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[Critique] A Cure for Life

Presque quatre ans après l’échec de Lone Ranger, Gore Verbinski revient de manière plus modeste avec un thriller pour le moins intrigant. De quoi renouer avec…

Presque quatre ans après l’échec de Lone Ranger, Gore Verbinski revient de manière plus modeste avec un thriller pour le moins intrigant. De quoi renouer avec son public ?

Les carrières de réalisateurs ressemblent parfois beaucoup à celle des acteurs. La trajectoire de Gore Verbinski donne d’ailleurs à sa dernière oeuvre une certaine importance dans le futur de sa filmographie. Récompensé pour son travail sur la saga Pirates des Caraibes ou son adaptation (fidèle) du Ring d’Hideo Nakata, il a connu un passager à vide avec Lone Ranger, qui fut un des plus lourds échecs commerciaux de Disney. A Cure For Life lui permet d’effectuer un retour en douceur et d’aborder des thèmes visuels qui lui sont chers.

Jeune cadre new-yorkais aux dents longues, Lockhart est sommé par sa direction d’aller chercher son supérieur dans un centre de soin situé dans les montagnes suisses. Dans une lettre pour le moins laconique, ce dernier explique qu’il a décidé de tourner le dos à la finance. Le héros (incarné par un Dane DeHaan plutôt convaincant) est donc missionné pour le convaincre de revenir.

Les premiers plans annoncent la grande ambition esthétique du film. Verbinski a beau disposer d’un budget cinq fois moins conséquent qu’avec Lone Ranger, il n’a pas rogné sur la qualité visuelle de son travail.

Les gratte-ciel new-yorkais laissent rapidement place aux paysages montagneux, véritable théâtre de l’action. C’est là-haut que se révèle l’aspiration formelle du réalisateur. La lumière donne le ton et plonge le film dans des teintes froides, voire neurasthéniques lorsque l’on découvre la vie de cet étrange sanatorium. La patte du directeur de la photographie Bojan Bazelli est prégnante. Ici encore, l’éclairage est puissant, parfois tellement saturé qu’il irradie l’image de blancheur, plus particulièrement à l’intérieur des bâtiments.

Verbinski en profite pour déployer toute sa maîtrise, et s’emploie pendant presque une heure à enchaîner les cadrages audacieux. Il fait ainsi la part belle aux grands-angles, pour immédiatement y opposer des gros plans au fur et à mesure que l’on pénètre dans un établissement aux allures de forteresse.

Le centre, réputé pour ses soins thermaux et la qualité exceptionnelle de son eau, offre un matériau de choix au réalisateur. S’il a toujours fait preuve d’inventivité dans ces précédentes productions, notamment sur l’esthétique de Pirates des Caraïbes, Verbinski se sert ici de l’eau comme d’un élément constitutif de l’image. Véritable pierre angulaire du scénario, le liquide apparaît toujours cristallin et fait souvent office de miroir. Il joue ainsi avec sa transparence et la dualité des plans sied parfaitement au personnage, lui-même assez paradoxal.

Cette maestria visuelle, qui vaut à elle seule le détour, n’est hélas pas soutenue par une écriture solide. Les influences sont nombreuses et variées, mais ont parfois du mal à cohabiter entre elles. On pense évidemment à La Montagne magique de Thomas Mann, ici librement adaptée, mais aussi à une forme de romantisme angoissant cher au cinéma de Murnau. La première partie du récit fonctionne d’ailleurs assez bien, en jouant sur une forme de régression temporelle, qui fait petit à petit disparaître les stigmates technologiques de notre ère actuelle.

La direction artistique lorgne alors avec le XIXe siècle et semble se refermer tout entière sur Lockhart, en proie à des visions étranges. La beauté presque livide de Mia Goth renforce cet aspect, et s’avère être un choix de casting judicieux. Hélas, l’intrigue du film se délite bien trop rapidement, comme si Verbinski n’y voyait qu’un aspect subsidiaire à l’oeuvre. Plus dérangeant encore, le récit se disperse en voulant s’attaquer à plusieurs chantiers scénaristiques, sans pour autant les exploiter pleinement. Le film se veut une critique contre le monde de la finance et ses dérivés, mais aussi dédale psychologique voire un grand conte gothique lors d’une dernière partie franchement inégale.

En voulant insérer toutes ces thématiques sur presque 2 h 30, A Cure for Life risque de faire décrocher une partie des spectateurs, qui ne sauront plus sur quel pied danser devant certaines scènes inutiles. C’est bien dommage, tant ce maelstrom visuel sort des sentiers balisés de la production hollywoodienne.

A Cure For Life est une oeuvre élégante, qui démontre avec force le talent de Gore Verbinski lorsqu’il s’agit de filmer. Expérience visuelle avant tout, elle délaisse en revanche trop rapidement la narration et laisse apparaître une intrigue simpliste qui finit de s’épuiser sur les 2 h 30 que compte le film. La direction artistique reste envoûtante, mais on aurait aimé que cette maîtrise stylistique, si rare dans les films de studios actuels se retrouve dans l’écriture du scénario. Un film d’esthète avant tout.

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1 commentaire
  1. Une belle image c’est vrai, mais qu’est-ce que ça finit de manière pourrie… Un certain nombre d’éléments du scénario se devinent longtemps avant que ça n’arrive, et le film finit en prenant les spectateurs pour des idiots, genre on t’enfonce le clou 20 fois pour être sûr que tu as bien compris. Beaucoup de choses glauques sont complètement gratuites. Bref, je ne peux pas dire avoir passé un mauvais moment non plus, il y a des points positifs, mais je ne trouve pas que ce soit un bon film.

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