmi les deux films diffusés au Festival, Dernier Train pour Busan a particulièrement enthousiasmé le public lors de la séance de minuit. À juste titre ?

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Le cinéma coréen se sent bien à Cannes. En témoigne le succès critique de l’excellent « The Strangers » de Na Hong-jin, étonnant mélange des genres sublimé par une photographie superbe. Mais le Pays du Matin Calme était aussi représenté par « Dernier Train pour Busan », un film de zombie aux accents hollywoodiens qui s’inspire des grands succès de ces dernières années.

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Jonglant entre World War Z et Le Transperceneige, ce long-métrage retrace le développement d’une épidémie qui touche violemment le pays en transformant ses habitants en zombies enragés. Bloqués dans un train à grande vitesse avec un assez large panel de voyageurs, le héros et sa petite fille vont devoir tenir face aux infectés le temps d’arriver à Busan, une ville normalement sécurisée. Un scénario de série B que Sang-Ho Yeon, qui voulait d’abord en faire un film d’animation, a décidé d’adapter en prises réelles.

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Infecté… Mais bien filmé

Si le postulat de base peut laisser penser à un ersatz de production américaine, les stigmates du cinéma coréen apparaissent assez rapidement. Yeon fait le choix de ne pas multiplier les prises de vue, ce qui renforce l’impression d’être dans un train à taille humaine, et rend la menace encore plus palpable. La foule de zombies est certes informe, mais les plans fixes lors de certaines charges soulignent l’appartenance à l’animation, qui fonctionne par planche. Le procédé montre une réelle efficacité même si les amateurs d’effets spéciaux tilteront sur certains détails. En s’écartant de la surenchère d’un World War Z, Dernier Train pour Busan sait tirer juste ce qu’il faut d’énergie pour maintenir le spectateur en alerte.

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Le réalisateur a aussi la bonne idée d’aérer son récit en laissant le train faire des escales. Elles sont certes moins dynamiques que les moments passés dans les wagons, mais permettent de relancer la trame. Scenaristiquement, c’est parfois un peu grossier, à l’image de ces zombies devenus aveugles une fois un journal collé devant leurs yeux. Mais la performance des acteurs, notamment le duo composé du père et sa fille (Yoo Gong et Soo-an Kim), fait sans cesse oublier ces incohérences inhérentes au genre. On se prête même à rire des autres passagers, qui font office de sympathiques sidekicks ou d’égoïstes patentés.

Stéréotype… Quand tu nous tiens.

C’est pourtant à travers eux qu’un des défauts du film transparaît. Quels que soient les genres abordés, le cinéma coréen aime emprunter à la fable en glissant un double discours dans sa narration. Cela marche parfois étonnement bien, même avec des films qui ne s’y prêtaient pas forcement (« The Host »). Hélas, le trait est ici un peu trop grossier.

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Yeon avouait lui-même en interview que les zombies étaient « simplement des êtres humains remplis de rage. » Une idée intéressante, mais qui n’est finalement pas exploitée. Au lieu de cela, le film aligne quelques poncifs sur l’économie ultra-libérale en tissant un lien forcé entre plusieurs de ses acteurs (représentés ici par un trader et un grand patron) et individualisme en situation de crise. C’est éculé et pas forcément réaliste, étant donné que les bonnes ou mauvaises intentions germent dans tout type de classes sociales. Ce manichéisme capilotracté n’entrave heureusement pas le suivi de l’histoire, qui va de toute façon bien trop vite pour qu’on saute du train en marche.

Si l’on passera volontiers outre la morale sur le capitalisme de marché, difficile de ne pas reconnaître de vraies qualités à ce « Dernier Train pour Busan ». Rythmé et bien filmé, le long-métrage se paye même le luxe de mélanger les genres avec un certain panache. Peut-être pas un grand film coréen, mais un excellent divertissement de série B, mené tambour battant pendant près de deux heures.

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