Apple TV+ continue de jouer de ses arguments pour séduire des utilisateurs. Si la plateforme est loin derrière ses concurrents lorsqu’il s’agit de compter le nombre d’abonnés, elle peut se targuer d’avoir fait éclore quelques jolies séries qui méritent que l’on s’y attarde. En 2023, au rayon science-fiction et dystopie, Silo avait fait des émules en s’illustrant comme l’une des séries les plus vues de son histoire. Moins d’un an après ce carton, la plateforme remet le couvert avec un récit cette fois-ci tout à fait inédit. Tirée de l’imaginaire de son créateur Peter Harness, Constellation pourrait bien devenir notre nouvelle obsession télévisuelle.
Jo est une astronaute talentueuse qui vit depuis plusieurs mois à bord de l’ISS. Loin de sa fille et de son mari, elle mène des recherches scientifiques qui pourraient changer la face du monde. Néanmoins, lorsque l’expérimentation de l’un de ses collègues tourne mal, sa vie bascule. De retour sur Terre après cette catastrophe, elle découvre que des éléments clés de sa vie ont disparu, ont changé…
Une série qui ne perd pas le nord
Rien de nouveau sous le soleil ? Sur le papier, Constellation ressemble à nombre de productions spatiales. La petite lucarne cultive la fascination des spectateurs pour l’espace, Apple TV+ a déjà joué à ce petit jeu plus d’une fois. Pour autant, cette nouveauté avait attiré notre attention grâce à son synopsis qui laissait entrevoir une épopée métaphysique teintée de drames humains. L’on pouvait néanmoins craindre que pour les spectateurs rompus à l’exercice, le mystère ne reste pas entier bien longtemps. Après huit épisodes, force est d’admettre que l’on a aucun mal à se prendre au jeu de la nouvelle née du catalogue Apple TV+. Malgré des ambitions a priori démesurées, huit épisodes d’une heure pour raconter la catastrophe spatiale et ses retombées, ce thriller fantastique s’avère particulièrement efficace.
Cette réussite repose en premier lieu sur un découpage maîtrisé, surprenant et généreux. Plutôt que de simplement consacrer quelques minutes à la catastrophe spatiale qui frappe l’héroïne, Constellation décide de s’y attarder pendant pas moins de deux chapitres. Ce récit d’enfermement est particulièrement prenant, venant poser les bases d’une intrigue plus vaste et moins sédentaire qui viendra se déployer sur plusieurs continents. À la manière de poupées russes, Constellation révèle quantité de sous intrigues qui se répondent et se complètent.
Ce choix aurait largement pu se faire au détriment de la compréhension, elle s’assure de toujours maintenir son cap : suivre son héroïne au travers de ses questionnements, son enquête dans les coulisses de l’ISS et au sein de son foyer. Si quelques ralentissements sont à déplorer, la série rattrape son auditoire in extremis au moyen de cliffhangers efficaces.
Réalité(s)
Malgré les éléments fantastiques qu’elle convoque, cette nouvelle production Apple TV+ ne se laisse pas aller à la surenchère de concepts scientifiques nébuleux et de situations saugrenues. Tandis que l’univers de la série se construit, le scénariste raccroche ses personnages à une forme de réalité bienvenue. Dès son retour sur Terre, Jo doit se confronter à ses interrogations autant qu’à la bureaucratie d’un organisme international. Les auteurs se jouent de certaines théories du complot entourant la conquête spatiale, s’inspirent de faits divers qui ont marqué l’histoire. La mission avortée Apollo 18 est un point de départ pour tout un pan de l’intrigue qui va se pencher sur le scepticisme à outrance.
Il s’agira aussi de la suivre alors qu’elle se remet des conséquences d’une année loin des siens, en microgravité. Le volet intime de cette épopée occupe une place cruciale, vient jouer avec les points de vue pour construire sa réflexion. Assez savamment, la série confronte le traumatisme à des questionnements plus larges sur la nature humaine. Sans en dire trop, on dira simplement que Constellation s’empare d’un concept populaire, mais qui n’est pas toujours exploité comme il le devrait. La série parvient pourtant à le réinventer en piochant plus du côté du thriller nordique que de la production américaine de tous les superlatifs. Développée en collaboration avec deux sociétés de production européennes, Haut et Court TV ainsi que Turbine, Constellation jouit d’une certaine forme de singularité.
Étoile polaire
Dans un panorama largement dominé par les productions américaines, les collaborations européennes à gros budget sont toujours accueillies à bras ouverts. Sur Netflix, on se souvient encore de l’énorme succès critique et public de Dark, la série allemande qui profitait du savoir-faire de ses auteurs autant que son contexte a priori dépaysant pour les spectateurs lambdas. Constellation n’est ainsi pas sans rappeler les prémices de cet ovni au point de départ ancré dans la réalité avant de se muer en exploration métaphysique. Si l’esthétique de la dernière née du catalogue Apple TV+ est moins léchée, elle n’a pas à rougir face aux récentes séries de science-fiction. Les réalisateurs qui se succèdent derrière la caméra s’amusent avec le concept, distillent des indices sur la portée de la narration et construisent un environnement fait de vieux bâtiments austères, d’étendues enneigées et de décors spatiaux froids.
Cette maîtrise du format télévisuel se ressent particulièrement dans les premiers épisodes, ainsi qu’à l’approche de la fin, lorsqu’une nuit dans le froid polaire permet à la narration de prendre tout son sens. On aurait sans doute aimé que le curseur soit poussé un peu plus loin, que la série s’autorise plus d’exubérance, mais elle ne démérite pas. Ce succès est aussi alloué aux talents des acteurs et actrices qui peuplent ce récit fantastique, à commencer par Noomi Rapace qui fait encore une fois la démonstration de son talent dans le registre dramatique. Elle fait face à un James D’Arcy captivant en père de famille dépassé par les événements. Mais c’est finalement Jonathan Banks qui séduit le plus, il se voit confier une partition plurielle à la Dr Jekill et Mr Hyde.
Apple TV+ grimpe les échelons avec des productions de science-fiction ambitieuses, rafraîchissantes et captivantes. Bien aidée par son origine européenne, la dernière née du catalogue Apple TV+ séduit par un savant découpage et une intrigue humaine captivante. On retrouve un peu d’Interstellar dans la démarche, et ce n’est pas pour nous déplaire. Constellation n’atteint pas le niveau de maîtrise de la proposition de Christopher Nolan, mais s’illustre comme le haut du panier des séries du genre, aux côtés de Fondation et Silo.
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Avec Noomi Rapace en photo de couverture, j’ai cru que c’était Prometheus au début
Soporifique, j’ai pas réussi à tenir jusqu’a la fin du 2ème épisodes…
Pas encore vu Constellation.
Mais, pour ce qui est de votre conclusion, si Silo est excellent (pour qui a préalablement lu les bouquins), Fondation est vraiment une daube infâme (pour qui a préalablement lu les bouquins).