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Critique Boy Kills World : cour de récréacon

Bien qu’il ait fait l’objet d’une certaine curiosité quand il a commencé à se montrer sur la toile, Boy Kills World a connu un bide dans les salles américaines, au point qu’il a fallu Prime Vidéo pour lui laisser sa chance à l’international. Alors, échec mérité ?

L’été, saison de soleil, de plages, de Jeux olympiques, d’élections législatives et de gros fours au box-office. Si Deadpool & Wolverine (1,2 milliard de dollars de recettes dans le monde) a permis à Marvel de renouer avec le succès, les sorties de Borderlands (31 millions) et de The Crow (21 millions) ont permis aux comptables de chez Lionsgate de pleurer un bon coup. Un investissement de Kleenex partagé avec Roadside Attractions pour Boy Kills World dont le parcours américain a surtout Kills Boy avec 2,6 petits millions.

Mais parce qu’il reste toujours une chance pour que le film ait été incompris, parce qu’il avait su piquer notre curiosité par son style décalé et sa promesse de grosses patates — si vous avez lu notre avis sur Kill vous savez qu’on aime ça, et parce que les abdos de Bill Skarsgård étaient l’une des seules choses que l’on sauvait de The Crow, nous avons sauté sur l’occasion de sa sortie sur Prime Vidéo en France pour nous faire notre propre opinion sur Boy Kills World.

Au sein d’une société dystopique, la famille Van Der Koy règne d’une main de fer, éliminant annuellement ses opposants lors d’un show baptisé « Le Carnage ». Après un entraînement extrême avec un Shaman, Boy, un jeune homme sourd-muet ayant survécu au meurtre de sa mère et sa sœur des années plus tôt par la matriarche, décide qu’il est temps d’accomplir sa vengeance.

Casse-gueule

S’il y a bien un mot qui définit à la perfection Boy Kills World, c’est celui-ci. Le métrage est casse-gueule dans tous les sens du terme. Tout d’abord, parce que si le « World » du titre est un peu exagéré tant on n’atteint pas le niveau de tuerie d’autres fleurons du genre, le film n’en reste pas moins brutal dès lorsque le Boy Bill laisse parler la violence. Le cinéaste s’est entouré de David Szatarski, réalisateur de la seconde équipe et chorégraphe des combats qui a déjà officié sur le diptyque Kingsman ou Black Widow, pour nous livrer des affrontements costauds.

Que ce soit Mohr ou les scénaristes Tyler Burton Smith et Arend Remmers, tout ce petit monde vient du milieu du clip et du jeu vidéo – Smith ayant notamment travaillé sur Sleeping Dogs – et on ne peut pas dire que ces influences ne se ressentent pas à l’écran. L’ensemble de la direction artistique a été pensé comme un jeu vidéo avec ses niveaux à couloir et ses boss de fin. Du casque à message de June 27 (Jessica Rothe) en passant par un finish move qui n’est pas sans rappeler une action contextuelle durant une cinématique, sans oublier l’imagination du héros qui s’inspire d’une borne d’arcade, Boys Kills World est autant une déclaration d’amour à l’art vidéoludique que pouvait l’être le Scott Pilgrim d’Edgar Wright.

Boy Kills World
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Une lettre d’intention qui permet à chaque séquence de se renouveler, que ce soit en termes de décors ou d’objets utilisés pour trucider du figurant. Usine d’armes, cuisine (meilleure utilisation d’une râpe à fromage), plateau tv… Des stages que le protagoniste principal doit traverser afin d’accomplir sa mission. Un effet de style qui ira jusqu’à lui fournir un inventaire sous forme humaine lors d’une courte séquence.

Dès lors, on comprend facilement que les handicaps du Boy ne sont pas tant un but scénaristique que de nous permettre de nous glisser dans la peau de ce personnage-joueur « avec une voix trop cool ! ». Le découpage souvent abrupt des transitions n’étant qu’une simili-vision d’un temps de chargement. Du reste, l’action fait son travail, le sang numérique coule à flots avec quelques scènes bien gores à son actif. Une violence décomplexée, assumée au milieu d’un scénario qui mange à tous les râteliers, de The Raid à Hunger Games.

Un déluge ludique d’hémoglobine qui se prend souvent les pieds dans le tapis de sa propre idée. Car si celle-ci a le mérite d’exister, elle n’en reste pas moins accomplie grossièrement et souvent sans particulièrement de talent. Jamais aussi fou que ça pourrait l’être, le film est souvent trop bête pour penser à son propre équilibre, comme si une bande de potes avaient voulu se faire plaisir en pensant séquence par séquence sans vision d’ensemble.

Boy Kills World (1)
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Un concept intéressant peut vite devenir barbant parce qu’employé excessivement. L’exemple concret est la voix-off du Boy, incarnée par H. Jon Benjamin, dont l’apparition souligne un vent de fraîcheur avant qu’on ne la supplie de se taire quelques minutes plus tard, au milieu de son bavardage incessant.

Boy Kills notre patience

Le film est un amoncellement de pièces qui ne s’emboîtent que rarement ; décousu dans son rythme, forçant son humour plus présent qu’il n’y paraît, changeant de style entre deux scènes d’action, dans l’optique d’éviter la répétition, mais non la frustration, Boy Kills World souffle le chaud et le froid pendant deux heures. Second degré pendant trente minutes, avant de devenir incroyablement sérieux, puis à nouveau guignolesque… Il a une façon bien à lui de dynamiter nos attentes et de nous donner autant envie d’en reprendre un peu comme de vouloir que le calvaire s’achève.

Boy Kills World (4)
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Une hystérie pas collective jusque dans son casting, où l’acteur impliqué côtoie celui venu ouvertement chercher son chèque. Chacun semblant jouer dans un film diamétralement opposé à celui de son camarade. On a le sentiment que Boy Kills World est né d’une envie de réaliser une envie, une folie sans cadre, quitte à insulter franchement son propre scénario en ne se souciant pas de donner un intérêt ou une vraie explication à la majorité des éléments mis en place comme le handicape du Boy, inutile au possible.

L’émotion est fabriquée, les rebondissements téléphonés et l’ensemble des acteurs n’a rien à jouer. Et le plus incroyable, c’est que tout le monde semble en avoir conscience. Boy Kills World est le fruit d’une soirée trop arrosée à l’alcool et aux drogues avec un soupçon de burn Out. Tout n’est clairement pas bon à prendre, mais entre deux trois shots de spiritueux à 90, on trouve quelques délires qui donnent le sourire.

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Notre avis

À la sortie de notre visionnage, il est autant facile de comprendre pourquoi le film a été boudé que de s'en désoler. Boy Kills World est un amoncellement d'idées, pas toutes bonnes, pas toutes réussies, mais ô combien généreuses autour d'un revenge movie qui convoque tout un pan du cinéma d'action. Pour son premier long-métrage, le réalisateur allemand Moritz Mohr a décidé de se laisser aller à ses lubies sans se freiner avec ce que ça comporte de bons comme de mauvais côtés. Toujours est-il que le résultat a le mérite d'être original et que dans une ère où les productions peuvent avoir cette tendance à l'aseptisation, c'est déjà pas mal.

L'avis du Journal du Geek :

Note : 5 / 10
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